Le talentueux Mr Rooney
Aux premiers abords, il n'est pas très sexy. Son jeu non plus ne déchaîne pas les passions. Bref Wayne Rooney n'aura jamais la reconnaissance d'un Lionel Messi ou d'un Cristiano Ronaldo. Et pourtant il fait lui aussi partie des monstres sacrés de l'époque. En marquant ses 49e et 50e buts avec la sélection aux Trois Lions le Mancunien vient, coup sur coup, d'effacer Gary Lineker et Bobby Charlon des tablettes. Le fait de surpasser ces deux légendes devrait suffire à restaurer la place que mérite le talent des Red Devils dans l'histoire de son pays. Mais cela n'a pas toujours été une évidence.
Un passé contrasté
La sélection et Rooney, tantôt bon génie, tantôt mauvais garçon, jouent en effet à "je t'aime moi non plus" depuis ses débuts internationaux en février 2003, à 17 ans et 317 jours (record national ensuite amélioré en 2006 par Theo Walcott). Côté pile, du haut de ses 107 sélections, Rooney , fidèle soldat qui disputera en juin sa 6e compétition majeure après trois Mondiaux et deux Euros, porte le brassard depuis le départ de Steven Gerrard en juillet 2014.
Mais l'enfant d'Everton, qui a claqué deux fois la porte d'United avant de se laisser convaincre par Sir Alex Ferguson en 2004, a aussi connu son lot de déboires personnels et sportifs dans un pays où la presse people n'est jamais tendre. Au point de reconnaître vendredi, avant de rejoindre Charlton le lendemain en inscrivant son 49e but contre Saint-Marin, qu'il "échangerait bien tous ces buts contre la médaille du vainqueur l'été prochain". Non qualifié pour l'Euro 2008, il a été exclu en quart du Mondial 2006 après avoir piétiné le Portugais Ricardo Carvalho, précipitant l'élimination des siens. Enfin, buteur redoutable, il traîne comme une misère son unique but inscrit en trois Coupes du monde, en 2014 contre l'Uruguay (élimination de l'Angleterre au premier tour). Comme Beckham avant lui, il a donc connu le déshonneur national après avoir été placé sur un piédestal.
Un taureau aux pieds de ballerine
Pour ses détracteurs anglais, Rooney n'incarne pas non plus l'élégance britannique dans son jeu. Trapu, hargneux, le Red Devil paie parfois la débauche de ses efforts devant le but. Mais c'est oublier les sacrifices qu'il est capable de consentir pour ses coéquipiers et même parfois la finesse technique que son physique de taureau ne laisse pas deviner. Son nouveau record, Rooney entend pourtant le porter bien plus haut puisqu'il lui reste de nombreuses années et qu'il n'a pas l'intention de raccrocher les crampons. "Je pense être capable d'aller en Russie, estimait-il lundi en regardant déjà jusqu'en 2018. Après cela, il semble réaliste de voir comment je me sens et, si je pense que ce n'est pas une bonne chose pour l'Angleterre ou pour moi, il faudra prendre une décision. Je ne suis pas du genre à dire que je ne suis pas disponible pour l'équipe nationale. Ça viendra plus du choix du sélectionneur que de moi. C'est un grand honneur de jouer pour l'Angleterre".
"Si moi je pense que je peux continuer, j'essaierais. Mais si le sélectionneur dit que je ne fais pas partie de ses plans, c'est peut-être mieux que je ne dispute pas les éliminatoires", poursuivait-il. Car un nuage au-dessus d'Old Trafford menace actuellement le Mancunien. Sous l'influence de Louis van Gaal, le statut de Rooney , qui n'est plus qu'à 17 buts des 249 réalisations de son aîné Charlton sous le maillot des Red Devils, est en effet en train de s'éroder. Toujours se relever, toujours prouver : ainsi va le "Wayne's world".
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