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Tour d'Espagne : Gaudu, un avènement qui a (presque) pris son temps

Vainqueur de deux étapes de haute montagne, et 8e au classement général final, David Gaudu a saisi à bras le corps les opportunités de se montrer sur ce Tour d’Espagne. Le jeune Breton a concrétisé par des victoires le potentiel que l’on soupçonnait chez lui.
Article rédigé par Théo Gicquel
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 5min
  (MIGUEL RIOPA / AFP)

Il est arrivé sur la Vuelta presque sur la pointe des pieds, habitué à être celui qui illumine les autres plutôt que celui qui court en pleine lumière. On se questionnait sur ce que ce Finistérien si prometteur pourrait faire s’il avait les mains libres. Lui aussi devait sans doute y songer malgré la présence de son épais (par le talent) coéquipier Thibaut Pinot au départ de la Vuelta.

Mais rapidement, David Gaudu a eu le champ libre pour certifier ce que beaucoup conjecturaient depuis sa victoire sur le Tour de l’Avenir devant Egan Bernal en 2016 : que derrière ce sourire permanent, et cette fraîcheur contagieuse se cache un grimpeur de haut vol. Mais là où les Tadej Pogacar et Remco Evenepoel ont donné un grand coup dans la porte dès leur débuts en pro, Gaudu a attendu son heure, a l'image d'un Tao Geoghegan Hart, dernier vainqueur surprise d'un Tour d'Italie où l'abandon de son leader lui avait aussi permis de jouer crânement sa chance.

Le Gaudu risque

Dès la troisième étape, Thibaut Pinot a dit stop, encore trop gêné par ses douleurs au dos pour espérer quelque chose. De quoi ouvrir les vannes à Gaudu pour donner sa pleine mesure, que l’on supposait sans jamais pouvoir l’affirmer. Deux semaines plus tard, il ne fait plus aucun doute : deux victoires d’étape en grande pompe et une 8e place au général récoltée à la faveur de ses échappées.

Là où on pouvait présumer des erreurs de jeunesse, Gaudu nous a opposé une maîtrise impressionnante des événements : à l’Alto de la Farrapona (11e étape), il a manœuvré Marc Soler sans trembler. Samedi, au dessus des nuages de l’Alto de la Covatilla (17e étape), il ne s’est jamais affolé. "Dans le final, il fallait tenter le tout pour le tout. J’ai eu peur que ça revienne entre le 3e et le dernier kilomètre mais après j’ai pu relancer, et j’ai vu que c’était bon", soufflait-il, heureux, à l’arrivée. 

Une victoire, c’était suffisant pour quitter le costume trop petit pour lui d’équipier. Une deuxième, c’était un changement de statut assuré. "J’y ai pensé ce matin (samedi) dans le bus, je me suis dit : 'Wellens a gagné deux étapes, il y a deux ans c’était Ben King, Thibaut aussi la dernière fois qu’il est venu, alors pourquoi pas toi ?' Aujourd’hui, c’était une journée où ça l’a fait à l’instinct", avouait le vainqueur.

David Gaudu lors de sa victoire sur la 17e étape. (OSCAR DEL POZO / AFP)

Armirail, gregario idoine

Une sérénité rendue possible par l’abattage en amont de Bruno Armirail, point d’appui essentiel au Breton dans ses victoires. "Bruno a encore été énorme aujourd’hui (samedi). Le travail qu’il fait est indescriptible. A l’heure actuelle, c’est un des meilleurs équipiers au monde dans ce rôle-là où il excelle : rouler, grimper voire même descendre", lui a rendu hommage Gaudu.

On pourra rétorquer que sa 8e place au général ne s’est pas faite "à la pédale" avec les favoris, mais un constat s’impose : le plafond de David Gaudu est bien à la hauteur qu’on pouvait l’imaginer, c’est à dire aussi haut que l’altitude de ses victoires. "Est-ce que je suis un champion ? Je ne sais pas, il est encore trop tôt pour le dire. La Vuelta était déjà réussie, mais avec une entrée dans le top 10, avec deux victoires d’étape, elle l’est encore plus et on va pouvoir partir en vacances sereinement." 

On attendait le Tour, on a eu Giro et Vuelta

Avec quatre bouquets pour Arnaud Démare sur le Giro, et donc deux pour Gaudu sur la Vuelta, la Groupama-FDJ a elle égalé son nombre de victoires en Grand Tour sur une saison, malgré les malheurs de Pinot, et un Tour de France du même coup contrarié. L’avènement de David Gaudu le déplace définitivement comme un leader chez Marc Madiot. "J'espère qu'avec ce qui s'est passé, mon statut va maintenant évoluer. Jusqu'à présent, j'ai toujours été dans l'ombre de Thibaut (Pinot). Il a su souvent me canaliser quand il le fallait. J'ai aussi beaucoup appris, et j'ai grandi à ses côtés. J'aspire à un peu plus maintenant"ambitionne le grimpeur dans les colonnes de L’Equipe. 

Il sera encore difficile de briguer un classement général sur la Grande Boucle, mais se battre pour celui du Giro, avec des conditions qu’il affectionne, lui tend les bras. "On m'a laissé carte blanche sur cette Vuelta, et je pense que j'ai répondu aux attentes. Je crois que je vais prochainement débriefer avec le staff et voir quelles peuvent être les perspectives pour 2021." C’est un problème de riche que Marc Madiot épouse sans doute volontiers.

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