Mende 1995, Laurent Jalabert ouvre une nouvelle voie
km 22, un coup fumant
« Il y avait une ambiance particulière ce jour-là. Je n’étais pas spécialement parti pour attaquer ce 14 juillet. J’étais dans les voitures au moment du départ. Au kilomètre zéro, on m’annonçait en remontant que ça attaquait à l’avant du peloton. Je me suis dépêché de doubler le peloton. Ça partait en bosse et je sentais que j’avais de bonnes jambes. Bottaro a attaqué et j’ai pris sa roue. KM 22 le coup est parti et l’aventure était lancée. »
Maillot jaune …virtuel
« Un Gewiss était dans la roue mais il n’a pas roulé pendant dix kilomètres. J’ai failli me relever mais on m’a dit d’insister. Plutôt que de me relever moi, on m’a envoyé du renfort (deux équipiers Mauri et Stephens, ndlr). Le regroupement nous a permis de prendre beaucoup d’avance. J’étais virtuel maillot jaune pendant une bonne partie de l’étape. J’y ai cru à un moment donné mais l’écart a fini par ce réduire. On nous a expliqué que beaucoup d’équipes roulaient, même celles qui n’avaient pas intérêt à le faire. C’est la règle du jeu, c’est comme ça. »
A jamais le premier à Mende
« A la fin, il faut conclure pour ne pas avoir fait ça pour rien. Dans la côte de la Croix-Neuve, je me suis précipité. J’ai attaqué dès le pied. Je me sentais bien mais après 200-300 mètres j’avais les jambes qui brûlaient. Je me suis dit ‘je suis parti trop vite’. Je regarde derrière et je vois que les gars avec qui j’étais échappé sont toujours là. De toute façon, ils sont toujours là. Quand quelqu’un est à 100 mètres, il est à trente secondes. La montée était dure et l’effort violent mais au bout c’était une grosse joie. C’était une longue et belle journée parce que le succès était au bout. »
Jalabert devient « Jaja »
« Ce qui est marquant, c’est que tout le monde s’en souvient alors que j’ai gagné des grandes courses. Ce 14 juillet a marqué les esprits. Pourquoi ? Peut-être parce que l’année d’avant j’avais été blessé sur le Tour à Armentières. J’ai quitté le Tour et peut-être que beaucoup se sont dit qu’on ne le reverrait plus ou qu’il ne serait pas le même. En effet, je n’étais plus le même. Je suis revenu différemment. J’avais beaucoup gagné en début de saison (Paris-Nice, Milan-Sanremo, Flèche Wallonne, Tour de Catalogne) mais le Tour est l’épreuve qui place une coureur dans le cœur du public. Surtout si tu fais du spectacle. Je le vois encore aujourd’hui. C’est ce que réclament les gens. On demande toujours pourquoi il n’y a pas un Français qui part de loin ou pourquoi les coureurs du général attendent le dernier col. Je ne me considérais pas comme un gars pour le général. Je pouvais le faire. C’est sûr que ce succès a contribué grandement à ma notoriété. »
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