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Yorkshire 2019 : Comment expliquer l'absence des Français sur les podiums des contre-la-montre ?

L'épreuve du contre-la-montre messieurs se déroule ce mercredi aux Mondiaux de cyclisme. Cette discipline est inscrite au programme des Championnats du monde depuis 1994. En 25 éditions, seul Laurent Jalabert a décroché la médaille d'or, en 1997. A part ça, un seul podium pour les Bleus avec la troisième de Jérôme Coppel en 2015. Alors comment expliquer l'absence de Tricolore sur la boîte des contre-la-montre ? Eléments de réponse avec Laurent Jalabert.
Article rédigé par Théo Dorangeon
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 5min
  (PHILIPPE LOPEZ / AFP)

Six médailles à deux. Voici le bilan des performances françaises en course en ligne et en contre-la-montre aux Mondiaux de cyclisme. Depuis 1994, date de l'ajout du contre-la-montre,  la course en ligne apporte plus de podiums que la seconde épreuve à l'équipe de France. Et aussi plus de titres : deux contre un. Le seul sacre planétaire en chrono pour un Français revient à Laurent Jalabert en 1997. "Je n'étais pas un spécialiste, se remémore l'ancien coureur. J'ai profité du Tour d'Espagne duquel je sortais. Le sélectionneur était venu me voir pour me dire qu'il n'avait personne pour le chrono, que je ne volais la place à personne. Avec la condition, la 4e place sur le chrono de la Vuelta, c'était l'opportunité de faire un top 5. Ça s'est bien goupillé, je me suis même surpris."

Depuis, une seule breloque tricolore sur l'épreuve avec le bronze de Jérôme Coppel en 2015. Pour expliquer cet absentéisme français, Laurent Jalabert met en avant "un manque de spécialistes. Tout simplement, je pense qu'on n'accorde pas beaucoup de passion et de travail à cette discipline. Il y a des pays où dès le plus jeune âge on fait des courses contre-la-montre comme chez les Britanniques. C'est une spécialité chez eux. Donc ils sont déjà dans cet automatisme. Chez nous, c'est les courses en ligne. On ne prépare pas les jeunes garçons, ou filles, à devenir de très bons rouleurs. On n'a pas cette culture-là."  

Cette saison, pourtant, les Bleus se sont montrés sur les contre-la-montre des grands Tours : Julian Alaphilippe vainqueur sur le Tour de France en plus d'un Thibaut Pinot septième. Plus récemment, Rémi Cavagna a enlevé la troisième place du chrono de la Vuelta. Mais aucun des trois ne vient s'essayer sur la discipline aux Mondiaux. Alaphilippe et Cavagna sont concentrés sur la course en ligne. "Il y a une préférence. Alaphilippe est axé sur la route, on ne peut pas lui en vouloir", signifie Jalabert.

"Le jeu n'en vaut pas la chandelle"

Le consultant France Télévisions explique qu'il y a un manque d'intérêt des coureurs français pour cette épreuve : "Quand j'étais sélectionneur, une année, je voulais emmener Jean Christophe Péraud car il était le meilleur Français sur chrono et il avait décliné la sélection. Il m'a dit 'non, ça ne m'intéresse pas'. Il n'était pas motivé, mais pourtant il était le meilleur. J'avais finalement pris Dimitri Champion, qui marchait assez bien en fin de saison. Mais tu ne peux pas viser un podium. Tu prends ce qui reste." 

"Parfois, on met même un seul gars parce que ça ne vaut pas le coup de dépenser de l'argent avec un coureur qui va faire 100e." 

Connaissant le job de chef de l'équipe de France, il indique que les sélectionneurs n'ont pas le pouvoir. "Les coureurs ne sont pas la propriété de l'équipe de France. Ils appartiennent à des groupes sportifs, qui ont un calendrier et des exigences aussi. Ce n'est pas toujours évident de préparer un événement pareil. Il faut être bon, déterminé, convaincant pour faire passer l'idée auprès de son équipe qu'on va sacrifier du temps pour cet objectif. Il faut le planifier des mois à l'avance, avant le Tour de France et savoir qui fait le chrono. Le gars doit avoir ça en tête pour préparer spécifiquement et méticuleusement. Et pour le moment, il semblerait que le jeu n'en vaut la chandelle." Alors forcément pour Laurent Jalabert, "le constat est chaque année le même. Parfois, on met même un seul gars parce que ça ne vaut pas le coup de dépenser de l'argent avec un coureur qui va faire 100e."

Thomas et Latour engagés pour la France

Par comparaison, la Belgique n'a jamais été titrée dans l'épreuve du chrono. "En Belgique, le cyclisme tourne davantage autour des épreuves sur route", indique à l'AFP Laurenzo Lapage, ancien spécialiste de la poursuite et directeur sportif de Mitchelton. Mais depuis cinq ans, la fédération belge a mis en place le "Tijdritproject" (projet contre-la-montre) visant à organiser un plus grand nombre de tests consacrés exclusivement aux épreuves chronométrées. Un programme qui tend à payer avec une médaille de bronze l'an passé pour le Belge Victor Campenaerts. "Ils sont désormais capables de rivaliser au plus haut niveau, ce n'est pas notre cas. Il faudrait peut-être s'en inspirer", admet Laurent Jalabert. Mercredi, les Belges auront de grands espoirs placés en Yves Lampaert, Victor Campenaerts et le phénomène Remco Evenepoel, champion d'Europe du contre-la-montre à seulement 19 ans.

Côté équipe de France, Thomas Voeckler comptera sur Benjamin Thomas et Pierre Latour, qui ont remporté les trois derniers championnats de France sur la discipline, pour faire bonne figure. Pas suffisant pour Laurent Jalabert : "Ce sont deux bons coureurs, mais pas à ce niveau-là. Pas pour gagner, pour faire un podium. Je n'y crois pas. J'espère quand même qu'un des deux va faire que la tendance s'inverse."

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