Claude Onesta: "Je ne serai ni le Père Noël ni le Père Fouettard" des fédérations
L'ancienne ministre des Sports, Laura Flessel, avait fixé l'objectif de 80 médailles pour les Jeux olympiques de Paris en 2024. Etait-ce raisonnable?
Claude Onesta: "Je crois que c'était une bonne idée, même si elle n'était pas forcément réaliste. J'ai compris avec le temps que si Laura Flessel s'était contentée de dire +Il faut faire mieux+, on n'aurait rien fait de plus. Je ne suis pas obnubilé par l'objectif des 80, mais on doit être au rendez-vous d'une transformation conséquente, pour espérer des résultats plus conséquents".
Tokyo-2020 c'est une étape sur le chemin de Paris-2024?
CO: "Tokyo c'est dans un an et demi. Les Britanniques, quand ils ont changé leur modèle pour être au rendez-vous de Londres-2012, ils avaient commencé vingt ans avant. Nous, dans l'immédiat on va être dans la continuité des habitudes prises et peut-être que Tokyo, si on est lucides, pourrait être un moment un peu compliqué (...) Aujourd'hui, il y a de plus en plus de pays qui se sont mis au boulot. On ne fait pas moins bien mais la concurrence fait mieux. Et petit à petit nos résultats décroissent. Il y en a même qui pensent que d'ici à Paris-2024, c'est trop court (...) Il y a des dossiers où le sport français est en retard, il y a d'autres domaines où l'on a investi de façon tellement éparpillée qu'on n'a pas vu les fruits".
Dans quel domaine en particulier?
CO: "La recherche scientifique, par exemple, elle est très aléatoire. Les gens très souvent ne sont pas formés à cela, ne perçoivent pas l'intérêt qu'ils pourraient y trouver, n'ont pas toujours les bons interlocuteurs. Ce que l'on propose, c'est d'essayer d'identifier les besoins et voir les opérateurs qui pourraient nous aider à les traiter. Mais on va être aussi capables de mutualiser ces moyens. Au lieu de donner un peu d'argent à chacun, pour que chacun fasse ce qu'il veut de son côté, on va mettre beaucoup d'argent au même endroit, et on va mutualiser cet investissement pour qu'il soit rationalisé et efficace".
En quoi votre relation avec les fédérations sera différente?
CO: "Jusqu'à maintenant les fédérations avaient une relation administrative avec le ministère, on ne faisait pas vraiment d'évaluation. Et en gros l'année d'après, qu'ils aient réussi ou pas, on leur donnait la même subvention. Il faut avoir le courage d'identifier les moyens nécessaires mais aussi d'identifier ce qui a peut-être généré le manque de résultats. Mes référents auprès des fédérations rendront des comptes quand ça ne marchera pas. Notre structure n'a pas vocation à faire à la place des autres. Les fédérations gardent toute leur autonomie, les directeurs techniques nationaux (DTN) restent les animateurs de leur projet de performance. On essaie juste d'identifier ce qui parfois a participé à faire perdre, ou à limiter l'efficacité."
Allez-vous faire des choix drastiques dans les subventions aux fédérations?
CO: "On veut accompagner, apporter des solutions et des moyens. On ne sera ni des Père Noël, ni des Père Fouettard. Ce qu'on voit dans les fédérations, c'est la difficulté à faire des choix, parce que vous faites des mécontents. Ce qu'on va essayer de leur dire, ce n'est pas d'enlever des moyens, mais plutôt que mettre des moyens sur une équipe pour être 25e mondial, en mettre beaucoup plus à l'étape précédente (...) Parfois il faut beaucoup plus investir dans le développement de la pratique, pour qu'à terme on ait un socle pour le haut niveau."
Le budget de 90 millions d'euros pour le haut niveau au sein de la future agence est-il suffisant?
CO: "On va être sur 20 à 25% d'augmentation des moyens destinés au haut niveau. C'est conséquent. Le sport français a de l'argent pour bien fonctionner, il lui appartient ensuite de créer une forme d'indépendance progressivement pour être capable d'aller chercher les moyens dans d'autres périmètres, notamment le monde de l'entreprise."
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.