Cet article date de plus d'onze ans.

Le stage commando, la potion magique du sport français

Après les rugbymen, les nageurs, les volleyeurs ou les skieurs, les tennismen ont aussi enfilé le treillis. Francetv info revient sur ces préparations militaires qui vise à souder les troupes.

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
La nageuse Laure Manaudou lors d'un stage commando à Lorient (Morbihan), le 12 septembre 2011. (MAXPPP TEAMSHOOT)

Les meilleurs tennismen français avaient rendez-vous, mardi 18 décembre, dans un lieu tenu secret, près de Paris, avec le capitaine de l'équipe de Coupe Davis, Arnaud Clément, pour une après-midi avec le Raid. Pas question d'échanger quelques balles avec l'élite de la police française : il s'agit d'un stage façon commando de quelques heures pour souder les troupes. Une vieille recette du rugby qui s'étend aux autres sports, à consommer avec modération.

Quand les rugbymen tuent des lapins à mains nues 

Tout a commencé en 1999, quand l'équipe de France de rugby participe à un stage commando avec le GIGN, l'unité d'élite de la gendarmerie nationale. Avant la Coupe du monde, personne ne parie un centime sur les Bleus, qui ont manqué dans les grandes largeurs le Tournoi des six nations durant l'hiver. "C'était très dur", se souvient dans L'Express Jean-Claude Skrela, alors sélectionneur. Certains joueurs lui en veulent toujours.

Fabien Pelous, qui évoluait en deuxième ligne, se souvient que "mentalement, ça avait pété. Richard Dourthe [un des ouvreurs de l'équipe] avait pleuré." Le résultat dépasse toutes les espérances : les Bleus sont vice-champions du monde, après avoir éliminé la Nouvelle-Zélande en demi-finale lors d'un des plus beaux matchs de l'histoire de ce sport. Depuis, le stage commando est devenu l'alpha et l'oméga de la préparation au ballon ovale : les Bleus avant chaque Mondial – en 2007, durant leur stage, ils ont tué des lapins à mains nues – et de plus en plus d'équipes du Top 14 rampent dans la boue pendant l'intersaison.

L'important, c'est le mental

Mais n'allez pas croire que tous les participants de ces stages sont taillés comme Rambo, et rampent dans la boue, un couteau entre les dents. "Le plus intéressant dans ce genre de stage, ce n'est pas l'aspect physique, mais les réactions des participants, explique à francetv info Dominique Cortiula, directeur d'Atlantic-Challenges, qui propose des stages commandos encadrés par des anciens militaires. On a déjà eu plusieurs équipes de rugby dans des stages, et ce n'est pas celles qui étaient le mieux physiquement qui s'en sont le mieux sorties. D'ailleurs, l'équipe au mental le plus fort est en train de réussir une belle saison."

Les programmes de ces stages sont élaborés en fonction de ce que veulent les entraîneurs et en fonction du niveau des sportifs : lors de leur stage avec le GIGN, les rugbymen français avaient dû faire une descente en rappel de 120 mètres. "J'ai vu une fois un joueur reculer devant un obstacle, se souvient Magali Bardou, coprésidente du club de rugby à XIII de Carcassonne, qui effectue depuis deux ans des stages commandos. Sur l'exercice du saut de puce, où il faut sauter sur des plateaux de plus en plus haut, il a eu peur de se briser les jambes, et a reculé devant l'obstacle." 



Le nec plus ultra, c'est de faire mariner les sportifs durant 36 heures avec une nourriture militaire, des activités physiques et un minimum de sommeil pour découvrir la vraie personnalité de chacun. "Ça permet de comprendre pourquoi certains champions craquent avant ou pendant une compétition", poursuit Dominique Cortiula. Chez Atlantic-Challenges, le bouquet final est la traversée d'un étang boueux pour accéder à une plateforme. "Pas par sadisme, mais parce qu'après, il faut impérativement que les participants aillent à la douche."

Autre possibilité : la méthode douce 

Attention : le stage commando ne doit pas être utilisé à toutes les sauces. Pour intégrer des nouveaux sportifs, mieux vaut préférer des stages plus classiques. L'équipe cycliste Saxo Bank a été la pionnière du stage commando, avant de passer à une méthode douce début 2012, en raison d'un gros renouvellement de l'effectif, rapporte Velonation (en anglais). Idem pour les volleyeurs de Narbonne. "On fait un stage avant chaque début de saison depuis vingt ans, pour que les joueurs apprennent à se connaître, explique à francetv info Michel Mandrou, le manager de l'équipe. Au programme : du rafting, des courses en montagne, du rappel, comme on le voit sur la vidéo.

"J'ai envisagé un temps d'effectuer une préparation de type militaire, poursuit Michel Mandrou. Mais où est la sécurité ? Si un joueur se flingue un genou en sautant d'une palissade de 3 mètres, sans câble de sécurité, et manque toute la saison ? Pour l'équipe de France de rugby, je comprends, il y a la notion de combat et il faut casser la routine sur une préparation très longue. Mais pour faire une descente en rappel sur 30 mètres, autant que ce soit dans nos montagnes que sur une façade d'immeuble du camp du GIGN." Ce que nuance Magali Bardou, de l'ASC Carcassonne : "Même des joueurs de tennis ou de volley peuvent gagner en mental en effectuant ces stages."

Moralité : le stage commando est à utiliser avec précaution. "Dans une entreprise, un stage commando, ça change du traditionnel paintball ou de la chasse au trésor ! Pour les sportifs, c'est la même chose", veut croire Fanny Mouzin, de Teambuilding-entreprise.com.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.