Le Brexit, une autre mauvaise nouvelle pour le foot français?
Les règles changent. Et les clubs français vont devoir s'y faire. A partir du 1er janvier, les joueurs français, dont 32 évoluent en Premier League selonne pourra en effet plus recruter de mineurs étrangers, et les joueurs français auront besoin d'un permis de travail qui s'obtiendra via un système de points encore un peu flou certes, mais dont les grandes lignes ont déjà été tracées.
"En gros ce n'est pas une bonne nouvelle, mais en ce moment, il n'y a pas beaucoup de bonnes nouvelles pour le foot français", analyse-t-on à Première Ligue, le syndicat de clubs de L1. Le timing est effectivement délicat: les billetteries des clubs de l'Hexagone sont vides, comme ses stades, et le diffuseur Mediapro, incapable de payer la somme de 1,1 milliard d'euros promise en droits TV, vient de jeter l'éponge. "Ça va forcément impacter la manne financière générée entre la France et l'Angleterre, c'est donc dans ce cadre-là que ce n'est pas une bonne nouvelle", détaille le syndicat.
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Entre 2010 et 2019, selon l'Observatoire du Sport Business, les Anglais ont dépensé 1,25 milliard d'euros auprès des clubs français. Pour l'instant, il est encore impossible d'évaluer l'impact négatif pour les clubs français. "Après le Covid et Mediapro, c'est un peu la troisième couche sur la tartine, c'est vrai", résume Stéphane Canard, président du syndicat des agents sportifs (Snas).
Transferts de mineurs
"Ça va changer bien entendu. Rien que pour les mineurs, des transferts comme Jérémie Aliadière (recruté par Arsenal à 16 ans, ndlr) ou Paul Pogba (recruté par Manchester United à 17 ans, ndlr) , ce ne sera plus possible", explique l'agent de joueurs Christophe Hutteau. Selon l'accord signé entre la Fédération anglaise, la Premier League et la Championship (2e div. anglaise), seuls les joueurs ayant obtenu un minimum de points pourront se voir délivrer un permis de travail, le Governing Body Endorsment (GBE).
Des points glanés en fonction du championnat dans lequel le joueur évolue, son nombre de sélections internationales, son nombre de matches joués en Coupe d'Europe. Par exemple, un joueur comme N'Golo Kanté, qui, en 2015, évoluait à Caen, n'était pas international et ne disputait pas de Coupe d'Europe, n'aurait pas pu signer à Leicester avec ces nouvelles règles.
"Le problème, c'est que c'est encore peu lisible", explique Romain Poirot, ex-recruteur à Manchester United. "Mais les Anglais sont très pragmatiques et très forts pour ça, ils verront après le mercato cet hiver ce qu'il faudra ajuster, explique-t-il, leur but c'est d'asseoir la domination de la Premier League, le championnat majeur mondial".
"Si la Premier League veut un joueur, elle l'aura"
Car ce qui ne changera pas, c'est que les stars françaises comme Kylian Mbappé par exemple, n'auront aucun problème pour rejoindre la Premier League. "Pour les 'top players', ça ne changera rien. Mais même pour un bon joueur de L1, qui aura joué plus de 80% de matches en une saison, ça devrait passer", assure Christophe Hutteau. "De toute façon, si la Premier League veut un joueur, elle l'aura", assure-t-il, "pour moi ce n'est pas le cataclysme annoncé ou redouté."
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Les Anglais ont même prévu une commission chargée d'arbitrer les cas litigieux. En revanche, pour les joueurs sous les radars de la Premier League qui tentaient l'expérience en Championship (2e div. anglaise), "là ça va être clairement tendu", résume Christophe Hutteau. En 2019, onze Français avaient été recrutés par des clubs de la Championship selon le site transfermarkt. Si cette nouvelle donne sur les transferts va bousculer le football français, elle devrait aussi entraîner des changements en profondeur.
"Ça va forcer le foot français à imaginer un autre modèle, et c'est peut-être une opportunité. On va peut-être garder un peu plus longtemps nos jeunes joueurs, leur offrir des contrats de plus longue durée", nuance Première Ligue. L'exil de certains jeunes talents en Angleterre n'a pas tout le temps été couronné de succès, et certains intermédiaires ont parfois profité de l'attractivité de l'Eldorado anglais pour faire signer très tôt de jeunes talents qui n'ont jamais décollé. "Il faut faire attention aux analyses prédictives un peu hâtives. Il n'y aura pas forcément que des effets négatifs de ce Brexit", espère Stéphane Canard.
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