Ligue des champions : Eduardo Camavinga, un coup de mou qui ne doit pas inquiéter
Vendredi dernier, stade de la Meinau à Strasbourg, l'entraîneur du Stade Rennais Julien Stéphan décide de remplacer Eduardo Camavinga à la mi-temps du match (1-1). Plus qu'une sanction, un signe que le Français n'est pas dans la période la plus faste de sa jeune carrière. Sa rencontre quelconque en Alsace suivait celles de Bordeaux (0-1) et Chelsea (1-2), toutes traversées sans l'éclat auquel Camavinga avait habitué tous les supporteurs bretons. Ce coup de moins bien, loin d'être encore inquiétant, s'explique par plusieurs raisons.
• Très haut, très vite
Les analyses de match sont logiquement plus exigeantes envers Eduardo Camavinga tant il a éclaboussé le Roazhon Park à chaque sortie depuis ses premières minutes en professionnel à seulement 16 ans et demi, en avril 2019. Depuis, le natif de l'Angola a passé les étapes les unes après les autres à vitesse grand V : première titularisation, premier match de Ligue Europa, premier match de Ligue des champions, première sélection. Ce début de saison 2020/2021 était justement parti sur les mêmes bases avec un Rennais encore plus décisif dans le dernier geste : une passe décisive et un but sur ses deux premières parties en Ligue 1. L'idée ici n'est pas de retracer le début de carrière du phénomène mais de tenter d'expliquer pourquoi les appréciations du numéro 10 rennais seront toujours plus sévères que celles de ses coéquipiers. Tout le monde en attend plus, logiquement, mais à seulement 18 ans (depuis le 10 novembre), il passait encore son permis il y a moins d'un mois.
"Je ne vais pas me chercher d'excuses, mais il y a eu une part physique et mentale, car beaucoup de choses sont allées très vite, et les adversaires m'ont un peu plus regardé après ma sélection", confirmait le jeune issu de Fougères, en Ille-et-Vilaine. Camavinga est logiquement ciblé par les équipes qui l'affrontent et il ne peut plus compter sur l'effet de surprise. Ce qui explique en partie ses performances en dents de scie.
• Une première sélection à digérer
La carrière d'Eduardo Camavinga a pris une nouvelle tournure en ce début de saison avec sa première sélection en équipe de France. Le milieu de terrain est devenu le plus jeune joueur à fêter sa première cape en équipe de France depuis 1914. Un mois plus tard, il y allait de son but dès sa première titularisation devenant, là encore, le plus jeune buteur en sélection française de l'après-guerre. Une ascension expresse, pour ne rien changer.
Cependant, il est nécessaire de rappeler que l'appel du sélectionneur Didier Deschamps a été précipité, en septembre, par le forfait de dernière minute de Paul Pogba, positif à la Covid-19. Sa deuxième sélection, en octobre, ne doit rien à personne mais un saut dans le grand bain, ça se digère. Cela oblige aussi à fouler la pelouse tous les trois jours dans une saison post-Covid déjà gargantuesque. L'enchaînement des rencontres pose un problème physique pour un gamin de tout juste 18 ans, pas encore complètement développé.
• Une première blessure à gérer
C'est aussi ce qui peut freiner une carrière : la gestion des blessures. Jusqu'à cette saison, Eduardo Camavinga y avait échappé. Seule une légère blessure musculaire l'avait privé d'un match l'année passée. Cette saison, le joueur formé au Stade Rennais a subi le premier vrai pépin physique depuis ses débuts en professionnels. Le joueur a souffert d'une béquille fin octobre contre Angers (1-2) qui s'est ensuite aggravée. "Au départ, c'est une béquille, une contusion, un coup qu'il prend, mais un coup plus violent qu'il l'imaginait, car il sentait une petite gêne mais pas au point de demander à sortir, et une béquille, ça saigne un peu, l'hématome s'est diffusé davantage", expliquait son entraîneur Julien Stéphan en conférence de presse.
Camavinga a finalement manqué quatre rencontres avec les Rouge et Noir avant de revenir au jeu. Ce retour, après une blessure, est également nouveau pour lui. Il faut gérer le repos, la réathlétisation puis recouvrer du rythme sur le terrain et des automatismes avec ses partenaires. Le gaucher est tellement primordial dans l'organisation rennaise que son retour à la compétition n'a pu se faire progressivement. Dès sa reprise contre Bordeaux le 20 novembre, il a joué l'intégralité du match avant d'être de nouveau titulaire quatre jours plus tard pour la réception de Chelsea en Ligue des champions. Le Breton n'a pas eu le temps de reprendre ses repères sur la pelouse avec trois titularisations en autant de rencontres. "On va dire que c'était un mal pour bien, relativisait-il pour sa première en conférence de presse avant Bordeaux. Ça m'a permis de souffler, de me recentrer sur l'essentiel et de revenir en forme." Si le milieu a joué 213 minutes sur 270 possibles, c'est qu'il est en effet physiquement prêt, le problème réside davantage dans le manque de rythme.
• Une agitation hors terrain
Eduardo Camavinga doit appréhender son changement de statut soudain depuis son avènement aux yeux du grand public lors de sa masterclass contre le PSG lors de la deuxième journée de la saison passée (victoire 2-1). Depuis, il a découvert le niveau international en sélection mais aussi la Ligue des champions. Son premier match contre Krasnodar (1-1) avait conquis les supporteurs rennais, toujours plus impressionnés par leur chouchou. Le joueur qui faisait lever les foules alors qu'il dormait encore au centre de formation accolé au Roazhon Park a bien grandi. "Je sors beaucoup moins, déjà. Quand je sors, je me cache un peu (sourire), la vie extrasportive a changé", rigolait le prodige devant la presse.
Cette vie extrasportive, c'est aussi des sollicitations à gérer et celles-ci sont nombreuses quand on est l'une des plus belles pépites des cinq grands championnats. Zinédine Zidane et le Real Madrid guettent depuis un moment l'évolution du Rennais. "Je vois, j'entends, ce sont des choses qui font plaisir, après je suis au Stade Rennais et les autres clubs, ce n'est pas pour maintenant". Camavinga est posé, réfléchi. Son entourage a également changé d'agent. Exit Moussa Sissoko, l'agent d'Ousmane Dembélé (Barcelone) ou Dan-Axel Zagadou (Borussia Dortmund), selon L'Equipe. Eduardo Camavinga est pour l'instant représenté par son père Celestino mais les agents les plus influents du moment se l'arrachent déjà. La décision de son futur représentant pourrait compter pour sa prochaine destination. Il est pour l'instant sous contrat jusqu'en 2022 et Rennes attend de sa pépite qu'elle retrouve tout son éclat dès ce mercredi soir.
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