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La saga Tom Boonen : Double "Ronde" et polémique

Tom Boonen tire sa révérence dimanche 9 avril à l'occasion de Paris-Roubaix qu'il caresse de remporter une 5e fois. Avec également trois "Tour des Flandres" à son actif, "Tommeke" a longtemps été le grand monsieur du printemps, ce "Flahute enchanté" qui défiait les pavés et enflammait la Belgique. Francetvsport vous propose de revenir sur les grands moments de sa partition flandrienne. Aujourd'hui, place à son 2e succès sur le Tour des Flandres (2006) et la polémique qui en est née quelques années après.
Article rédigé par Xavier Richard
France Télévisions
Publié
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A chaque pays ses icônes indéboulonnables. Son cannibale ou son blaireau. A la France les Hinault, Noah, Prost. A la Belgique Eddy Merckx, le champion étalon auquel aucun espoir n’échappe. Tom Boonen autant que les autres alors que son royaume se borne aux courses d’un jour quand son glorieux aîné avait les crocs à toute heure du jour et de l’année sans craindre d’indigestion. Après son premier Tour des Flandres remporté en vieux briscard malgré ses 24 ans, Boonen a lui aussi mangé du Cannibale. "S'il faut vraiment me comparer, alors oui, Merckx ne me semble pas un mauvais nom. Quand je prends le départ, je veux gagner, avait-il reconnu avant de glisser avec lucidité : « Je ne suis pas Dieu, je ne suis pas Merckx et je ne remporterai jamais le Tour de France ». Boonen ne règne que sur les classiques et ça suffit déjà à son bonheur. Et comme il n’y a pas trop de rois en Belgique, Albert II est venu en personne voir son sujet favori remettre son trône en jeu sur le Ronde 2006. « La vraie force de Tom, c'est sa capacité à endosser les responsabilités, assurait Eddy Merckx quelques mois plus tôt lors du sacre mondial de son compatriote. Ce n'est pas facile à son âge, et je suis bien placé pour savoir ce que c'est de courir avec le regard de tout un pays rivé sur vous ». C’est que le jeune premier semble avoir la tête solide, à des années lumières du fantasque peroxydé Frank Vandenbroucke et de l’austère Johan Museeuw dont les recours au dopage ont empoisonné les carrières. Malgré son statut de star naissante, Boonen reste droit dans ses socquettes et fuit pour le moment les pages people et faits divers. Sa seule extravagance est son exil en terre monégasque où il réside désormais.

Boonen et Hoste s'échappent

Ce 2 avril 2006, le soleil ne brille pas aussi fort que sur la Côte d’Azur. Il préfère jouer à cache-cache avec le peloton. Boonen lui ne trompe personne en faisant exploser la course dès le Koppenberg à 75 km de l’arrivée. Seuls les costauds parviennent à lui emboîter la roue quand la majorité du peloton rend les armes. Ils sont nombreux le pied à terre à maudire cette terrible bosse pendant que le Belge voltige sur les pavés. Le petit groupe de tête ne se fait guère d’illusions d’autant que le leader de l’équipe Quick Step est encore épaulé par ses coéquipiers Bettini, Pozzato et Baguet. Leif Hoste tente le tout pour le tout au sommet du Valkenberg à 33 kilomètres de l’arrivée. Bien placé, Boonen ne se fait pas surprendre. Le vainqueur est là, entre ces deux hommes qui filent à vive allure vers Meerbeke. Contre toute attente, Hoste joue le jeu en collaborant jusqu’au final alors que ses chances sont minimes pour ne pas dire nulles de battre son compatriote au sprint et que son leader George Hincapie chasse derrière le duo. Il faut dire que ça a beaucoup discuté et fait des grands gestes sur le bitume. Même le directeur sportif Dirk Demol s’est mêlé aux échanges entre Boonen et Hoste. La suite est cousue de fil blanc. Le porteur du maillot arc-en-ciel conserve son trône des Flandres avec à ses pieds le roi Albert II et sa majesté Eddy Merckx, venus tous deux l’honorer lors du podium. Paradoxalement, ce 12e succès de la saison ne fera polémique que des années plus tard.

Tom Boonen sur les pavés des Flandres

Course achetée ?

Après le sprint victorieux de « Tommeke », l’heure est à la liesse. Aucun coureur n'avait gagné deux fois de suite la classique flandrienne depuis le Belge Eric Leman (1972-1973). « Gagner le Tour des Flandres une fois c’est déjà un record. Ce n’est pas une course comme les autres. Gagner deux fois c’est incroyable, raconte Boonen après son exploit. Mais je ne cours pas pour battre des records mais pour gagner des courses. » Pour ajouter au symbole, gagner le « Ronde » avec la tunique de champion du monde n’était plus arrivé depuis la victoire de Merckx en 1975. Evidemment, il n’y a personne ce jour-là pour gâcher la 2e fête nationale du pays . Le pavé dans la marre viendra de Michael Barry qui affirmera en 2014 dans son autobiographie que la course a été achetée par Boonen. « Leif Hoste s'était échappé avec notre grand rival, Tom Boonen, écrit l’ancien coureur de Discovery Channel, coéquipier de Armstrong, Hoste et Hincapie. Ils ont coopéré et fait le trou sur George Hincapie et les autres. J'ai remarqué qu'ils avaient parlé pendant quelques minutes ensemble, puis avec notre directeur sportif qui les suivait. Un accord avait visiblement été conclu entre les deux coureurs en laissant ainsi George hors-jeu. A la fin, Boonen a terminé premier. Sur le podium, George ne pouvait pas sourire aux photographes. L'argent a probablement déterminé le résultat de la course ». Des propos que Hoste s’empressera de démentir. « A ce moment-là de la course, j'étais devant et mes coéquipiers derrière. Au sein de l'équipe, nous avions conclu que je n'aurais pas collaboré si George avait été seul à notre poursuite. Ce qui n'était pas le cas. La 2e place était le meilleur résultat que nous aurions pu avoir ». Seule certitude, Tom Boonen était le plus fort ce jour-là. Et le plus fort a gagné.

VIDEO : Revivez les moments forts du Tour des Flandres 2006

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