Dopage : le Sénat américain adopte le Rodchenkov Act, l'AMA s'inquiète
Le Rodchenkov Act, adopté ce lundi par le Sénat américain, prévoit de permettre à la justice des Etats-Unis de poursuivre et d'infliger des peines de prison pouvant aller jusqu'à dix ans et des amendes pouvant s'élever à un million de dollars à toutes les personnes, quelle que soit leur nationalité, impliquées dans un système international de dopage. Sont surtout ciblés les entourages des athlètes - entraîneurs, agents, managers, officiels - plus que les athlètes eux-mêmes, lesquels peuvent déjà être sanctionnés par l'AMA.
Le Rodchenkov Act, du nom de l'ancien directeur du laboratoire antidopage de Moscou à l'origine des révélations sur le dopage organisé en Russie et réfugié aux États-Unis, avait été validé dans un premier temps par la Chambre des Représentants en octobre 2019. Adoptée par le Sénat, rassemblant à l'unisson sur ce terrain Républicains et Démocrates, cette loi, présentée comme une réponse aux réactions jugées insuffisantes de l'AMA et du Comité international olympique (CIO) pour sanctionner la Russie pour sa politique frauduleuse en la matière entre 2011 et 2015, n'attend plus que la signature du président américain Donald Trump pour entrer en vigueur.
Une nouvelle accueillie avec satisfaction par l'agence antidopage américaine (Usada), ardent défenseur de cette loi. "C'est une journée monumentale dans la lutte pour le sport propre dans le monde. Nous avons hâte de voir la loi bientôt contribuer à changer le jeu pour les athlètes propre (...) Elle fournira les outils nécessaires pour les protéger et tenir pour responsables tous les conspirateurs de dopage à l'échelle internationale", a réagi le directeur exécutif de l'Usada, Travis Tygart. "La loi protège également de représailles les lanceurs d'alerte et informateurs, et prévoit un dédommagement pour les athlètes victimes de complots de dopage", a-t-il également tenu à rappeler dans un communiqué.
Sujet de discorde entre l'Usada et l'AMA
Le Rodchenkov Act est devenu une pomme de discorde entre l'Usada et l'AMA, qui a vainement tenté de s'y opposer, craignant qu'il ne puisse saper sa capacité à accomplir sa mission de régulateur global de l'antidopage. "L'AMA, ainsi qu'un certain nombre de gouvernements et d'organisations sportives, a des préoccupations légitimes au sujet du Rodchenkov Act. Cela peut conduire à des lois qui se chevauchent dans différentes juridictions, compromettant le fait d'avoir un seul ensemble de règles pour tous les athlètes du monde entier", a commenté un porte-parole de l'instance auprès de l'AFP.
Une deuxième conséquence involontaire évoquée par l'AMA est que cette loi pourrait dissuader "des lanceurs d'alerte d'agir en les exposant à de multiples juridictions. Cela va sérieusement compromettre notre capacité à mener des enquêtes". Le gendarme mondial du dopage craint également que la loi ne puisse encourager d'autres pays à créer leur propre juridiction extraterritoriale pour des raisons politiques. "Utilisées de façon détournée, elles pourraient discriminer des athlètes de certaines nationalités".
Enfin, "l'AMA souhaite également comprendre pourquoi cette loi exclut de vastes domaines du sport américain, en particulier les ligues professionnelles et tous les sports universitaires". "Si ce n'est pas assez bon pour les sports américains, pourquoi est-ce bien pour le reste du monde?", interpelle-t-elle.
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