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Ministère des Sports : Pascal Gentil, candidat autoproclamé

Tandis que la perspective d'un remaniement ministériel se précisait jour après jour, l'ancien champion du monde de taekwondo, Pascal Gentil prenait un billet aller pour la France depuis la Chine, où il travaille. Objectif : placer ses pions pour rafler le poste de ministre des Sports à son "amie" Roxana Maracineanu.
Article rédigé par Guillaume Poisson
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 4min
 

"Le monde du sport mérite mieux". Elle est plus ou moins passée inaperçue, mais cette phrase lâchée par Pascal Gentil, dans un entretien accordé au journal l'Equipe, avait déjà tout de la campagne agressive qu'allait mener l'ancien champion du monde de taekwondo pour le ministère des Sports les jours suivants. L'ancien champion du monde s'est démultiplié dans les médias, accordant des interviews, publiant des tribunes, martelant qu'il n'est "candidat à rien" tout en critiquant ouvertement le bilan de Roxana Maracineanu.

Des réseaux réactivés deux semaines avant le remaniement

Du 14 au 30 juin, Pascal Gentil a tweeté ou retweeté à 36 reprises des contenus autour du gouvernement, de La République en Marche, des articles concernant sa "disponibilité" ou sa volonté "d'aider le sport français". En comparaison, il avait tweeté 3 fois en mai, 4 en avril, 8 en février, une fois en janvier. Certains de ses tweets montrant son soutien au gouvernement, d'autres n'ayant aucun lien avec la politique. 

"Il avait déjà des contacts à la République en Marche, tout comme chez les Républicains", nous explique Sarah Paillou, journaliste politique au Journal du Dimanche, qui a pu l'avoir en interview il y a quelques jours. "Il connaissait bien certains députés. Mais c'est vrai qu'il a clairement réactivé tous ses contacts depuis son retour en France". 

Les ambitions politiques de Pascal Gentil ne datent, en effet, pas d'hier. En pleine carrière sportive, il s'était construit un début de réseau politique. Il soutient ouvertement Nicolas Sarkozy lors de sa campagne de 2007.  Il figure d'ailleurs sur la liste des invités du dîner du président fraîchement élu au Fouquet's. Il fait partie du collectif des Champions de la Paix de Peace and Sport : une centaine d'athlètes de haut niveau "engagés personnellement en faveur du mouvement de la paix par le sport". Il participe à la 8e édition des Jeux de l'Amitié à Bujumbura au Burundi pour célébrer le rôle du sport pour le changement social, puis contribue activement à la campagne des JO 2024 aux côtés d'autres anciens athlètes de haut niveau. 

C'est d'ailleurs sur ce même réseau qu'il utilise aujourd'hui, à son poste de "business developer" chez Securitas, une multinationale de sécurité privée. "Mon travail consiste à ouvrir mon réseau politique, sportif et économique aux nombreux commerciaux du groupe, pour vendre des solutions de sécurité intégrée, technologiques et humaines, clé en main", avait-il expliqué à Ouest-France en 2018. 

Billet aller vers la Terre Promise

Le 18 juin dernier, Pascal Gentil pose ses valises à Paris. Est-il venu spécifiquement pour faire campagne ?  "Il m'a dit qu'il avait un rendez-vous professionnel en France", relate Sarah Paillou. "Mais il a pris un billet aller seulement, et il m'a confié que des proches du gouvernement lui avaient assuré qu'il avait une carte à jouer pour le ministère des Sports".

Si le champion envisage ainsi aussi sérieusement d'obtenir la chaire suprême du ministère des sports, c'est qu'il considère ses sources comme suffisamment proches du dossier et bien informées. Sur Twitter, il s'est affiché auprès des députés Zivka Park, Fiona Lazaar ou Eric Diard. Sans oublier, deux jours plus tard, sa rencontre avec l'ancien président Nicolas Sarkozy. 

Dans le JDD, Renaud Muselier, président de la Région Sud et ami du taekwondoïste, et Eric Diard, n'ont pas manqué de louer les qualités de Pascal Gentil.

Ces sorties répétées et sa campagne tous azimuts ne sont pas forcément, selon la journaliste politique Sarah Paillou, le signe d'un opportunisme ou d'une maladresse particulière. La pratique serait même assez courante, chez les pressentis pour des postes de ministre, dans les jours qui précèdent un remaniement attendu : "Tout le monde savait qu'un remaniement aurait lieu. Et oui, chacun fait sa propre campagne. Regardez Marlène Schiappa, elle se positionne pour un poste.  C'est classique !"  

Pascal Gentil semblait-il confiant à l'idée de prendre la place de Roxana Maracineanu ? "Il est en tout cas confiant dans le fait que son nom soit une hypothèse sur la table pour le président", affirme Sarah Paillou. A l’Elysée, ça ne m’a pas été confirmé. Mes contacts ont seulement entendu parler de lui par la presse". 

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