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Tour d'Italie : Ce qu'il faut retenir du 103e Giro

Le Tour d’Italie s’est achevé ce dimanche sur la victoire de Tao Geoghegan Hart (Ineos Grenadiers). Final à suspense, leaders défaillants, joute entre Démare et Sagan, prime à l’offensive : voici ce qu’il faudra retenir de ce Giro plein de surprises.
Article rédigé par Théo Gicquel
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 7min
Hindley - Geoghegan Hart, le duel qui a animé le Giro. (LUCA ZENNARO / ANSA)

• Un duel insoupçonné, un finish à la seconde

Tao Geoghegan Hart - Jai Hindley. C’est le duel imprévu et ébouriffant qui a animé la troisième semaine rocambolesque de ce 103e Tour d’Italie. Personne ne l’avait vu venir, personne ne pouvait l’annoncer, mais les deux hommes étaient bien les deux meilleurs coureurs en montagne de ce Giro. Ils se sont livrés une superbe bataille (arbitrée par Rohan Dennis) sur le Stelvio enneigé (18e étape) avant d'atteindre son point d’orgue au soir de la 20e étape.

A la faveur de la victoire d’étape de Geoghegan Hart, les deux hommes se sont retrouvés séparés de… 86 centièmes à la veille de la dernière étape, le plus petit écart jamais vu en Grand Tour à ce moment de la course. De quoi offrir un dénouement haletant et cruel dont le Britannique est finalement sorti vainqueur. "Je n’y croyais pas, je m’y attendais pas. C’est un rêve fou pour un homme fou. Ca va me prendre du temps pour réaliser.", confiait-il à l’arrivée à La Chaine L’Equipe.

• Des leaders à la dérive, des jeunes qui poussent

Si Tao Geoghegan Hart et Jai Hindley ont pu prendre la lumière, c’est parce qu’ils ont su endosser leurs responsabilités : le Britannique à la suite de l’abandon précoce de son leader Geraint Thomas lors de la 4e étape. L’Australien car son leader Wilco Kelderman, 3e du général final, était simplement moins fort que lui sur les pentes du terrible Stelvio, lors de la 18e étape. Parmi les favoris proclamés à la victoire finale à l’aube de ce Giro, pas un n’a fini dans le top 5 : Geraint Thomas (abandon), Steven Kruijswijk et Simon Yates (retrait en raison de la Covid-19), Jakob Fuglsang (6e) et Vincenzo Nibali (7e). 

Avec autant de défaillances, sportives ou non, la place était à prendre, et certains jeunes ne se sont pas fait prier. Au premier rang, Joao Almeida (22 ans), porteur du maillot rose de la 3e à la 17e étape. Le jeune Portugais avait déjà laissé augurer de belles choses, il a fait un sacré bond en avant. On y ajoute évidemment Geoghegan Hart (25 ans) et Hindley (24 ans), mais aussi Jhonatan Narvaez (23 ans), vainqueur en solitaire de la 12e étape, ou les plus discrets Sergio Samitier (25 ans, 13e), James Knox (24 ans, 14e), Brandon McNulty (22 ans, 15e) et même le premier Français au général, Aurélien Paret-Peintre (24 ans, 16e).

• La part belle à l’aventure

Autre conséquence directe d’un Giro déserté de têtes d’affiche, beaucoup de coureurs en ont profité pour tenter des coups. Jonathan Caicedo, Alex Dowsett, Ruben Guerreiro, Jhonatan Narvaez, Jan Tratnik, Ben O’Connor, Jai Hindley, Josef Cerny : même si vous suivez assidûment le vélo, ces noms ne vous sont pas forcément familiers. Ce sont pourtant tous des vainqueurs d’étape sur cette édition, la plupart à l’issue de raids en solitaire ou en petits groupes.

Ce que le Giro a perdu en prestige, il l’a gagné en liberté d’action. Jamais verrouillé comme l’est souvent le Tour de France, ce Giro a offert des scénarios improbables et des vainqueurs surprenants. Un vent de fraîcheur que confirme le podium final : Geoghegan Hart, Hindley, Kelderman.

Jhonatan Narvaez, vainqueur surprise de la 12e étape du Giro. (LUCA ZENNARO / ANSA)

• Des conditions rocambolesques

Que ce soit sur le plan sanitaire ou sur le déroulé de la course, ce Giro aura connu des soubresauts inédits. La course a pu aller à son terme mais la Covid-19 a malgré tout fait des siennes : plusieurs cas positifs dans plusieurs équipes, et deux leaders (Yates et Kruiswijk) testés positifs, entraînant par la suite le retrait pur et simple de leur équipe pour la suite. 

Sur la route, l’événement le plus marquant a eu lieu lors de la 19e étape. Exténués par les transferts et le peu de récupération au vu des efforts consentis, les coureurs n’ont pas pris le départ prévu de cette étape de plat, finalement raccourcie après plusieurs heures d’incompréhension. "Nous avons appris ce qui se passait à cinq minutes du départ. On ne s'y attendait pas, je n'ai reçu aucune requête des coureurs.", pestait le patron du Giro Mauro Vegni à l’issue de l’étape. "Une communication quelques minutes avant le départ (de la part des coureurs), ce n'est pas normal. On ne devrait pas tolérer ça et les coupable devront payer." Drôle d’ambiance.

• La résilience d'Ineos-Grenadiers

Geraint Thomas était un si ce n’est LE favori à la victoire finale sur ce Giro. Le Gallois, pas épargné par la guigne, a roulé sur un bidon avant le départ de la 3e étape, le contraignant à l’abandon le lendemain. Obligée de revoir ses plans, la formation de Dave Brailsford pouvait difficilement faire mieux que de gagner quand même avec un autre coureur en y ajoutant 7 (!) victoires d’étapes : deux pour le futur vainqueur, quatre pour Filippo Ganna, intouchable sur les chronos, et une en solitaire pour le jeune Jhonatan Narvaez. Niveau résilience après l’abandon de son leader, on a rarement vu plus efficace.

Filippo Ganna, principal pourvoyeur de victoires pour Ineos. (LUCA ZENNARO / ANSA)

• Démare/Sagan, trajectoires croisées

Ce Tour d’Italie n’a pas fait la part belle aux sprints : seulement quatre étapes se sont conclues par une arrivée massive, et les quatre ont été remportées par un seul homme : Arnaud Démare. Le sprinteur de la Groupama-FDJ a raflé tout ce qu’il pouvait et aurait même pu en ajouter une cinquième si la 19e étape, dessinée pour un sprint, s’était déroulée dans les conditions prévues.

Cette performance du Picard s’observe également à l’aune de celle de son principal adversaire, Peter Sagan. Le Slovaque a sauvé son année en remportant son unique victoire de la saison sur la 10e étape, mais il a confirmé les signes inquiétants d’un déclin en vitesse pure, à 30 ans. Battu à la régulière par Bennett (sur le Tour de France) et Démare (Giro) au classement par points, 2020 est à oublier pour Sagan.

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