Cyclisme : le "grand soulagement" d'Audrey Cordon-Ragot, qui rejoint l'équipe Human Powered Health et sera au départ de Paris-Roubaix
Audrey Cordon-Ragot a finalement vite rebondi. Non payée par son équipe Zaaf Cycling depuis son arrivée en janvier, elle avait annoncé, le 2 avril, son départ de la formation espagnole. A quelques jours de Paris-Roubaix, et avec pourtant "le meilleur début de saison" de sa carrière selon elle, la championne de France s'était retrouvée sans équipe. Vendredi 7 avril, elle a finalement annoncé s'être engagée officiellement avec la formation Human Powered Health, qui évolue en première division mondiale.
L'ancienne coureuse de la Trek-Segafredo pourra donc courir Paris-Roubaix, samedi, sa première course avec sa nouvelle formation. La championne de France en titre s'est confiée en exclusivité à Tout Le Sport sur cette période, son changement d'équipe et sa nouvelle vie. (à retrouver vendredi à 20h45 sur France 3).
Franceinfo: sport : Pourquoi avoir pris cette décision de quitter l'équipe Zaaf Cycling ?
Audrey Cordon-Ragot : Les galères enchaînées depuis septembre [elle a été victime d'un AVC et faisait partie du projet avorté d'équipe féminine de B&B Hôtels] m'ont fait me remettre en question sur ce que j’avais envie et plus envie dans ma vie. La situation dans laquelle j’étais ne me convenait pas. Tout cela m’a fait grandir et prendre ma décision. Il fallait que je pense à mon bien-être mental, et que je me respecte tout simplement, en tant que femme et coureuse.
Comment avez-vous fait pour rebondir aussi vite ?
Nous avons deux syndicats qui entourent le cyclisme qui nous ont proposé des solutions. J’ai la chance de connaître très bien David Lappartient [président de l'UCI], qui est Breton comme moi. Quand j’ai vu que ça n'avançait pas très vite, je l’ai contacté personnellement en lui exposant que la situation des filles de l’équipe était illogique par rapport à la règle de l’UCI, qui est de n’ouvrir la fenêtre de transferts qu’au 1er juin. Il s’est vite rendu compte que ce règlement n’était pas adapté à notre situation. Ensuite, tout s’est débloqué assez rapidement.
Vous souhaitiez retrouver en priorité une équipe World Tour ?
Mon expérience en Continental [deuxième division] a été courte mais intense, et je n’avais pas envie de revivre ça. Je pense qu’il y a un réel travail à faire sur l’organisation des équipes Continental chez les femmes. En World Tour, c’est plus sûr, et il y a le fait de ne pas devoir se battre pour être invité sur les grandes courses, comme le Tour de France qui est un des objectifs de ma saison.
Quel est votre sentiment, après des mois de galère et à quelques jours de Paris-Roubaix ?
Un grand soulagement. Dès lors que mon départ a fuité, beaucoup d’équipes m’ont proposé un contrat. J'ai été soulagée de voir que mon profil était encore intéressant pour certaines équipes et que j’allais pouvoir trouver une issue favorable.
Vous avez eu un hiver très dur avec l’AVC, B&B qui n’a pas vu le jour, le départ de Zaaf… Que ressortez-vous de ces mois compliqués ?
Toutes ces galères m’ont fait prendre conscience que j’avais du caractère, pas que sur le vélo mais aussi dans la vie : toujours se relever et voir plus loin, ne pas s’arrêter au moment présent qui est douloureux.
"Mon fil rouge, ce sont les JO de Paris. S’ils n’étaient pas là, ça aurait pu être plus compliqué de continuer à se battre. J’ai dit à mon mari : "Il n’y a que moi qui déciderai quand j’arrêterai ma carrière."
Audrey Cordon-Ragotà Tout le sport
Qu’est-ce qui vous a fait tenir ?
L’envie d’aller au bout de mon projet, partir par la grande porte et non pas parce qu’on m’y a forcé. Il y a moi, mais il y aussi toutes mes coéquipières qui sont dans la même situation, notamment ma coéquipière Lucie Jounier, fauchée par un automobiliste l’été dernier et qui était en projet avec moi à B&B et aussi avec Zaaf… On a toutes ce caractère en nous, c’est pour ça qu’on est encore là.
Vous ressortez plus forte ?
Tout ce qui nous arrive dans la vie doit nous servir de leçon. Celle que je retiens ici, c’est que je serai au départ de Paris-Roubaix samedi, avec une équipe qui me fait confiance, dans laquelle je me sens déjà très bien. Ce n'est que du bonheur à partir de maintenant.
Avec quelles ambitions venez-vous, car la situation est très particulière pour vous…
Je n’y vais pas sans ambition, mais j’y vais sans me fixer quoi que ce soit. On verra ce que ça donne. C’est ma course préférée, qui me convient bien. Je n’aurai qu’une semaine d'entraînement avec mon nouveau vélo mais au final, ça change quoi ? C’est Roubaix pour tout le monde, c’est une course de guerrières, il faut y aller le mors aux dents, peu importe la marque de vélo ou le cuissard.
On vous verra sans doute au départ du prochain Tour de France...
Être dans une équipe World Tour stabilise le programme. J’adore planifier, et là, il y avait beaucoup de points d’interrogation jusqu’en juillet. Je vais pouvoir me préparer sur mes vrais objectifs de la meilleure manière possible. Le Tour, c’est la course par étapes par excellence sur laquelle je vais avoir des ambitions, avec un rôle différent au sein de cette équipe. J’ai hâte d’y être.
Propos recueillis par Nicolas Geay.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.