Deschamps a eu tout bon
Ses valises étaient prêtes. Deschamps n’avait pas l’intention de quitter le navire tricolore avant l’heure mais son départ était programmé en cas d’échec à une qualification pour le Mondial. C’était un contrat moral entre lui et la FFF. Entre lui et les Français. Il avait réussi partout où il était passé. De Monaco à Marseille en passant par la Juventus de Turin, le technicien était parti en laissant des titres et l'image d'un meneur d'homme, d'un gagneur. En deux ans de règne sur le banc tricolore, ce n’était plus aussi évident tant il a évolué sur des montagnes russes jusqu'au déraillement en Ukraine vendredi. A trop changer de systèmes et d'hommes, il semblait s'être perdu dans ses choix. Les derniers seraient les bons. "Cette équipe, c’était déjà une possibilité à l’aller, a avoué le sélectionneur après le match. Je l’ai décidé définitivement dimanche. On aurait peut-être été plus performant avec là-bas mais l’important c’était de l’être ce soir. Ce schéma nous permettait de rester équilibré face à cette équipe qui repart vite. Le milieu Cabaye-Pogba-Matuidi nous le permettait".
Soigner les maux bleus
Après avoir prôné "l'union sacrée", Deschamps avait mis en avant samedi les notions de "combat" et d'engagement, tout ce qui avait cruellement manqué à ses joueurs face aux solides Ukrainiens, invaincus depuis 12 rencontres. Mais n'était-il pas déjà trop tard ? Le piètre bilan statistique de l'année 2013, seulement rehaussé par une mi-temps au Belarus (4-2 le 10 septembre) et deux victoires sur de faibles Australiens (6-0, le 11 octobre) et Finlandais (3-0, le 15 octobre), n'incitait pas à l'optimisme et dressait plutôt le portrait d'une équipe incapable de se sublimer dans les grands moments. Après le match de Kiev, le sélectionneur avait tous les signes d'un homme abattu, incapable de galvaniser des joueurs qui allaient passer à côté de leur rêve. L’histoire de Deschamps prouve qu’il ne renonce jamais. En quatre jours, il a remis son équipe à l’endroit, soignant les maux bleus par la parole. "C’est entre eux et moi. C’est ma fonction de sélectionneur. Samedi, ça a été difficile. Le lendemain, on doit être dans l’analyse et le constat. Il ne fallait pas se cacher. Dimanche, c’était encore entre les deux. On a vraiment basculé lundi pour se préparer pour ce grand moment".
"Ils ont été grands"
Pour ce match retour, celui de la dernière chance ou du chaos, il nous promettait la folie et beaucoup de changement. Dès lundi, lors du dernier entraînement au Stade de France, il avait dessiné le contour d’une équipe fortement remaniée. "DD" avait décidé de changer toute sa colonne vertébrale avec Varane, Sakho, Cabaye et Benzema. Si on ajoute Valbuena, ça faisait cinq joueurs sur onze. Presque une révolution. Oser de tout chambouler en quatre jours, il fallait le faire. Mais la France est faite de contrastes et parfois d’incohérences. "On a été performant dans plusieurs systèmes. Tout dépend des ingrédients qu’on y met. La qualité, ils l’ont. On a du mal à maintenir cette qualité dans le temps, expliquait Deschamps après le match. Quand on le fait on est compétitif". Pendant quatre-vingt-dix minutes, les Bleus n’ont rien lâché. Supérieur sur le plan athlétique, ils ont écrasé les Ukrainiens. "Je n’avais pas de doute que les joueurs allaient répondre présent. Après il faut que ça tourne dans le bon sens. On ne sait jamais ce que ça peut donner. J’ai connu de grands moments comme entraîneur. Là c’est quelque chose de fabuleux, surtout après le match aller, d’avoir retourné cette situation. Le mérite en revient aux joueurs. Il fallait réussir deux grands matches. On a raté le premier, ils ont été grands ce soir".
Objectif 2016
Avec cette qualification pour la Coupe du monde au Brésil, Didier Deschamps peut voir loin. S’il a nié s’intéresser à son avenir à la tête des Bleus, y compris en cas de défaite, cette victoire le conduit jusqu’à l’Euro 2016 en France puisqu'il a été prolongé dès la fin du match. Sauf Knysna bis… "On ne va pas à la Coupe du monde sans objectif mais elle doit servir à préparer l’Euro 2016", a reconnu Deschamps. Lancé en l’air par ses joueurs à l’issue du match, Deschamps ne veut pas tirer la lumière sur lui. Les honneurs du terrain, c’était en 1998. "Je suis fier d’eux. C’est leur histoire. Ils l’ont écrite ensemble pour aller au Brésil". Un beau chapitre avec du suspense et des mots forts. Celui qui revient le plus ? Gagner évidemment.
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