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Thiago Alcántara, métronome à l'espagnole

Au dessus du lot techniquement, à l’aise dans le jeu tactique, une capacité à casser les lignes et à se projeter vite vers l’avant… Thiago Alcántara avait toutes les qualités pour s’imposer dans l’effectif du grand Barça. Entre blessures et sursauts d’orgueil, l’enfant de la Masia a préféré l’exil bavarois plutôt que de jouer l’intermittent sur la pelouse du Camp Nou. Avant les retrouvailles ce mercredi, retour sur le parcours sinueux et l’émancipation tardive de Mazinho junior.
Article rédigé par Mathieu Aellen
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6min
Le joueur du Bayern Thiago Alcantara (CHRISTOF STACHE / AFP)

Certains joueurs rêvent toute leur vie de porter un jour le maillot d’un très grand club. À seulement 24 ans, Thiago Alcántara peut se vanter d’avoir eu sur ses épaules les tuniques du Barça et du Bayern, auquel on peut lui rajouter un palmarès déjà bien fourni : 4 titres de champion d’Espagne, 1 championnat d’Allemagne, 1 Coupe d’Espagne, 2 Mondial des Clubs et 2 Euros Espoirs conquis avec la sélection espagnole. Le fils de l’international brésilien Mazinho a tout d’un enfant gâté. Mais malgré les apparences, le petit protégé de Guardiola ne s’est pas rendu le chemin si facile que ça.

Plutôt samba que tarentelle

Brésilien d’origine et italien de naissance, c’est pourtant en Espagne que le jeune Thiago va faire ses gammes. Débarqué en Galice lorsque son père signe au Celta Vigo, il fait ses premiers pas sur le terrain du club d’Ureca à Nigran. C’est ici que Thiago Alcántara va forger son caractère et tirer profit de toutes les qualités de ses origines. À force de travail, il devient "un alliage entre la rigueur tactique italienne, le sens collectif espagnol et la technicité brésilienne" décrypte son tout premier entraîneur Javier Lago. Mais rapidement, le fils de Mazinho fait parler sa préférence pour la fibre de la samba paternelle plutôt que pour la tarentelle maternelle en régalant le championnat régional de gestes de grande classe et de buts décisifs.

Rapidement, le phénomène attise la convoitise de nombreux clubs du pays. Parmi eux, Valence, Villareal mais aussi le grand Real de Madrid. Finalement, c’est le Barça qui remportera le gros lot et fera rentrer le tout jeune Thiago à la Masia. À treize ans, Alcántara intègre l’un des meilleurs centre de formation du monde et c’est logiquement qu’il développe son talent en grimpant les échelons au fur et à mesure pour intégrer la réserve barcelonaise en 2007. Puis le 17 mai 2009, Pep Guardiola le lance dans le grand bain en le faisant rentrer lors de la 36ème journée de Liga face à Majorque. L’entraineur espagnol ne tarit d’ailleurs pas d’éloge sur son jeune poulain : "C'est un joueur merveilleux, très bon en un-contre-un. Parfois, il vous sort des gestes qui vous font dire "wouah". Il a quelque chose de spécial".

Pourtant, l’arrivée de Tito Vilanova sur le banc du Barça, conjugué à plusieurs passages à l’infirmerie, le fera glisser peu à peu sur la touche. La faute à une absence de turn-over et à un système en 4-3-3 pas forcément adapté à son jeu. "Thiago est un "jugadorazo" qui n'a pas sa place dans ce système, juge Javier Lago. Lui doit se trouver à la baguette, dans une position qui n'existe pas au Barça." À l’aise près de la surface, dangereux lorsqu’il joue haut, Thiago Alcántara évolue dans un style trop brésilien pour s’adapter à celui du Barça et devient prisonnier d’un système auquel Tito Vilanova ne veut pas toucher.

"J’aurais pu aller n’importe où pour ne pas finir sur le banc du Barça"

Eté 2013. Remplaçant au Barça, Thiago Alcántara souhaite partir. N’importe où, tant qu’il accède à un temps de jeu plus conséquent que les bribes de match que lui accorde Tito Vilanova. Manchester United et le rival madrilène sont déjà sur le coup. Mais Pep Guardiola, fraichement nommé entraineur du Bayern Munich, en fait rapidement sa priorité numéro un. "Thiago est le seul joueur que je veux. Ce sera lui ou personne. Nous avons beaucoup de joueurs, mais je pense que nous avons besoin des qualités spéciales de Thiago. C'est mon opinion, mais j'écouterai le board. S'ils disent non, ça me va." Pour un peu plus de 24 millions d’euros, Thiago quitte son club formateur pour rejoindre le coach qui l’a lancé en équipe première au FC Barcelone.

Un choix qui étonne les supporters allemands, le Bayern possédant un effetctif déjà fourni au milieu de terrain avec Kroos, Muller, Götze, Schweinsteiger, Ribéry, Robben, Shaqiri, Javi Martínez ou encore Luiz Gustavo. Mais rapidement, Thiago Alcántara fait taire les critiques en multipliant les matchs de grande classe et les buts décisifs, notamment en janvier 2014 où il donne la victoire à son équipe dans le temps additionnel face à Stuttgart d'un retourné acrobatique exceptionnel.

Pion essentiel et maître à jouer au sein d’un dispositif tactique fait pour lui, Thiago Alcántara donne enfin toute la mesure des qualités que le monde du football lui prédisait. Pourtant, son physique fragile va encore une fois mettre un frein à sa progression. Victime d’une déchirure du ligament droit en mars 2014, il rechute en octobre alors qu’il venait tout juste de revenir sur les terrains.

La résurrection bavaroise

Alors que certains lui prédisent déjà un avenir comparable à celui d’Abou Diaby, le milieu de terrain espagnol travaille d’arrache-pied pour revenir au plus vite et à son meilleur niveau. De retour après plus d’un an d’absence face à Dortmund le 4 avril dernier, il profite de la confiance aveugle que lui accorde Pep Guardiola pour retrouver rapidement son rôle de meneur de jeu avancé dans le système de l’entraineur catalan. Buteur lors des deux confrontations face à Porto en quart de finale de la Ligue des Champions, il a régalé lors du match retour en éclaboussant le match de son talent. Relanceur, dribbleur et omniprésent à la récupération, le milieu de terrain a étouffé les portugais pour mener son équipe au carton de ces quarts de finale (6-1).

De retour avec son mentor Guardiola ce mercredi dans l’antre qui l’a vu toucher ses premiers ballons, Thiago Alcántara aura à cœur de montrer qu’il méritait sûrement mieux qu’une place sur le banc lors de son passage à Barcelone.

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