L'esport de retour en ligne pour résister au coronavirus
Le monde du sport à l’arrêt, l’esport continue d’avancer. Face à la crise du Covid-19, les organisateurs des principales compétitions ont décidé de passer ces affrontements, généralement en public dans des arènes, en ligne. Le championnat européen de League of Legends reprend donc ce vendredi soir, après seulement une semaine d’arrêt, alors que la très attendue Pro League de Counter-Strike : Global Offensive a débuté lundi. Mais si la compétition continue, ce changement de cadre peut rebattre les cartes.
Des compétitions essentiellement physiques
Cela peut sembler évident. Rien n’oblige des compétitions de jeux vidéo à se tenir dans un lieu physique. Mais les “LAN”, pour Local Architecture Network en référence au réseau local utilisé par les ordinateurs pour se connecter entre eux sur un même lieu, font partie de l’ADN de l’esport depuis ses débuts. La volonté de rencontrer ses adversaires, ses coéquipiers a mené à la création des premiers tournois physiques et les “LAN” restent très importantes dans le milieu amateur et semi-professionnel. Et au plus haut niveau, rares sont les compétitions majeures à ne pas se dérouler “en LAN”. La présence de la foule, les réactions des joueurs en temps réel, font partie des éléments essentiels pour une compétition réussie.
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Mais l’esport n’a pas de raison d’être épargné par la crise sanitaire actuelle. Après quelques huis clos, les organisateurs se sont rendus à l’évidence et ont basculé certaines compétitions en ligne. Quitte à poser des questions d’équité esportive. En effet, tous les joueurs ne sont pas égaux face au réseau internet de leur pays ou de leur ville de résidence. La latence (le temps de réponse entre, par exemple, le clic de la souris et le déclenchement de l’action à l’écran, ndlr) peut varier. De façon anecdotique pour un joueur amateur, pas pour un joueur professionnel où des affrontements se décident à la milliseconde près.
Des rapports de force modifiés
Outre cet impact matériel, que les différentes équipes et organisateurs travaillent à limiter, le passage des compétitions en ligne va forcément affecter les joueurs. Counter-Strike : Global Offensive, un des jeux majeurs de l’esport, est un bon exemple. Les meilleures équipes mondiales ne disputent quasiment plus que des tournois en LAN, à l’exception de quelques qualifications et des compétitions mineures. Un bouleversement des habitudes pour les joueurs habitués à évoluer en compétition à côté de leurs coéquipiers et avec leur coach derrière eux. Et qui a tendance à gommer les écarts de niveau.
“Sur internet, tout le monde peut se qualifier, explique Rémy "XTQZZZ" Quoniam, entraîneur de l’équipe française Vitality, dans une interview pour 1pv. Cela ouvre des portes. Sur internet, cela court plus vite. Ça y va. Ce n’est pas la même chose. Des styles de jeu vont correspondre plus à internet qu’en LAN.” L’absence de public, de caméras peut libérer certains joueurs et certaines équipes. “Il y a une part d’émotion qui est moins importante sur internet qu’en LAN, poursuit Rémy Quoniam. Quand tu as un jeu extrêmement débridé, c’est beaucoup plus facile de l'exprimer sur internet qu’en tournoi. Il y a plus de liberté, moins d’hésitation.”
Natus Vincere, la formation russe où évolue l’un des deux meilleurs joueurs du monde Oleksandr “S1mple” Kostyliev, en a fait les frais. Seulement quelques semaines après une démonstration au prestigieux tournoi de Katowice, qui avait dû se disputer à huis clos, ils ont été sèchement battus par les Danois de North et les Allemands de Big pour leurs deux premiers matches de Pro League. Avant ces deux revers, "Na'Vi" n'avait plus disputé de rencontre en ligne depuis fin 2018. De son côté, Vitality a dû rapatrier ses joueurs du Stade de France, où se situe le centre d’entraînement de l’équipe, à leurs domiciles respectifs après la fermeture express de l’enceinte. Pas forcément la meilleure préparation avant le début de la compétition.
League of Legends déjà de retour
Sur League of Legends, autre jeu majeur de l’esport, le rassemblement géographique des équipes facilite le passage en ligne de la compétition dès ce vendredi. Neuf des dix équipes engagées dans le LEC sont toujours dans leurs camps de base à Berlin, où se disputait chaque semaine, en studio et en public, le segment de printemps de ce championnat européen. “La latence de nos serveurs de compétition va être basse et à peu près égale entre les équipes, assurant l’équité de la compétition”, explique l’organisateur Riot dans un communiqué. “Pour limiter les risques sanitaires, il a été décidé de ne pas envoyer d’arbitre dans les locaux de chaque équipe, précise également l’entreprise. Nous allons mettre en place des moyens de contrôle à distance, avec des caméras supplémentaires dans les salles où les joueurs vont jouer, un contrôle complet des communications vocales, un enregistrement des écrans et d’autres mesures encore à l’étude.”
De nombreux arrangements temporaires qui permettent à l’esport d’être aujourd’hui la seule discipline à proposer ses compétitions de haut niveau, malgré la crise sanitaire. Un luxe à côté du sport traditionnel, contraint à l’arrêt complet.
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