Ligue des champions : "J'ai été déshabillée deux fois devant mes adversaires"... Le parcours du combattant pour jouer au football de Tabitha Chawinga, la buteuse du PSG

Une détermination à toute épreuve. Battue par ses parents, déshabillée devant ses adversaires et harcelée sur les réseaux sociaux, Tabitha Chawinga a tout connu de l'humiliation. Pour une simple raison : elle voulait jouer au football.

La première Malawite à avoir foulé les pelouses européennes jouera sa première demi-finale de Ligue des champions avec le Paris Saint-Germain à Lyon, samedi 20 avril, pour sa première participation à la compétition. Un accomplissement qui vient récompenser la ténacité et le caractère de la joueuse de 27 ans, qui a dû commencer à jouer dans le dos de ses parents.

Frappée pour vouloir jouer

Née dans le nord du Malawi, pays coincé entre la Zambie, la Tanzanie et le Mozambique et comptant parmi les plus pauvres au monde, Tabitha Chawinga a été poussée à ne jamais s'engager dans cette voie presque exclusivement réservée aux hommes (les femmes étant plutôt poussées vers le netball, un dérivé du basket).

"Mes parents ne voulaient pas que je joue au foot. Ils estimaient que ce sport était destiné aux hommes et préféraient que je reste concentrée sur l'école", déclarait-elle dans une interview donnée à l'AFP, jeudi 18 avril.

"Chaque fois que je rentrais à la maison, je devais faire face à la loi sévère de mes parents. Ils me fouettaient si violemment. Bien sûr, je n’ai pas abandonné. J'ai dit à mes parents que le jour où ils arrêteraient de me battre serait le jour où j'arrêterais de jouer au football."

Tabitha Chawinga, attaquante du Paris Saint-Germain

au Guardian

Intégrée dans l'équipe des garçons de son école, l'actuelle meilleure buteuse de D1 Arkema (18 réalisations) a dû faire face aux moqueries et à la désapprobation de sa communauté, qui estimait que ses parents n'auraient pas dû la laisser jouer.

Aux moqueries se sont ajoutées des humiliations physiques traumatisantes. "J'ai été déshabillée deux fois devant mes adversaires, se remémore-t-elle dans The AfricaBrief, média malawite. Les joueurs des équipes adverses protestaient contre ma présence, pensant que j'étais trop forte pour être une fille. Il est difficile d'expliquer l'humiliation que j'ai ressentie."

Partie à 14 ans au DD Sunshine FC, dans la capitale Lilongwe, Chawinga quitte son pays avant même d'être majeure pour rejoindre la Suède et sa troisième division, avec un billet d'avion payé par le président du Sunshine.

En moins de 20 rencontres, elle marque 39 buts pour le petit club de Krokom et lui offre le titre. L'année suivante, elle grimpe d'une division en rejoignant Kvarnsvedens et termine la saison à 43 buts, avec un titre et une montée dans l'élite suédoise à la clé.

Meilleure buteuse et passeuse de D1

En parallèle de sa folle ascension, la Malawite continue de subir sur les réseaux sociaux des moqueries sur sa voix et son physique, considérés masculins. "J'ai été contrainte d'éviter les réseaux sociaux. J'ai une page Facebook, mais quelqu'un la gère pour moi. J'évite également les lieux publics. Je me demande ce qui se passe dans la tête de ceux qui intimident et harcèlent les autres", a-t-elle déploré.

Meilleure buteuse des premières divisions suédoise (2017), chinoise (2018 et 2019) et italienne (2023), Chawinga impressionne partout où elle passe et Paris, qu'elle a rejoint en prêt à l'été 2023 par son club de Wuhan, ne déroge pas à la règle.

Avec 18 buts en D1 Arkema, elle compte six unités d'avance sur la Ballon d'or 2018, Ada Hegerberg, dans la course au trophée de meilleure buteuse du championnat et fait partie des candidates très sérieuses au titre de meilleure joueuse de la saison.