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Affaire Joey Barton : Twitter et Facebook, une arme à double tranchant pour les sportifs

Le milieu de l'OM est critiqué de toutes parts pour un tweet comparant le défenseur du PSG Thiago Silva à un "transsexuel en surpoids". Pourtant, Barton était considéré comme un as des réseaux sociaux...

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Le joueur anglais de l'OM Joey Barton, célèbre pour ses invectives sur Twitter, le 15 mars 2013 à Marseille (Bouches-du-Rhône). (KARINE VILLALONGA / SIPA)

"On critique les footballeurs aux discours aseptisés mais on n'accepte pas un gars qui se sent libre de dire des conneries. Faudrait savoir !", s'indigne l'ancien international Vikash Dhorasoo sur Twitter. Joey Barton, le milieu de l'OM, était une star du site de microblogging pour son franc-parler et sa répartie. Mais en traitant le joueur du PSG Thiago Silva de "transsexuel en surpoids", il a franchi la ligne jaune. Le PSG a menacé de porter plainte, le club phocéen s'est excusé, le Conseil national de l'éthique a été saisi de l'affaire et Barton a décroché la une de L'Equipe avec ce titre vengeur : "C'est ça l'humour british ?" 

Barton, "un modèle dans son genre"

Le directeur de la communication de l'OM, Luc Laboz, explique dans L'Equipe que l'Anglais a retenu la leçon : "Il m'a expliqué qu'il y avait une différence entre la France et l'Angleterre, où il n'est pas rare que les joueurs se chambrent sur les réseaux sociaux. Il s'est engagé à ne pas recommencer." Le mal n'est-il pas déjà fait ? Barton, 2 millions de followers au compteur, a plus d'impact sur Twitter que l'ensemble des clubs de L1. Le règlement intérieur de l'OM n'a pas prévu de sanctionner les dérapages sur les réseaux sociaux. "Les clubs sont encore en retard sur cette question, explique à francetv info Stijn Jacobs, directeur digital chez Sportlabgroup, qui gère plusieurs comptes de sportifs. Rien dans le contrat de Barton ne l'empêche de tweeter ce qu'il veut. "

"Il ne faut pas oublier que Barton est en fin de carrière, analyse Stijn Jacobs. Avec sa posture de bad boy, son humour, les nombreuses interactions, il a parfaitement compris la puissance des réseaux sociaux et s'en sert pour bâtir son après-carrière. On pourrait imaginer qu'il devienne journaliste ou chroniqueur, les textes qu'il écrit sur son site ne sont pas mal du tout. Toute sa communication est mûrie, réfléchie. C'est un modèle dans son genre." 

Frank Hocquemillier, directeur de l'agence VIP-Consulting, qui gère l'image de nombreux sportifs, n'est pas du même avis : "J'avais une bonne image de Joey Barton, provocateur à la Cantona, le mec bagarreur et tendre à la fois. Après ce qu'il a écrit, il pourra bien s'excuser, son image qu'il a mis des années à construire s'est détruite en un tweet", explique-t-il à francetv info. Il a été injurieux, incorrect. On n'est plus dans l'affirmation d'une personnalité, ce que les sponsors et les passionnés recherchent sur les réseaux sociaux. Il y a un minimum de codes quand même." 

Des tweets validés par plusieurs personnes

Car sur Twitter et Facebook, il y a deux sortes de sportifs : ceux dont les comptes sont gérés par un community manager et les autres, souvent plus spontanés, mais souvent aussi rédigés en langage SMS. "Internet n'est plus seulement un vaste terrain de jeu et d'échanges. Les enjeux sportifs, marketing et médiatiques sont trop importants pour laisser certains sportifs aux manettes de ces outils de communication", veut croire Sylvain Caillot, de l'agence Interactive One, qui gère les comptes de Tony Parker ou d'Amélie Mauresmo. On se souvient du tollé provoqué par la sortie de Laure Manaudou sur l'affaire Merah. Elle avait affirmé sur Twitter que les jeux vidéo étaient responsables de la tuerie de Toulouse, avant de devoir fermer son compte. "Il y a encore de la place pour une certaine transparence et surtout une relation directe avec les fans", nuance Sylvain Caillot pour francetv info. Souvent, le joueur envoie un SMS pour donner sa réaction à son community manager à la fin des matchs.

Avoir de l'aide pour communiquer avec ses fans n'est pas une sinécure. L'international français Raphaël Varane a dû s'excuser auprès de ses abonnés après une erreur de géographie. Le community manager du défenseur du Real Madrid avait placé Bilbao en Catalogne, sujet sensible en Espagne. Désormais, chaque tweet du jeune international est validé par plusieurs personnes.

Même aux Etats-Unis, tout n'est pas si lisse

Pour ces professionnels de la communication, les Etats-Unis préfigurent ce qui va se passer en France. Les plus grands sportifs comme Maria Sharapova - 2 millions de fans sur Facebook, 171 000 sur Twitter - ou Usain Bolt sont gérés par des professionnels. Beaucoup de contrats de sponsoring réclament une présence sur Twitter et Facebook pour faire la promotion des produits. Si on reconnaît la patte des sportifs, le discours est calibré de manière à ne fâcher personne.

Reste que les polémiques sous la ceinture marchent aussi outre-Atlantique. La notoriété du joueur de foot américain des Packers de Green Bay T.J. Lang a explosé quand il a ouvertement critiqué les arbitres, après un match perdu par son équipe :  "On s'est fait enc... par l'arbitre. Merci la NFL [le championnat nord-américain de foot US]. Va te faire enc..., la NFL, mets-moi une amende, mais sers-t'en pour payer des arbitres corrects." 

La diatribe de Lang est entrée dans le top 10 des tweets les plus partagés de tous les temps, rapporte le blog spécialisé Shutdown Corner (en anglais). Ce qui l'encourage à continuer. Sur son compte Twitter, T.J Lang annonce la couleur, jeudi 4 avril : "Combien d'âmes sensibles vais-je pouvoir offenser aujourd'hui ?"

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