Les Bleus et le sentiment du devoir accompli
Les nombreuses marseillaises et les chants bien connus de la Coupe du Monde ont longuement retentis hier dans les travées du Sstadede France. Les supporters tricolores, pas toujours habitués à s'enflammer ces dernières années face aux équipes venues avant tout dans l'Hexagone pour défendre, ont cette fois pu donner de la voix. Deux cartons, en Moldavie (4-1) puis face à l’Islande (4-0), huit buts, quatre par match, un statut de champions du monde assumé et une cohésion visible et communicative... Les Bleus se portent bien, que ce soit dans le jeu comme dans les ambitions. "On peut être fiers de ce qu'on a fait. Les joueurs ont pris énormément de plaisir, le public aussi", s’est réjoui Didier Deschamps. "On a eu le ballon comme c'était prévisible. On l'a plutôt très bien utilisé avec de bons enchaînements. On a mis la manière." Avant de revenir à l’essentiel, à savoir les "six points" en deux matches et la tête du groupe H.
Certes, la Moldavie (170e nation mondiale) et l’Islande (38e) sont loin du niveau des cadors que les Bleus seront amenés à croiser dans leur périple vers un troisième sacre européen l’an prochain. Mais ils ont su se rendre les choses faciles et se montrer emballants face à des adversaires avant tout soucieux de bien défendre, ce qui n'a pas toujours été le cas récemment. Les souvenirs des matches nul face à la Biélorussie (0-0) ou le Luxembourg (0-0) lors des qualifications pour la Coupe du Monde 2018, de la victoire étriquée contre l’Australie au Mondial (2-1) ou du match amical face à ces mêmes Islandais il y a quelques mois (2-2), où il avait fallu une entrée fracassante de Kylian Mbappé pour voir la France remonter un retard de deux buts, étaient encore bien tenaces dans les têtes des supporters français. Cette fois, entre tricolores et Scandinaves, il n’y a pas eu photo.
Un but précoce de Samuel Umtiti pour se mettre sur la voie, un pressing tout terrain pour maintenir sans cesse les Islandais sous pression, une possession de tous les instants sans pour autant se montrer stérile dans la zone de vérité… Au-delà du score fleuve, c’est dans le jeu et sa capacité avec le ballon à trouver les clés face à cette équipe regroupée que l’équipe de France a impressionné hier soir. Paul Pogba a confirmé son statut de métronome aux côtés du toujours précieux N'Golo Kanté, les latéraux se sont montrés disponibles pour étirer le bloc islandais et efficaces offensivement - à l'image de la passe décisive de Benjamin Pavard sur le but de Giroud -, Antoine Griezmann continue de s’épanouir dans ce rôle d'électron libre et les finisseurs ont répondu présents, Kylian Mbappé (1 but, 2 passes décisives) et Olivier Giroud (1 but) étant à l'origine de la grande majorité des occasions françaises. Si tout n'a pas été parfait, Didier Deschamps confiait lui-même qu'il était "difficile de trouver des points négatifs." Car plus que la France qui gagne, les Bleus ont cette fois su s'imposer en mettant la manière, de la vie et de l'envie, pour ce qui reste probablement l’un des matches les plus aboutis depuis leur sacre mondial.
Ossature et osmose
Une impression de supériorité avant tout collective, comme l’a rappelé le capitaine Hugo Lloris après le match. "Les mots du sélectionneur ont été importants et on a appliqué à la lettre ses attentes : beaucoup de concentration, beaucoup de sérieux, beaucoup d'application et ça s'est vu pendant ces deux matches", analysait le gardien des Bleus. "On a cette faculté à pouvoir créer du danger à tous les niveaux. Les joueurs cherchent la simplicité, l'efficacité, ils ne font pas des beaux gestes pour amuser la galerie, mais avant tout pour servir le collectif." Le collectif, maître mot d'un Didier Deschamps qui n'en finit plus de répéter aux éternels insatisfaits qu'une sélection se construit avant tout au travers d'une osmose de groupe plus que par une addition d'individualités. Le onze qui a émergé pendant la Coupe du Monde n'a pas bougé, le groupe des 23 à peine plus (seuls Tanguy Ndombele, Ferland Mendy et Alessane Pléa ont fait leur première apparition dans le groupe France depuis juillet dernier) et ce sont les hommes de base du Mondial - Layvin Kurzawa mis à part - qui ont entamé ces deux premiers matches de qualifications.
Une ossature intacte et, forcément, des automatismes et des schémas préférentiels qui se dégagent au fur et à mesure des matches. "On essaie à chaque fois de trouver le décalage, on est en confiance donc ça aide beaucoup à tenter des passes plus difficiles. On est sur le bon chemin", confiait Antoine Griezmann, chef de file d’un trio d’attaque qui a su se montrer complémentaire hier soir, l'une des grandes satisfactions de Didier Deschamps. "Il y a de la fluidité, de la cohérence, des affinités techniques, de la complémentarité aussi. Ça n’a pas été toujours le cas mais a force de répéter, ils se trouvent de mieux en mieux." Si l’attaquant de l’Atlético n’avait plus rien à démontrer de sa complicité avec Olivier Giroud, ce match face à l'Islande a permis d’entrevoir celle naissante entre Griezmann et Kylian Mbappé. Une relation encore balbutiante mais qui commence doucement à émerger, à l'image de la seconde période où chacun a offert une passe décisive à l’autre. "Je l'ai dit dès le début quand vous (les médias) avez sorti qu'on ne se trouvait pas assez : c'est parce qu'on n'avait pas joué assez de matches ensemble. Plus les matches vont avancer et plus on va se trouver, mieux on va se comprendre. Avec le temps ça ira mieux", rappelait le N°7 des Bleus après le match.
Des certitudes collectives et des promesses qui permettent aux Bleus de trôner en tête du groupe H après deux journées. Si le conservatisme de Didier Deschamps semble avoir de beaux jours devant lui après ce mois de mars "très positif" selon les mots du sélectionneur, ce dernier n’a pas tardé à tempérer les ardeurs des plus pressés. "Il ne faut pas penser que ça y est, on est qualifié. Le prochain match, chez nos amis turcs, ça va être chaud bouillant." Un déplacement dans la ferveur turque début juin qui permettra de jauger un peu plus l'évolution de cette équipe de France post-mondial.
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