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Les joueurs au chômage plus isolés que jamais après l'annulation du stage de l'UNFP FC

Alors qu’à peu près 200 joueurs en France vont se retrouver sans contrat à la fin du mois de juin, l’Union nationale des footballeurs professionnels a annoncé dimanche que son stage estival destiné à venir en aide à ces joueurs au chômage n’aurait pas lieu. Un coup dur pour ces footballeurs sans contrat, dont une cinquantaine compte chaque année sur ce stage de plusieurs semaines pour se trouver une nouvelle équipe. Une annulation qui tombe au plus mauvais des moments, alors que les clubs risquent de réduire leurs effectifs en raison de la conjoncture économique.
Article rédigé par Denis Ménétrier
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 7min
 

Pour la première fois depuis sa création en 1990, le stage de l’UNFP FC n’aura pas lieu. Aucun joueur ne se réunira cette année à l’Espace Léonard de Vinci de Lisses, dans l’Essonne, lieu dédié pendant l’été aux joueurs qui se retrouvent au chômage à chaque fin de saison. Sans contrat à l'issue du mois de juin, ces footballeurs se réunissent plusieurs semaines pour se maintenir en forme physiquement et essayer de trouver un nouveau club en participant à des matches amicaux contre des clubs professionnels.

Mais dimanche matin, l'Union nationale des footballeurs professionnels (UNFP) a annoncé l’annulation de la 30e édition du stage, pour des questions de logistique : "Les spécificités qui sont les nôtres ne nous permettent pas de répondre totalement aux conditions sanitaires obligatoires, et il n’était pas question de prendre le moindre risque avec la santé des garçons qui nous font confiance", indique le communiqué du syndicat des footballeurs professionnels, alors que les joueurs du stage se déplacent régulièrement pour des essais dans des clubs à travers la France. Une annonce qui fait office de coup dur pour les footballeurs au chômage qui envisageaient de participer au stage cet été, alors que les clubs risquent d’être moins enclins à recruter cet été, en raison de la crise économique qui les touche de plein fouet.

Des matches amicaux contre des clubs professionnels pour se montrer

Chaque année, ils sont entre 30 et 50 à s’inscrire et à s’entraîner dans les installations de Lisses dignes d’un centre d’entraînement de club professionnel, et à profiter d’un staff totalement dévoué à remettre ces joueurs sur le chemin du succès. En moyenne, ce sont 60 à 80% des stagiaires qui retrouvent un club de la fin du stage en août au 30 janvier suivant. "On joue notre vie à chaque match amical", assure Arnold Bouka Moutou, passé par l'UNFP FC à l'été 2019. Mais cette saison, les footballeurs au chômage devront donc se passer de ces services. "C’est vraiment dommage pour eux", déplore Christophe Mandanne, qui a également participé au stage en 2019. L’été dernier, l’ancien attaquant de Guingamp a ainsi pris part à neuf matches amicaux contre des clubs de Ligue 1, de Ligue 2 et de National. Sans pour autant trouver une nouvelle équipe, ce qui l’a poussé à prendre sa retraite.

"Mais je ne regrette rien, c’est super important de pouvoir participer à ce stage, plutôt que de rester chez soi ou d’aller courir seul au parc", explique Mandanne. Au-delà de pouvoir prouver ses qualités sur le terrain lors des rencontres amicales, l’avantage du stage pour les joueurs est de se maintenir en forme physiquement afin d’être prêt en cas d’essai dans un club. Cet été, les joueurs sans contrat devront se tourner vers un préparateur physique pour des entraînements individuels. Mais "c’est toujours plus facile de se maintenir en forme en groupe que tout seul", explique Arnold Bouka Moutou.

Une absence de stage forcément préjudiciable

Après plus de six mois au chômage, le latéral gauche qui a connu la montée en Ligue 1 avec Angers en 2015 a décidé de participer au stage du syndicat des joueurs l’année dernière. "Quand on arrive en fin de contrat, on pense toujours qu’on va trouver un club rapidement. Mais finalement, on se pose plein de questions. Donc pouvoir participer au stage, ça permet de se refaire mentalement", explique Bouka Moutou, qui évolue dorénavant dans le club canadien du Valour FC. L'UNFP FC mise énormément sur l'aspect psychologique pendant les semaines de stage, le staff comptant notamment dans ses rangs un préparateur mental, qui accompagne les joueurs dans cette période difficile de la carrière d’un footballeur.

Un manque qui pourrait être préjudiciable cet été pour les 181 joueurs qui se retrouveront sans contrat à la fin du mois de juin selon le site de l’UNFP. Durant le stage estival, "tout le monde s’entraide, le staff nous aide psychologiquement", souligne Mandanne, avant d’ajouter : "On n’est plus là assis à attendre que ce putain de téléphone sonne". "Et puis ça montre aux clubs qu’on est motivé et qu’on reste professionnel malgré la situation", précise Arnold Bouka Moutou. "C’est vrai que les matches amicaux nous permettent de voir comment tel ou tel jour réagit à cette situation qui est particulière et très désagréable, de voir dans quel état d’esprit il se trouve", explique Stéphane Carnot, membre de la cellule de recrutement de l’En Avant Guingamp, qui précise que le club "garde de plus en plus un œil sur l’UNFP FC surtout depuis que le club est en Ligue 2".

"Beaucoup de joueurs vont se retrouver sur le carreau"

Chaque année, l'UNFP dépensait chaque année entre 150 000 et 200 000 euros pour financer ce stage, en prenant en compte tous les frais des joueurs (déplacements, tenues, hébergement...). Sans stage, les joueurs au chômage vont désormais devoir se débrouiller seuls pour trouver un nouveau point de chute. Ou plutôt compter sur leurs agents et leurs réseaux. David Oberhauser, gardien du Red Star (National) cette saison, regrette de ne pas pouvoir rejoindre l’UNFP FC après avoir goûté à l’expérience l’été dernier. "C’est forcément une déception", explique le portier dont le contrat se termine à la fin du mois de juin. "Ça va être très handicapant, pour trouver un nouveau club et par rapport à la préparation physique", explique David Oberhauser, qui avait effectué un essai à Metz la saison dernière, avant d’être en contacts avec Brest.

En plus de l’absence de stages, les joueurs au chômage risquent donc de pâtir de la crise économique qui pourrait pousser les clubs professionnels à réduire leurs effectifs et à piocher davantage dans leurs centres de formation. "Beaucoup de joueurs en fin de contrat vont se retrouver sur le carreau", nous précisait un agent de joueurs de Ligue 1 il y a quelques semaines. Dans son communiqué, l'UNFP a tout de même précisé qu'elle "accompagnerait au quotidien les joueurs pour qu'ils puissent se concentrer sur la recherche d'un nouveau contrat." Mais déjà "à la merci des clubs" les dernières saisons selon Arnold Bouka Moutou, les footballeurs sans contrat vont désormais prier plus que d’habitude pour qu’une équipe les sollicite. "C’est sûr qu’il y aura énormément de joueurs qui seront très mal psychologiquement cet été", affirme l’ancien latéral gauche d’Angers, avant de conclure, en constatant que le stage n’aura pas lieu : "Je leur souhaite bien du courage parce qu’ils vont vivre des moments très difficiles."

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