France-Biélorussie : le contribuable, premier supporter du Stade de France
Les Bleus de Didier Deschamps ne feront pas le plein de spectateurs contre la Biélorussie. Ni la FFF, ni le Stade de France ne paieront l'addition, mais l'Etat.
FOOT - Le Stade de France va sonner creux pour la rencontre opposant les Bleus à la Biélorussie, mardi 11 septembre à 21 heures. Les Bleus connaissent leur cinquième plus mauvaise affluence depuis 1998, la pire pour un match de compétition depuis 2004. Environ 50 000 billets (sur 80 000) ont trouvé preneur, la plupart à prix cassé. Et le manque à gagner sera compensé par l'Etat. Décryptage d'un mécanisme très avantageux pour le Stade de France... encore pour quelque temps.
L'Etat ne sera plus la poule aux œufs d'or
Le stade de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) et le consortium d'entreprises du BTP (Vinci et Bouygues) qui le gère s'appuient sur un contrat en béton qui court jusqu'en 2025 : au total, l'Etat a versé près de 300 millions d'euros au Stade de France. Une partie pour la construction de l'enceinte, et plus de 100 millions en pénalités, dues à l'absence de club résident. Tant que l'enceinte était bénéficiaire, le Trésor public se renflouait avec la taxe sur les spectacles et la TVA. Une époque révolue. Le Stade de France commence à accuser le poids des ans. Rares sont les artistes et les équipes capables de remplir les 80 000 places de l'enceinte. La fréquentation totale du stade est passée entre 2008 et 2011 de 1,9 à 1,5 million de spectateurs. D'après le magazine économique Capital, le SDF va perdre cette année 12 millions d'euros, que l'Etat compensera. Une somme supérieure au budget de la lutte antidopage, par exemple (PDF, p.89).
Un contrat en béton ? Plus depuis 2011. La légalité du contrat signé en 1995 par le premier ministre Edouard Balladur et le consortium a été contestée à de nombreuses reprises, jusqu'à ce que le Conseil constitutionnel l'abroge purement et simplement en 2011, le qualifiant de "contraire à la Constitution". L'accord entre les deux parties ne repose plus sur rien. Le gouvernement est en position de force pour renégocier. "Le contrat de concession est en coma dépassé", résumait en 2011 le député PS Henri Nayrou, lors du débat de la commission des finances de l'Assemblée sur le budget des Sports.
La FFF pieds et poings liés
Pourquoi, de son côté, la Fédération française de football (FFF) s'entête-t-elle à disputer des rencontres dans l'enceinte de Saint-Denis, sachant pertinemment que, pour la plupart des adversaires, elle ne fera pas le plein ? Parce qu'elle n'a pas le choix : elle loue le stade 5 millions d'euros par an, et doit rentabiliser l'investissement. Le Stade de France est cher, beaucoup plus cher que n'importe quel stade de Ligue 1, mais la FFF s'est engagée, dès l'inauguration du stade, à y disputer la plupart des rencontres de l'équipe de France.
Et même après avoir obtenu ce "tarif préférentiel" et un intéressement sur la billetterie en 2010, ça ne convient toujours pas. Aujourd'hui, l'équipe de France n'arrive pas assez souvent à remplir le SDF. Des enceintes plus petites lui permettraient d'avoir un stade plein, un coût moins élevé et plus de bénéfices. Sauf qu'il faut amortir le loyer ! "Si je pouvais délocaliser les matchs, je le ferais. Sauf qu'on paye le Stade de France, même si on n'y joue pas", explique Noël Le Graët, président de la FFF, dans le JDD. Résultat, les Bleus jouent chaque année bien plus que les trois matchs prévus par contrat au Stade de France pour mettre du beurre dans les épinards de la Fédération, qui touche une partie des recettes des matchs. Pour le moment.
"Quand ce sont des affiches qui n'attirent que 40 ou 50 000 spectateurs, ce n'est bien pour personne, le Stade de France perd de l'argent et on n'en gagne pas", peste Noël Le Graët sur le site de L'Equipe. Ce qui sera le cas de l'affiche face à la Biélorussie. Et ce sera sans doute le cas aussi après le Mondial 2014, quand les Bleus seront condamnés à disputer deux ans de matchs amicaux, à cause de leur statut d'équipe hôte de l'Euro 2016. Face au risque d'un Stade de France sonnant creux, la fédération voudrait délocaliser un maximum de rencontres, et renégocier la convention.
L'équation s'annonce donc compliquée pour le Stade de France : la Fédération française de foot veut un rabais, l'Etat ne veut plus boucher les trous et la fédération française de rugby, qui s'était engagée elle aussi à jouer certains matchs au SDF, entend bien construire son grand stade, à Evry (Essonne), pour 2017.
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