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Depuis Marseille, les deux apnéistes Morgan Bourc'his et Arnaud Jerald plongés hors de l'eau

Loin des grandes profondeurs dans lesquelles ils se sentent si bien, les apnéistes Morgan Bourc'his et Arnaud Jerald prennent leur mal en patience durant le confinement. Loin du monde du silence, ils s'entretiennent, se replongent dans leurs sensations passées pour mieux appréhender leur prochain retour dans l'eau.
Article rédigé par Marie-Christelle Maury
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 4min
 

Il y a chez les apnéistes, cette forme de sagesse, de respect devant l’Elément… et les événements ! "Ce temps nous est donné, autant le prendre." Face au confinement, Morgan Bourc’his , triple champion du monde d’apnée (poids constant sans palme), oscille entre résignation et zénitude. Un peu de recul mais pas seulement : "J’ai changé mes habitudes, j’ai un peu mis mes acquis de côté. Si l’individu en général se transforme un peu avec cette épreuve, ça sera déjà bien."

Avec son accent chantant, Arnaud Jerald est lui, plutôt content du confinement. "J’arrive à bien l’exploiter. Le confinement du moment, c’est un peu le même que celui que nous vivons, en apnée, sous l’eau. On a le sentiment de ne pas faire tout ce que l’on veut, on est tout seul et on apprend sur soi. Lorsque l’on sort de l’eau, on voit tout ce monde sur le bateau, il faut respirer et reprendre ses esprits. Je pense que l’on aura la même impression avec le déconfinement."

Du haut de ses 24 ans, Arnaud possède la lucidité des grands. Un record du monde en apnée bi-palme il y a deux ans, rien à voir avec un début de saison, pour l’instant, en manque d’horizon. "Je devrais être, en ce moment, aux Bahamas pour préparer le Vertical Blue, mais je suis à Marseille chez mes parents. C’est super d’être ensemble. Je pars 5 mois sur 12 en compétition au bout du monde. Je ne les vois pas beaucoup, alors je profite." De son côté, Morgan Bourch’tis a vu son début d’année, lui aussi, bien bouleversé : "Là, je devrais rentrer d’Egypte après un stage d’apnée croisière. Bien sûr il n’a pas eu lieu. Toutes mes interventions, mes conférences, mes stages ont été annulés."

La mer, ces deux Marseillais, la voient… mais de loin.  Le monde du silence résonne, pour l’instant, d’un silence assourdissant. Mais impossible d’oublier les contraintes d’une telle passion. L’apnée, même loin de l’eau, mérite toutes les attentions, un entrainement aujourd’hui, différent. "Une sorte d’entretien physique. Des exercices basés sur le poids du corps avec de petits équipements, ce que j’ai sous la main." Voilà pour Morgan. Chez Arnaud, tous les jours, c’est squats et exercices pour développer le bas du corps. "Je fais aussi beaucoup d’étirements. Une heure tous les matins, il faut que mon corps soit toujours prêt à accepter l’écrasement de ma cage thoracique, dans l’eau, lors d’une apnée.

"Juste sentir l'eau sur ma peau"

Le jeune marseillais en profite aussi pour réfléchir : "Je fais beaucoup de visualisation sur mes objectifs. Je relis toutes mes notes prises lors de mes grandes plongées. Tout ce que j’ai pu ressentir sous l’eau, je le revis. Cela me permet de me remettre dans le bain, doucement." Pas de grand vide du grand bleu, pour l’instant. Très peu d’apnée à sec pour les deux, un peu de méditation pour Morgan et une année qui semble bien incertaine. "Il faut 2 mois et demi pour revenir au haut niveau. Pour descendre de 50 mètres à plus de 120 mètres de profondeur, le corps doit s’adapter. Après le confinement, si les compétitions sont maintenues, il faudra juger selon ses capacités du moment, et jouer la sécurité".

En attendant, l’eau de Marseille est redevenue plus bleue, plus transparente, et tous les deux, en grands amoureux de la Nature, l’ont remarqué. De ces semaines de confinement, bien loin du monde des abysses, chacun aura appris à respirer autrement. Le 11 mai prochain, jour de sortie du confinement, Arnaud Jerald ira d’abord revoir ses copains, avant de se jeter à l’eau "pour voir si ça a changé". Morgan enfilera son maillot de bain : "Je vais être simplement content d’être dans mon élément, de la plus simple des manières, juste pour sentir l’eau sur ma peau". Arnaud Jerald de conclure : "J’aurai mis toute mon expérience mentale et physique dans ce confinement, mais j’ai dû apprendre aussi, beaucoup de choses !" Et de cela, la Vie seule, en témoignera !

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