Critérium du Dauphiné : Daniel Felipe Martinez, l'autre success story venue de Colombie
“Ce matin j’ai appris que Roglic était non partant. Je savais que la course serait folle dès le départ. L’équipe a travaillé pour moi dans la première partie de l’étape, ce qui m’a permis d’économiser de l’énergie pour le final et d’aller chercher la victoire. J’étais à la limite, mais déterminé à me battre jusqu’à l’arrivée. C’est une des plus grosses courses du monde, alors débarquer de Colombie et s’imposer ici, ça me rend très heureux”. Il y a des jours qui marquent une carrière, ce dimanche 16 août 2020 restera gravé dans la mémoire de Daniel Felipe Martinez.
Un vainqueur inattendu
Parti dans la Côte de Domancy à 26 km de l’arrivée, le Colombien a mis toute la concurrence dans le rouge lors de la dernière étape du Critérium du Dauphiné, laissant derrière lui un Thibaut Pinot en perdition. S’il a dû s’incliner face à Sepp Kuss dans le final vers Megève, sa deuxième place lui a garanti la marche la plus haute du podium final. Alors que le plateau de la course n’avait jamais été aussi relevé, c’est un outsider qui s’est finalement imposé.
Dans sa propre équipe, il ne faisait même pas figure de leader sur la ligne de départ. C’est bien Rigoberto Uran qui portait le dossard n°11. Aux côtés de Tejay van Garderen, deuxième de l’édition précédente, et de Sergio Higuita, l’autre prodige colombien annoncé, Martinez n’était probablement pas identifié comme une des principales menaces pour le classement général par les autres formations. D’autant qu’il n’avait pas été davantage aperçu en course depuis le Tour de Colombie, bouclé à la 2e place en février dernier. Après son couronnement, son manager Jonathan Vaughters a lui-même reconnu que Martinez "avait été négligé depuis son arrivée chez EF en 2018".
Rien ne laissait présager que Daniel Felipe Martinez remporterait cette édition du Dauphiné. Il n’y avait d’ailleurs jamais participé. Habitué à connaître des trous noirs sur des courses à étapes, le Colombien de 24 ans avait tout de même fait état de progrès tangibles ces trois dernières saisons. 7e en Catalogne, 12e en Romandie et 3e en Californie lors de la saison 2018, il s’était ensuite signalé l’an passé s’imposant au sommet du Col de Turini lors de la 7e étape de Paris-Nice.
Sa progression avait ensuite été freinée par une fracture du scaphoïde à l’entraînement au mois de juin, alors qu’il préparait le Tour de France. Dani Martinez est d’ailleurs coutumier des coups d’arrêt. En 2018, dans la foulée de sa révélation sur le Tour de Catalogne, il avait été hospitalisé après avoir été agressé par un automobiliste et plongé dans l’amnésie. "Je m’entraînais en Italie et une voiture a failli nous tuer. J'ai protesté et je suis devenu fou. Le chauffeur est sorti et m'a attaqué. Il m'a frappé dans la mâchoire et m'a mis KO. Il a écorché la lèvre d'un autre gars et s'est enfui", avait-il expliqué dans les colonnes d’El Tiempo.
Après Bernal, Lopez et avant Higuita
Le natif du quartier difficile de Soacha, à Bogota (2565m d'altitude), a commencé comme beaucoup de ses compatriotes, tout seul comme un grand. Lui, c'est son frère Jeison qui avait accepté de lui prêter son vélo. Mais le premier amour du jeune Martinez était le football, qu'il a pratiqué au poste d'attaquant. El Tiempo raconte qu'il a travaillé en tant qu'assistant dans une boutique pour pouvoir se rendre aux matches de l'Atletico Nacional, son club de cœur.
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Daniel Felipe Martinez a fait ses premiers pas dans la Continentale Colombia, en Europe dès ses 18 ans. Meilleur grimpeur sur la Ruta del Sur 2015, il avait pu assister à la victoire de son idole Alberto Contador. Repéré par la formation italienne Wilier-Triestina, avec laquelle il a couru en 2016 et 2017, le Colombien a rejoint Education First en 2018. "C'est un des coureurs sur lesquels on s'appuie. Pour nous, c'est l'autre leader de l'équipe. Il est jeune, il doit apprendre, mais c'est sûr qu'il sera un grand champion", racontait son directeur sportif Juan Manuel Garate dès sa première saison en rose.
Deux ans plus tard, Martinez a décroché le plus grand succès de sa jeune carrière, au terme d'un Critérium du Dauphiné extrêmement disputé. Un succès qui lui vaudra d'être un peu plus surveillé sur les routes du Tour de France en septembre. Reste à savoir s'il assumera le rôle de leader pour le classement général. Jusqu'à présent, son meilleur résultat sur un grand tour n'est qu'une pâle 36e place sur la Grande Boucle en 2018. Bon grimpeur, efficace en contre-la-montre et doté d'un punch intéressant, il a en tout cas de quoi confirmer les promesses nouées pendant ce mois d'août.
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