Tony Gallopin, leader sans pression
Profil dans les mains, Tony Gallopin regarde à droite de son bout de papier le terrible Plateau de Beille. Une montée qu’il n’a pas reconnue. Ses seuls souvenirs du col pyrénéen remontent à 2011, bien calé qu’il était au cœur du gruppetto. A l’époque, son coéquipier belge Jelle Vanendert s’était imposé au sommet et jouait dans la cour des grands. Aujourd’hui, Gallopin laisse les sprinteurs monter petit tempo et s’invite à la table des champions. Le Français est l’une des rares satisfactions de ce Tour avec Warren Barguil, Pierre Rolland et Alexis Vuillermoz. Sir Dave Brailsford, le manager des Sky, est d’ailleurs bien plus étonné par sa résistance à la lessiveuse mise en place par ses coureurs que du numéro de Chris Froome à La Pierre-Saint-Martin. Lui aussi en mode nettoyeur. Depuis le départ d’Utrecht, Tony Gallopin fait un Tour hyper propre. Aucune tâche sur son dossard et une belle régularité sur tous les terrains. Au chaud pendant que Greipel dégommait deux étapes, Gallopin est désormais le porte-étendard de son équipe. « J’ai travaillé dur et c’est la première fois que je peux vraiment jouer ma carte à 100 % sans être au service d’un leader, explique-t-il. Ce Tour c’est une nouvelle expérience pour moi car je joue avec les meilleurs au général. J’ai plus pris ça comme un test au début pour suivre les meilleurs et maintenant j’y arrive. » Il y arrive même plutôt bien. 9e et 17e sur les deux premières étapes des Pyrénées, il a fait bien mieux que Nibali, Pinot ou Bardet. « Il était dans les 12 premiers au sommet du Tourmalet donc ça veut dire qu’il est bien et qu’il se sent bien, explique le manager de l’équipe Belge Marc Sergeant. Il a même attaqué à la fin. »
Froome s'en méfie
En apprentissage du plus haut niveau, Tony Gallopin se pose des questions sur ses capacités et la fragilité de sa position au général. Il redoute surtout le coup de la panne. « Je ne sais pas si je connais une mauvaise journée si je pourrai limiter la casse comme font les coureurs du général. Si je passe cette étape, avec seulement les Alpes à l’horizon, il y aura peut-être plus de chances de jouer une place au général. » Une prudence partagée par son équipe. « Je n’ai pas de doute sur sa capacité à tenir trois semaines, indique Marc Sergeant. Après, un jour sans suffit pour être en dehors du top 10. On va voir jour après jour. » Son oncle Alain, directeur sportif chez Trek, le suit avec intérêt. Il attend de voir où sera sa limite. « Il se teste sur ce Tour, indique-t-il. Il n’a pas de possibilité pour aller chercher le maillot jaune. Pour gagner une étape, il faut se laisser décrocher beaucoup plus (au classement) pour partir dans une échappée. Donc il a raison de jouer comme ça, sans aucune pression. Pour l’instant il se fait plaisir. »
Les belles places ne suffisent pas à Gallopin qui a malgré tout des fourmis dans les jambes. Ça n’est pas au goût de tout le monde. Chris Froome ne craint personne mais quand le Français est allé le voir pour lui demander s’il pouvait aller dans un coup lors de la 10e étape, le maillot jaune a mis son véto. « On a discuté un moment, raconte le 7e du général à 4’33’’ de Froome. Je suis allé le voir car je ne voulais pas gaspiller de l’énergie pour rien dans une échappée s’il ne voulait pas me laisser sortir. Il m’a dit que j’étais un peu trop près au général. » C’est aussi que le statut du Français a changé dans le peloton. Avec sa forme actuelle, son punch et sa science de la course, il devient un sacré client pour le Top 5. « Le top 5 c’est un rêve mais je suis prudent car c’est nouveau pour lui, tempère son manager chez Lotto-Soudal Marc Sergeant. Il est au top et c’est le bon moment pour tenter de le faire. Il veut briller sur un grand tour et surtout sur le Tour. » Pour l’instant c’est réussi.
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