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Qui est Evian Thonon Gaillard, finaliste surprise de la Coupe de France ?

L'adversaire de Bordeaux a changé de nom, de stade, de maillot, de patron, de supporters et de ville en trois ans. Sans que rien ne soit fixé. 

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Le défenseur danois d'Evian Daniel Wass reprend la balle de façon acrobatique, lors du match opposant son équipe au PSG, le 8 décembre 2012 au Parc des Princes.  (KENZO TRIBOUILLARD / AFP)

L'affiche de la finale de la Coupe de France vendredi 31 mai oppose Evian Thonon Gaillard à Bordeaux. Bordeaux, les observateurs du foot français connaissent : le maillot au scapulaire, les internationaux Cédric Carrasso et Benoît Trémoulinas, l'humour à froid de Francis Gillot, l'entraîneur. En revanche, bien malin celui qui saura en dire plus sur Evian Thonon Gaillard... Faites connaissance avec un club vraiment pas comme les autres.

Evian, Thonon, Gaillard ou rien à voir ?

A moins d'être incollable sur la géographie de la Haute-Savoie, l'histoire du club est un rien complexe. Son nom alambiqué - officiellement, c'est l'ETGFC - découle d'une cascade de fusions de clubs de la région. En forçant un peu le trait, il aurait pu s'appeler l'Evian Thonon Gaillard Croix de Savoie Chablais.

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"Quand je suis allé pour la première fois supporter le club, c'était dans les années 90. A l'époque, le club s'appelait Gaillard et évoluait en division d'honneur régionale", se souvient Frédéric, qui gère le site Croix de Savoie Fans. Croix de Savoie, comme l'ancien nom du club, qui a toujours les faveurs des supporters. Dans les tribunes, on encourage Croix de Savoie, pas l'ETG. 

"Je suis nostalgique du nom Croix de Savoie. C'est le nom qui rassemble tous les Savoyards. Les couleurs rouges et blanches. C'est notre région, c'est notre histoire", estime, un rien lyrique, Grégory Mutin, qui gère le groupe de supporters Brigada 74. Aujourd'hui, le nom d'Evian Thonon Gaillard est bien souvent réduit à Evian dans les médias, qui vont y faire leurs micro-trottoirs, comme après la qualification contre le PSG en quarts de finale.

Manque de chance : le nom d'Evian représente la marque d'eau minérale du propriétaire du club, Franck Riboud, patron de Danone, mais pas le club en lui-même, qui n'a aucune attache géographique dans la ville. "L'ETG est quand même un cas unique en France  où les gens n'appellent pas leur club de la même façon, s'amuse Yannick Bouvard, qui tient le blog indépendant ETGblog.com. Il y a des supporters à qui il ne faut surtout pas parler d''Evian'. Mais l'identité du club n'est pas encore posée."

Cela fait aussi sourire l'adjoint aux sports de la ville Evian dans L'Equipe : "Des touristes, surtout asiatiques et russes, très nombreux chez nous, veulent voir jouer Evian, et il faut leur dire qu'Evian est une marque dont l'équipe évolue à Annecy !"

L'équipe joue à domicile... à une heure de voiture du siège

C'est pour le moment le vieillot Parc des Sports d'Annecy qui accueille les exploits du club : l'ETG a franchi trois divisions en trois ans, avant de finir 9e en L1 l'année dernière. Mais il s'agit d'un stade entouré d'une piste d'athlétisme "qui fait qu'on voit les joueurs à 50 mètres", regrette Frédéric, du site Croix de Savoie Fans. "Le centre d'entraînement du club est à Thonon, ce qui fait que l'équipe met déjà une heure à se rendre à ses matchs à domicile", peste Grégory Mutin. Une heure de route aussi pour les supporters, qui doivent en plus payer le prix fort pour voir leur équipe : "30 euros la place en virage pour les matchs de gala, regrette Florian Faramaz, président des Red Fish, un groupe de supporters du club. Pourtant, c'est censé être une tribune populaire, non ?"

Les supporters d'Evian Thonon Gaillard, lors d'un match contre Bordeaux, le 11 août 2012. On voit bien la résistance des couleurs rouges et blanches historiques du club, ainsi que du nom "Croix de Savoie". (JEAN-PIERRE CLATOT / AFP)

Il est question d'un nouveau stade, ou du réaménagement du Parc des Sports d'Annecy (sachant que le maire ne veut pas qu'on touche aux tribunes et à la piste d'athlétisme). La géographie particulière du département rend tout choix compliqué : rester à Annecy, c'est dépenser de l'argent pour un stade "qui ne sera jamais un stade de football". "Mais ce n'est pas comme si on refusait 5 000 personnes à chaque match non plus", remarque Florian Faramaz.

Reste une solution à Seynod, au sud du département, sur un site prévu au départ pour les JO d'Annecy, mais qui rencontre une vive hostilité des amoureux du club. "Le problème est qu'on n'a pas assez de recul, après seulement trois ans de professionnalisme, pour déterminer quelle est la bonne solution en fonction de l'endroit où habitent la majorité des supporters", analyse Yannick Bouvard.

Marketing 1 - monde des Bisounours 0

Le club a grandi très vite. Mais pas sur le modèle du PSG ou de Manchester City, avec un patron mécène qui déverse des millions chaque année sur le club. Danone n'est que simple sponsor du club, avec 3 millions d'euros annuels au titre du sponsoring. De l'extérieur, on ne voit pourtant que ça, avec le maillot du club calqué sur le design des packs d'eau minérale. "Dans notre groupe de supporters, il n'y a que deux ou trois personnes qui viennent au stade avec le maillot du club. C'est plus par amour de l'ETG que parce qu'on le trouve beau", note Grégory Mutin, des Brigada 74.

Elue "maillot le plus laid" par le blog Lucarne Opposée et L'Equipe Magazine, la tunique savoyarde est considérée comme un mal nécessaire par la plupart des fans. "On n'est pas dans le monde des Bisounours. Pour grandir, il faut des investissements, il faut que les propriétaires du club y trouvent leur avantage", constate Florian Faramaz, lui aussi chef d'entreprise. "Sans l'appui de Danone, on ne serait pas en L1", renchérit Frédéric.

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