Libérateur ou frustrant, un premier jour de déconfinement particulier pour les athlètes
Après deux mois d'entraînements à domicile, les 5 000 sportifs inscrits sur les listes de haut niveau pouvaient enfin s'entraîner en-dehors de chez eux ce lundi, lors de la première journée de déconfinement. "Cette journée était un peu particulière", nous explique la judokate Clarisse Agbegnenou... "parce qu'elle était comme les autres". Une réponse inattendue, alors que les athlètes pouvaient enfin retrouver un entraînement ordinaire, après deux mois d'une situation exceptionnelle.
Un déconfinement pas vécu de la même manière par tous
Le déconfinement n'a en effet pas été vécu de la même manière par tous les sportifs de haut niveau et la saveur de cette première journée de retour à la normale a été particulière en fonction de deux critères. D'abord, le lieu : Clarisse Agbegnenou a par exemple passé l'ensemble de son confinement à La Réunion, où elle se trouve encore, dans un environnement ouvert où elle "n'avait pas l'impression d'être confinée". Ensuite, le sport : pour le judo, pas de changement majeur avec le déconfinement, car la plupart des dojos ne devraient pas rouvrir avant début juin et que les sports de combat ne sont pas prioritaires. "Pour la pratique du judo, on attendra donc", affirme la médaillée d'argent aux Jeux Olympiques de Rio en 2016.
Du côté de l'athlétisme, même constat : les CREPS, où s'entraînent les athlètes de haut niveau, n'ont pas encore rouvert leurs portes. Pour Floria Gueï, championne d'Europe du 400m en 2014, ce lundi ressemblait étrangement à ceux des dernières semaines : "Je me suis entraînée à la maison comme avant, donc je n'avais pas l'impression que c'était le premier jour de déconfinement." "C'était une journée comme les autres", nous confirme Pascal Martinot-Lagarde, recordman français du 110m haies.
"Une vraie sensation de liberté"
Il faut se tourner du côté des coureurs cyclistes pour trouver des sportifs qui ont pu pleinement profiter de cette première journée de déconfinement. Guillaume Martin, coureur de l'équipe Cofidis depuis l'été dernier, nous offre un récit pour le moins rafraîchissant de cette journée : "J'étais pressé de retrouver la sensation du vent lorsque je pédale et avec la météo, je n'ai pas été déçu". Le grimpeur a profité du déconfinement pour parcourir 65 kilomètres en un peu plus de deux heures sur les côtes normandes balayées par d'importantes bourrasques de vent. "Ça a une saveur particulière parce que ça faisait un moment que je n'avais pas roulé dehors, donc je me suis levé plus tôt et avec un peu plus d'envie qu'habituellement. Et quand on roule à nouveau, on regarde différemment les voitures, la nature, la vie sociale. C'est une vraie sensation de liberté", témoigne le coureur de l'équipe française.
Même si Guillaume Martin a eu "une frustration en raison du confinement très ensoleillé" et du temps de ce lundi, le grimpeur a au moins pu profiter d'une vraie reprise. Charline Picon, véliplanchiste médaillée d'or aux Jeux olympiques de Rio en 2016, a de son côté subi les conditions météorologiques avec de forts orages à La Rochelle, où elle est basée. "On a eu des conditions estivales pendant deux mois, donc ça me désole de ne pas avoir pu naviguer, nous explique la membre de l'équipe de France de voile olympique. Mais c'est loin d'être dramatique." Charline Picon aura tout de même profité de ce jour de déconfinement pour revoir son entraîneur et préparer un retour à la navigation dès le lendemain. "Mais sinon, c'est comme un jour de confinement mais sans attestation", plaisante-t-elle.
Une reprise très progressive
Pour chacun des athlètes interrogés, cette première journée de déconfinement et ce retour à l'entraînement devait coïncider avec le plaisir de reprendre le sport en extérieur et le fait de retrouver des sensations. "Je m'entraîne depuis deux mois sur un tapis de course. Ça n'a rien à voir avec les sensations de la piste qui me manque", nous explique Floria Gueï. "Le risque à éviter est de trop en faire, de vouloir rattraper le temps perdu, analyse Guillaume Martin. Ce lundi, l'idée était de retrouver des sensations, de se faire plaisir, et il y aura le temps de travailler plus intensément plus tard". "Le maître mot dans le sport, c'est la progressivité. On ne bombarde pas dès le retour à l'entraînement", explique Pascal Martinot-Lagarde, qui table sur une reprise sur piste le 18 mai prochain. Même formule pour Clarisse Agbegnenou, qui souhaite rentrer début juin en France, lorsque l'INSEP, qui accueille habituellement 800 sportifs, devrait avoir rouvert ses portes.
Les infrastructures fermées et les conditions météorologiques ont donc pu provoquer une forme de frustration chez certains athlètes de haut niveau pour ce premier jour de déconfinement. Mais cette frustration est forcément atténuée par l'incertitude qui règne autour de la reprise des compétitions. "Ma prochaine compétition est dans sept mois", rappelle Charline Picon, alors que Floria Gueï souhaite tout de même "se tenir prête, au cas où il y aurait des compétitions cet été." "On est comme un chanteur sans concert", résume Pascal Martinot-Lagarde. Une formule qui synthétise bien la première journée de déconfinement, entre liberté partiellement retrouvée et reprise très progressive.
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