L'Afrique du Sud tient son pari
Sous toutes les latitudes, la presse lui a donné raison, saluant à Berlin "une grande fête réussie", "une célébration internationale" pour le Washington Post, ou "un Mondial bien organisé" à Paris. Le président de la Fifa, Joseph Blatter, "l'Afrique a mérité nos compliments: elle a prouvé qu'elle pouvait organiser un tel évènement, il s'agissait d'y croire et d'avoir confiance, nous y avons cru et ils l'ont bien fait". Pourtant, les défis ne manquaient pas pour un pays contrasté, touché par la pauvreté et miné par la violence. A commencer par des infrastructures dignes d'un évènement de cette importance.
Depuis plusieurs mois, des stades dernier cri sont sortis de terre. D'autres ont été rénovés. Les dix écrins choisis par les organisateurs ont fait l'unanimité même si certains seront plus coûteux à entretenir, faute d'avoir un club de football performant ou un bassin de population élevé et riche. Le seul petit couac se situe au niveau des transports où la première semaine fût un peu difficile. Flambant neuf, le réseau routier et ferré a démarré en douceur avant de prendre son envol. L'économie ? Bien que le nombre de visiteurs étrangers lié au Mondial ait été revu à la baisse, à 300.000 contre 450.000, le secteur touristique devrait gagner 8,8 milliards de rands (934 millions d'euros) pendant la compétition, selon Gillian Saunders du cabinet de conseil Grant Thornton. Le Mondial a affiché un taux de remplissage des stades élevé mais cela n'a pas profité aux villes les plus reculées. A Polokwane ou Bloemfontein, le public n'a fait qu'un aller-retour tandis qu'au Cap, les touristes traditionnels ont reporté leur séjour et les hôtels n'affichent qu'un taux de 40%. Quant aux townships, difficile de dire qu'ils ont profité du passage de la Coupe du monde sur leur sol. De la fierté oui. Des retombées financière non.
La crainte majeur des observateurs était l'insécurité. L'Afrique du Sud connaît l'un des taux de criminalité les plus élevés au monde avec une moyenne de 50 homicides par jour, très concentrés dans les zones déshéritées. Avant le tournoi, un tabloïd anglais évoquait même une possible "guerre des machettes". Fort heureusement, aucun incident majeur ne viendra ternir le Mondial. Hormis un Américain blessé par balles, aucun touriste n'a été victime de violences pendant la compétition, grâce en particulier à un important déploiement policier. "Nous avons fait la guerre et nous l'avons gagnée", a conclu le ministre adjoint de la Police Fikile Mbalula. Au lieu de la violence, c'est un peuple souriant et accueillant qui a accompagné ce mois de compétition. Enthousiaste, la foule a offert ce qu'elle avait de plus précieux : son sourire. Et tant pis pour ceux qui ont préféré s'isoler dans leur hôtel ou dans leur bus.
En 1998, la France s'était rassemblée derrière le label black-blanc-beur. Douze ans après, cette communion et cette fraternité a pris du plomb dans l'aile. En Afrique du Sud, on pourrait vivre la même chose. La frêle osmose entre les blancs attitrés par le rubgy et les townships noirs vibrants pour le foot ne va pas changer tout de suite le quotidien des sud-africains. Coupe du monde ou pas, Blancs et Noirs continuent de vivre dans des quartiers bien distincts, ne se marient pas entre eux et leurs revenus sont aux antipodes : le taux de chômage des Noirs est de plus de 40% contre 4% pour les Blancs. "Le sport, c'est le domaine de l'émotion éphémère, souligne Paul Dietschy, auteur de l'ouvrage "Foot et politique". On peut se rassembler un jour pour un match, ça ne veut pas dire que les populations vont ensuite vivre ensemble."
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