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Florent Brard décrypte Paris-Roubaix

Du départ à Compiègne jusqu'au Vélodrome de Roubaix, c'est une succession de difficultés et de sensations qui attendent les coureurs. Florent Brard, 7e en 2005, décode les points clés de l'Enfer du Nord.
Article rédigé par Xavier Richard
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 5min
 

KM 0 : Départ de Compiègne
Depuis la fin du Tour des Flandres, on vit, on dort, on mange Paris-Roubaix. C'est une des rares épreuves avec une présentation des coureurs la veille mais on est imprégné par la course depuis plusieurs jours avec les reconnaissances. Dimanche matin, le réveil sonne et on est déjà dedans. On regarde le ciel… La voix de Daniel Mangeas résonne mais une chape de plomb s'est abattue sur le peloton. Ce n'est pas comme au Tour de Catalogne où tout le monde parle avec tout le monde. Pourquoi ? Parce que Paris-Roubaix est la seule classique où tu pars encore à l'aventure. Personne n'est maître de son destin car tout peut arriver. Des chutes, des crevaisons, des casses mécaniques, etc. D'où une grosse tension dès le départ. Il fait frais. L'échappée matinale a toujours un peu de mal à prendre car ça va très vite. Il faut dire que la route est droite jusqu'à St-Quentin.

Secteur pavé N.27 : Troisvilles Depuis St-Quentin, le peloton a changé de rythme. Quarante kilomètres plus loin, on passe d'une "autoroute" au premier secteur pavé large de deux mètres ! Avant d'arriver sur Troisvilles, il y a 200 mecs à bloc qui veulent se placer pour entrer dans les premiers. Pour moi, c'est la délivrance de rouler sur les pavés. Chacun est à sa place. Après Troisvilles on enchaîne rapidement deux autres secteurs. Les mécanos sont présents à chaque sortie en cas de problème sur le vélo.

Secteur pavé N. 16 : La Trouée d'Arenberg
Jusqu'ici, ça a été une course d'attente pour les favoris. Avant la forêt, c'est une nouvelle bataille rangée pour être dans les premiers et éviter les chutes. En principe, les meilleurs sont devant, les autres derrière. Les télévisions ont pris l'antenne mais personne n'entend l'hélicoptère au dessus de nos têtes. On n'entend que le bruit des machines qui vibrent. Tu te bas avec ta machine. Un combat seul à seul avec ton vélo. Surtout, ne pas ralentir. Dès qu'on roule moins vite, c'est comme si on tapait dans un trottoir. Et il y a 2000 trottoirs devant… Pour cette course, on utilise des roues plus souples et on diminue la pression des pneus à 7 kg. Gonflé à bloc, c'est comme un ballon de basket qui rebondit. En entrant dans Arenberg, le dernier n'a que vingt secondes de retard. A la sortie, il est à une minute. On tourne à gauche et on relance. Pour rentrer sur les premiers, il faut rouler à 60-65 km/h.

Secteur pavé N.10 : Mons-en-Pévèle
On a parcouru 208,5 kilomètres depuis Compiègne. Ça frotte beaucoup moins… Ce secteur de Mons n'est pas très connu car il est encore loin de l'arrivée (à 49 km) et ce n'est pas là que la victoire va se jouer. Mais il est pourtant super dur et va laisser des traces (côté 5 étoiles par ASO). 3000 m, c'est le deuxième plus long après le secteur N.25 de Quiévy. L'écrémage est fait et seule une poignée de coureurs peut encore s'imposer.

Secteur pavé N.4 : Le Carrefour de l'Arbre
C'est souvent ici que Paris-Roubaix se gagne. On a dépassé les six heures de course. Ne restent que les plus forts. Les pavés s'enchaînent. On subit de gros chocs. On ne sent plus les mains et les jambes. Chaque coureur est dans un état second. A ce moment, le corps est bourré d'endorphines et de dopamines. C'est pour cela qu'on va plus vite que si on roulait depuis 20 km. Le public, très chaud à cet endroit, nous transporte.

Vélodrome de Roubaix : Arrivée dans l'arène
"Aaaaaaaaaaaaaah". La clameur nous saisit au moment d'entrer sur le Vélodrome. On est comme dans une arène. La piste. La cloche. C'est magique. Seul ou à plusieurs. Ce n'est pas un sprint rapide, on ne bat pas de record. C'est juste une longue accélération. Il vaut mieux être pistard car il y a une part tactique importante sur piste. Pour les derniers, le Vélodrome est une récompense. Paris-Roubaix aurait moins de charme sans lui. Et sans les douches aussi. Elles font partie du folklore. Pendant que le vainqueur se passe un coup de gant sur la pelouse pour être présentable, les autres se bousculent dans les entrailles en béton. Cuissard et maillot abimés. Chaussettes et gants troués. Les habits neufs du départ sont tous à jeter. Le corps ne tremble plus comme sous les pavés mais il faudra bien deux jours pour récupérer.

Par Florent Brard

Paris-Roubaix à suivre dimanche en direct sur sport.francetv.fr

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