Tour de France : Israël Start-Up Nation, une équipe cycliste très diplomatique
Pour la première fois de sa jeune carrière, le Français Hugo Hofstetter (26 ans) va s’élancer ce samedi sur un grand tour pour trois semaines de course. Une "très belle opportunité et une grande fierté" nous confie l’Alsacien, qui défendra les couleurs d’une équipe également débutante sur le Tour de France, Israël Start-Up Nation (ISN). Ancien coureur chez Cofidis, Hugo Hofstetter a rejoint ISN en début d’année, "pour découvrir une équipe étrangère, une autre mentalité et une autre culture."
Ce dépaysement, le Français l’a connu dès son premier stage d’entraînement avec l’équipe israélienne en décembre dernier. Après quelques jours passés en Croatie, le groupe se dirige vers Israël où est basé le camp d’entraînement. Les coureurs alternent entre Tel-Aviv, Jérusalem et le désert, mais surtout entre entraînements et visites de sites touristiques du pays. "On a vu des choses importantes, mais on a fait beaucoup d’extra-sportif, relève Hugo Hofstetter. C’était difficile de se concentrer sur le vélo parce qu’on a fait beaucoup de visites de sites."
Faire découvrir Israël à travers le monde
Cette volonté de faire découvrir Israël à une équipe qui sera composée de six nationalités différentes sur le Tour de France n’est pas anodine. "C’est très important pour nous que nos coureurs connaissent Israël. On veut leur montrer le pays qu’ils vont représenter toute la saison", nous explique Sylvan Adams, le propriétaire d’Israël Start-Up Nation. Fils de déporté roumain, ce Canadien d’origine a fait fortune dans l’immobilier avant de réaliser en 2015 son alya, à savoir son immigration en Israël.
Dès lors, l’homme d’affaires israélo-québécois s’est engagé à développer le cyclisme dans le pays mais aussi et surtout à faire découvrir Israël à l’étranger à travers ce sport. Un projet mené seul, au contraire de l’UAE Team Emirates ou de la Bahrain-McLaren, deux équipes qui participent activement à la diplomatie sportive des Émirats arabes unis et du Bahreïn et qui seront également présentes sur le Tour de France. Pour le milliardaire, l’argent n’est pas un problème et il n’hésite pas à mettre la main au chéquier. En 2018, Sylvan Adams était parvenu à délocaliser les trois premières étapes du Tour d’Italie qui se déroulent ainsi en Israël.
"Le départ du Giro en 2018 nous a donné l’occasion de montrer notre pays, la vraie essence de celui-ci, à des centaines de millions de téléspectateurs", se félicite Sylvan Adams, qui a également participé à l'organisation d'un match amical de football à Tel-Aviv entre l'Argentine de Lionel Messi et l'Uruguay en novembre dernier. Passée en World Team (la division élite) en 2020, Israël Start-Up Nation a obtenu une invitation sur la Grande Boucle, qui permettra aux huit cyclistes de l’équipe de mettre à nouveau le pays en avant devant des centaines de millions de téléspectateurs.
"Nous avons participé au processus de paix"
Promoteur touristique d'Israël à l’étranger, ISN n’en est pas moins un objet diplomatique à part entière. En février dernier, l’équipe a participé pour la première fois au Tour des Émirats arabes unis. Une présence inédite alors qu’Israël n'entretenait aucune relation diplomatique officielle avec l’État du Golfe. "On a été reçu chaleureusement par les Émiratis, plus que les autres équipes. À mon sens, on a été traité comme des VIP", souligne Sylvan Adams. Rapport ou non, les Émirats arabes unis sont depuis devenus le troisième pays arabe - après l’Égypte et la Jordanie - à avoir reconnu l’État d’Israël lors d’un accord historique signé le 13 août dernier.
"Quand on est allé aux Émirats, je considère que nous avons préparé les conditions d’un accord, en nouant des amitiés avec les gens sur place. Je pense que nous avons participé à ce processus de paix d’en bas, avant que les dirigeants politiques qui ont normalisé les relations le fassent d’en haut", explique Sylvan Adams. L’accord entre les deux pays a été sévèrement critiqué par l’Autorité palestinienne (AP) qui y voit un affaiblissement de sa cause. L’AP avait également dénoncé le départ du Tour d’Italie en Israël, jugeant que le Giro était "complice de l’occupation militaire israélienne".
Une formation très ambitieuse
De ces accusations de sport-washing, procédé qui consiste à s'approprier les valeurs positives véhiculées par le sport pour lisser l'image d'un pays, Sylvan Adams se défend : "Pour moi, cette équipe, c’est juste pour montrer le vrai Israël, pour qu’on connaisse davantage notre pays. C’est de la promotion, du tourisme, simplement du sport. À la limite, on peut peut-être appeler ça de la diplomatie sportive".
Au-delà de l’aspect promotionnel de son pays, le milliardaire québécois souhaite faire d’Israël Start-Up Nation une formation qui compte au niveau World Tour. "C’est une équipe très ambitieuse", se réjouit Hugo Hofstetter, qui côtoiera dès la saison prochaine le quadruple vainqueur du Tour de France, Christopher Froome. Le Britannique rejoindra sa nouvelle équipe en 2021, pour "remporter dès la saison prochaine le Tour de France", assure Sylvan Adams. Avant cela, Froome devrait passer par la case Israël pour le stage d’entraînement, mais aussi et surtout pour ces visites et la découverte du pays qui sont au cœur du projet Israël Start-Up Nation.
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