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Le PSG respecte-t-il le fair play financier avec son nouveau sponsor ?

Après des mois de négociations avec divers candidats, le PSG a fait son choix. Son nouveau sponsor pour la saison 2018/2019 sera ALL, le programme de fidélité du groupe hôtelier Accor. Si QSI fait indirectement partie du capital d'Accor Hotels, l'opération reste a priori dans les règles du fair-play financier.
Article rédigé par Guillaume Poisson
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 4 min
  (ANDREAS SOLARO / AFP)

Août 2018.  Les supporters du PSG sont sciés. Le PSG vient d'annoncer la fin de son contrat avec Fly Emirates. Le maillot bleu nuit du PSG n'arborera plus ce "Fly Emirates" qui caractérise le club depuis 2006. En juillet 2019, ce sera une autre marque, une autre image. Que s'est-il passé ? Nasser Al-Khelaïfi souhaitait 80 millions d'euros de la part de son sponsor. Pour la nouvelle dimension du club, pour le prestige... Mais surtout pour augmenter ses recettes en vue du fair-play financier. Sauf que Fly Emirates a été inflexible. Ce sera 25 millions. Ou rien du tout. Alors le PSG a décidé de tourner la page. La question arrive vite : qui pour succéder à la ligne aérienne des Emirats ?

Qatar Airways ? L'hypothèse est envisagée. Elle est même sérieusement considérée mais sera finalement écartée, car trop dangereuse du point de vue légal. Le règlement de l'UEFA stipule qu'un contrat de sponsoring ne peut être signé avec une "partie liée", c'est-à-dire que le propriétaire du club ne doit pas avoir d'influence dans la décision de l'entreprise au niveau du sponsoring. Or, Qatar Airways est entièrement détenu par QIA (Qatar Investment Authority), fond d'investissement de l'Emirat du Qatar et maison-mère de QSI (Qatar Sports Investment), eux-mêmes actionnaires majoritaires du club de la capitale. Le conflit d'intérêts leur pendait au nez. Alors, le PSG est passé à autre chose. Et c'est le groupe AccorHotels qui a été choisi, ce jeudi. Mais le problème n'est-il pas le même dans la mesure où AccorHotels est détenu à 10% par QIA ? 

Le Qatar est actionnaire du groupe AccorHotels : est-ce un problème ? 

D'abord, il faut comprendre  le but du fair-play financier en ce qui concerne le sponsoring. L'UEFA veut éviter qu'un propriétaire de club ne serve ses propres intérêts en choisissant un sponsor qu'il détient ou sur lequel il a une influence. En d'autres termes, il faut éviter le conflit d'intérêts. Dans le cas présent, QSI est à la fois actionnaire majoritaire du PSG et actionnaire minoritaire d'Accor Hotels Arena, par le biais de QIA. Cela pose-t-il problème ? "Non" répond Christophe Lepetit, économiste du sport. "Dans la mesure où QIA n'a pas de poids suffisant dans l'entreprise Accor Hotels, avec 10% d'actions détenues, pour influer sur les décisions". Interrogé sur ce point en conférence de presse, Sébastien Bazin a balayé cette éventualité : "Les décisions se prennent entre les membres de la direction chez AccorHotels. Je peux vous assurer nous n'avons jamais consulté les actionnaires pour ce contrat" La question se poserait peut-être plus facilement si QIA était actionnaire majoritaire du groupe Accor Hotels, ce qui est loin d'être le cas.  

Toujours est-il que le lien, même s'il est mineur, existe. Seuls le "conseil d'administration et fondateurs"(17,65%) et l'opérateur chinois Jin Jiang (12%) devancent QIA en termes de pouvoir au sein du groupe AccorHotels.  Lorsque l'UEFA tablera sur ce contrat à la fin de la saison 2018/2019, l'instance pourrait éventuellement considérer QIA comme une partie liée.

Un montant encore flou 

Dans ce cas, un deuxième critère entre en jeu : celui de la valeur du contrat. Combien le PSG va-t-il recevoir d'Accor ? Ce montant est-il conforme à la valeur du marché actuel ? Le PSG n'a pas encore communiqué officiellement sur le montant du contrat. Interrogé en conférence de presse, Nasser Al-Khelaïfi a éludé la question : "Les deux parties sont satisfaites. Le chiffre exact je ne vous le donnerai pas".

Quelques médias font écho d'un chiffre qui avoisinerait les 50 millions d'euros. Une telle somme, perçue tous les ans, situerait le PSG dans les eaux du Top 5 européen. General Motors donne par exemple 65 millions d'euros par an à Manchester United, le leader européen en termes de sponsoring. Chelsea touche 56 millions d'euros avec Hyundai. "Quand bien même l'UEFA estimerait que QIA est partie liée dans cet accord, ce qui paraît improbable, le montant du contrat me paraît trop conforme à la valeur du marché pour qu'il y ait décision défavorable." 

Sarkozy, Bazin, des proximités gênantes ? 

Nicolas Sarkozy siège au conseil d'administration d'Accor Hotels. Et l'ancien président fait partie de l'entourage proche de Nasser Al-Khelaïfi. Mais il ne figure à aucun moment dans l'organigramme du Paris Saint-Germain, ni en tant qu'actionnaire, ni en tant qu'administrateur. "Je comprends qu'on se pose la question. Il est probable que Nicolas Sarkozy ait facilité les négociations entre les deux entités. Mais on ne peut pas prouver ses liens avec le PSG" estime Christophe Lepetit.  Certes, les Football Leaks ont montré à quel point l'ancien président était proche de la présidence du club (Sarkozy aurait proposé aux Qataris le rachat du PSG et la création d’une chaîne de télévisions en France en échange de l'organisation du Mondial 2022 au Qatar). Mais ce lien n'est pas officiel. 

Sébastien Bazin est le PDG du groupe AccorHotels et...l'ancien président du Paris Saint-Germain (2009). Mais le constat est le même : il n'a pas de fonction officielle au sein du club parisien. "Encore une fois, insiste Christophe Lepetit, il serait étonnant que cette proximité n'ait pas aidé à la signature du contrat. Mais n'est-ce pas ce qui se passe généralement dans le monde des affaires ? Les contrats se font par les réseaux. Dans ce cas-là de toute façon, comme il n'y a pas de lien officiel a priori, il n'y a pas de conflit d'intérêt clair". Ce contrat de sponsoring prendra effet à partir de la saison prochaine, et sera donc examiné par l'UEFA à la fin de l'exercice 2019-2020. 

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