Bretagne snobée, Bordelais favorisés, pays étrangers souvent visités... Cinq idées reçues sur le parcours du Tour de France
Où l'on apprend que les Finistériens sont mieux lotis que les Charentais-Maritime.
Chaque année, l'annonce du parcours du Tour de France est saluée par une bordée de récriminations. Ceux qui grognent parce que leur département est oublié, ceux qui trouvent qu'il n'y en a que pour les Alpes et les Pyrénées, ceux qui se lamentent qu'une moitié de l'Hexagone passe à la trappe, ceux qui râlent quand le parcours fait un crochet à l'étranger... Alors que le grand départ de l'édition 2017 a lieu à Düsseldorf (Allemagne), samedi 1er juillet, revenons sur les plaintes les plus fréquentes.
>> CARTE. Les départements les plus fréquentés et les plus snobés par le Tour de France
La Bretagne est zappée une fois sur deux
C'est plutôt faux. Le gros du peloton des râleurs est à chercher en Bretagne. L'extrémité ouest du pays se plaint d'être régulièrement boudée, et ce alors qu'elle fournit régulièrement de grands champions, le plus illustre d'entre eux étant Bernard Hinault. Vraie injustice ou début de paranoïa ? Tout dépend si vous incluez l'Ille-et-Vilaine (voire la Loire-Atlantique...) dans la Bretagne. Ces départements figurent en bonne place au classement des plus visités (16e et 18e). Plus à l'ouest, le Morbihan et les Côtes-d'Armor n'ont eu les honneurs du Tour de France qu'une année sur deux. Et encore plus à l'ouest, le Finistère n'a pu voir des chutes à l'arrière que lors d'une édition sur trois.
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Les Bordelais sont privilégiés
C'était vrai, ça ne l'est plus. La Gironde, c'est 85 passages du Tour depuis 1903... Et plus rien. Même à Bordeaux, on attend le passage de la Grande Boucle depuis 2010. Ce ne sera pas a priori avant 2018. Une question de choix, en mettant en avant d'autres évènements (le Tour de France à la voile, un marathon nocturne, le Mondial de handball...). Une question de finances, aussi : "On n'a pas d'enveloppe extensible. Il faut être raisonnable", insiste Arielle Piazza, adjointe aux sports, sur France Bleu Gironde. La ville était pourtant tellement habituée à voir passer le peloton que dès 2013, le journal Sud Ouest se plaignait de voir la région "délaissée" par la Grande Boucle.
Les habitués vont devoir s'y adapter : chaque année, un thème – la première guerre mondiale en 2014, les cinq massifs montagneux en 2017 – s'impose et oblige ceux qui tracent le parcours à sortir des sentiers battus. "Nous n’imitons pas le Giro ou la Vuelta, le Tour est la course la plus importante du monde. Nous traçons notre propre route", insistait Christian Prudhomme, patron de l'épreuve, lors de la présentation de l'édition 2017.
Les départements littoraux et frontaliers sont favorisés
C'est plutôt vrai. La carte des tracés depuis 1903 laisse cette impression. Le Tour de France a des airs de tour de la France, au sens strict, avec l'accent porté sur les départements frontaliers et littoraux (sauf le Finistère, on a compris). Alphonse Steinès, responsable du tracé des premières éditions du Tour, avait confié : "J'ai fini par convaincre le patron Henri Desgrange qu'un Tour de France devait longer les côtes, escalader les montagnes par les routes et les chemins les plus rapprochés des frontières, que ce soit la plaine ou la montagne." La fin du parcours en "chemin de ronde", en 1951, esquisse une topographie différente, permettant aux cinquante départements du centre du pays de recevoir l'épreuve.
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Le Tour passe tout le temps à l'étranger
C'est faux. Le Tour de France visite en moyenne 40 départements tous les ans, avec un record à 53 départements traversés en 1910, et un plus bas historique à 25 en 2015. Cette année-là, quatre étapes se déroulaient en Belgique et aux Pays-Bas, et le parcours se concentrait sur les Alpes et les Pyrénées, avec une petite série d'étapes dans l'Ouest pour satisfaire les sprinters. Le plat pays est le chouchou des organisateurs, avec 47 passages depuis 1947. Ce qui le classerait dans le top 15 du classement devant le Pas-de-Calais ou l'Ille-et-Vilaine sur la même période. Seule la Belgique bénéficie d'un abonnement à la Grande Boucle, en comparaison avec l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne, qui comptent une douzaine de passages chacun.
Il y a des départements qui attendent le Tour depuis 20 ans
C'est (presque) vrai. "Préparez les chaises pliantes, les pique-niques et ne ratez pas votre tour car on ne sait jamais quand la Grande Boucle repassera. L’attente peut être longue, très longue…", écrivait Sud Ouest à l'occasion du passage du Tour dans le Lot-et-Garonne en 2014, après quatorze ans d'attente. C'est le lot des départements qui ne sont pas situés stratégiquement, et qui guettent des signes comme un grand départ pas trop loin, pour remettre sur le tapis leur candidature.
Dans les Ardennes, on considère que le bref passage du Tour en 2010 – 8 km lors d'une étape Cambrai-Reims – ne compte pas vraiment. "Ils sont restés quoi, dix minutes ?" souffle Alain Barthélémy, adjoint aux sports à la mairie de Charleville-Mézières. Là-bas ou à Sedan, on guette un signe d'ASO quant à la possibilité de recevoir la Grande Boucle pour de vrai pour la première fois depuis 2003. Quand Düsseldorf a été choisie comme ville-départ, "on avait réfléchi à déposer une candidature, mais ce n'était pas viable financièrement à l'époque". Prochaine fenêtre de tir, en 2019, quand le grand départ sera donné à Bruxelles. "Je vais faire 400 km pour me rendre à la Planche des Belles Filles [théâtre de l'arrivée de la 5e étape du Tour 2017] pour évoquer le sujet avec ASO."
La Charente-Maritime souffre elle aussi d'être boudée par la Grande Boucle depuis 2003. Le président du département, Dominique Bussereau, a glissé à l'oreille de Christian Prudhomme qu'un passage par l'île d'Oléron et l'île de Ré serait du plus bel effet, surtout filmé d'hélicoptère. Le président de la communauté de communes, Pascal Massicot, appuie la demande, à condition d'avoir un sérieux coup de pouce financier : "En tant que président de l'office de tourisme du pays de Marennes-Oléron, je n'y vois qu'un aspect intéressé. Ça permettra peut-être aux gens d'arrêter de nous placer en Bretagne ou en Gironde", sourit-il. Le Tour n'est passé que deux fois sur le territoire de l'agglomération, la dernière fois en 1997. "Mais vous savez, il n'y a pas que le Tour de France qu'on attend. La dernière visite officielle d'un président en exercice chez nous remonte à 1896. C'était Félix Faure." A croire que la patience est une vertu charentaise.
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