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La classification des handicaps aux Jeux paralympiques, un vrai casse-tête

Pour l'équité de la compétition, les fédérations internationales ont mis en place des systèmes de classification et de contrôle des handicaps aux Jeux paralympiques. Des précautions qui n'empêchent pas la triche et les polémiques.

Article rédigé par Thomas Baïetto
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
L'athlète de cyclisme handisport néerlandaise Monique Van der Vorst a provoqué un scandale, début avril 2012 aux Pays-Bas, en avouant qu'elle avait menti sur son handicap pendant toute sa carrière. (BAS CZERWINSKI/AP/SIPA / AP)

JO 2012 - Mallory Weggemann ne décolère pas. La nageuse américaine visait neuf médailles d'or aux Jeux paralympiques de Londres, elle a appris mercredi 29 août qu'elle ne participerait finalement qu'à sept épreuves à cause d'un changement de catégorie décidé par le Comité international paralympique (CIP).

"Je suis complètement paraplégique, je n'ai ni sensation, ni mobilité en dessous de mon nombril et je vais concourir contre des gens qui sont doubles amputés sous le genou et qui ont, au-dessus du genou, toutes leurs capacités", s'est plainte l'athlète dans une interview à la BBC (article en anglais). Le cas de la nageuse américaine n'est pas isolé. Le système de classification, indispensable pour s'assurer de l'équité de la compétition, est loin de faire l'unanimité. Explications.

Une multitude de catégories

Les athlètes paralympiques sont regroupés en trois grandes catégories, listées sur le site du comité paralympique français : handicapés physiques, malvoyants et non-voyants, handicapés mentaux ou psychiques. C'est ensuite que cela se complique. Chacune de ces catégories a son propre système de classification, qui diffère selon le sport, afin de s'assurer que "le facteur déterminant du succès est l'habileté et l'entraînement plutôt que le degré d'infirmité".

Si certaines disciplines comme le Goalball ou le Cécifoot ont réglé efficacement le problème en obligeant les joueurs à porter un bandeau sur les yeux, les autres sports ont du créer une ribambelle de classes, désignées par des sigles tel que T11, S4 ou F40 et répertoriées par la BBC (article en anglais). A Londres, il y aura ainsi 15 finales du 100 m, a calculé l'AFP, relayée par nos confrères de Francetv sport.

La lettre correspond à l'initiale du sport en anglais - T comme "Track" pour la piste, S comme "Swimming" pour la natation et F comme "Field" pour les sauts et les lancers. Le premier chiffre indique le type de handicap, le second son degré de gravité, explique le site internet de la chaîne de télévision britannique Channel 4 (article en anglais). Moins le second chiffre est élevé, plus le handicap est important. Mallory Weggemann est ainsi passée de la catégorie S7 à S8.

Certains sports collectifs, comme le basket, sont confrontés à un véritable casse-tête. Chaque joueur se voit attribuer un certain nombre de points en fonction de la gravité de son handicap, et chaque équipe ne peut aligner plus de 14 points sur le parquet.  En fonction du nombre d'athlètes par catégorie et de choix politiques (mettre en avant un handicap lourd même s'il concerne peu de sportifs), les fédérations internationales arrêtent une liste des catégories pour chaque événement. 

Des contrôles complexes

Toute compétition paralympique mondiale implique l'intervention de classificateurs mandatés par chacune des fédérations internationales handisports. La fréquence et la modalité des contrôles varient selon les sports. "Là où il y a des points communs, c'est que le panel de classificateurs est constitué d'un médecin, d'un kinésithérapeute et d'un technicien", explique à FTVi Pierrick Giraudeau, directeur technique national (DTN) adjoint en charge du haut niveau à la Fédération française de handisport. Ce sont ces derniers qui ont décidé de reclasser la nageuse américaine.

L'exercice n'est pas simple. "Certaines formes de handicap ne posent aucun problème au panel, d'autres formes de handicap peuvent être difficiles à juger", reconnaît Pierrick Giraudeau. L'amputation est ainsi simple à évaluer. En revanche, "dès que l'on est sur des défaillances cérébrales, dues à des maladies ou à des accidents, c'est plus compliqué à classifier", poursuit le DTN adjoint. Il est par exemple difficile d'évaluer les dégâts provoqués sur l'organisme de l'athlète par un accident cardio-vasculaire, ou par un traitement mal administré, comme c'est le cas pour Mallory Weggemann.

Triches et polémiques

Certains n'hésitent donc pas à profiter de cette difficulté pour flouer les juges. "Il y a des exemples de personnes qui se sont faites déclassifiées suite à des exagérations de leur handicap", témoigne Pierrick Giraudeau. L'exemple le plus célèbre est celui de l'équipe de basket espagnole de la catégorie handicapés mentaux, championne olympique à Sydney en 2000. On a découvert après l'épreuve que 10 des 12 joueurs étaient en parfaite santé.

Une skieuse de fond russe, qui participait à une épreuve réservée aux non-voyants, s'illustrera également en 2006 aux Jeux de Turin en bondissant de joie à la vue de son temps sur le tableau d'affichage. En 2012, la Hollandaise Monique van der Vorst, dont la guérison spectaculaire avait surpris, a du admettre qu'elle était tout à fait capable de marcher pendant sa carrière de cyclisme fauteuil. 

Interrogé par le magazine allemand Der Spiegel (article en anglais), un classificateur raconte la difficulté croissante de son métier. Certains athlètes peuvent ainsi tout à fait se retenir lors des tests, un peu comme un conducteur éméché soufflerait légèrement dans le ballon lors d'un contrôle de police. Des comportements qui obligent les contrôleurs à faire un travail proche de celui d'un détective. Malgré la rigueur des contrôles, il ne se fait guère d'illusion sur les possibilités de les contourner : "Quelqu'un qui veut vraiment simuler un handicap pourra le faire quoiqu'il arrive".

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