Championnats d'Europe d'athlétisme : Les raisons d'une annulation
Cela devait être la fête de l'athlétisme. Cela devait également être un bel échauffement en vue des Jeux olympiques de Paris 2024. Mais il n'en sera rien. "Notre volonté a été de maintenir jusqu'au bout cette manifestation", soutenait André Giraud, président de la Fédération française d'athlétisme, quelques minutes après l'annonce. "On doit tous avoir le sens de la responsabilité pour faire venir à Paris des athlètes, des délégations, des journalistes, des spectateurs. Il y avait un risque sanitaire, et on ne voulait pas prendre cette responsabilité", résumait à ses côtés, Jean Gracia, le président du Comité d'organisation.
Pourquoi une annulation et pas un report ?
"Au départ de cette mauvaise aventure, on a travaillé sur les trois possibilités : le maintien, le report, l'annulation", expliquait Jean Gracia. "Ces derniers jours, on s'est rendu compte que le report n'était pas jouable, car il n'y a aucune garantie qu'en 2021, tout se passe parfaitement. Quand on voit les doutes émis pour la tenue des JO..." Autre argument allant à l'encontre d'un report : les équipes constituées pour cette année, avec des contrats sur une durée précise, n'auraient pas pu poursuivre en totalité leur action jusqu'en 2021. "On aurait perdu tout le bénéfice de ces mois de travail en étant obligés de former de nouvelles personnes", ajoute le président du Comité d'organisation. Et l'aspect économique, bien évidemment, pèse énormément dans ce choix : "On va aborder une situation économique catastrophique, difficile à surmonter. Comment imaginer que nous soyons la priorité dans les ménages ?"
Pourquoi le maintien était impossible ?
Au-delà de la crise du Covid-19, des actuelles contraintes du confinement et des interdictions de rassemblement qui courent (pour l'instant) jusqu'à la mi-juillet, André Giraud assure que les services de l'Etat n'ont pas fait pression pour aboutir à cette décision. Maintenir ces championnats d'Europe revenait à prendre "un très gros risque financier". Car "personne ne peut assurer qu'on aurait réussi à faire ces championnats."
Le huis clos aurait-il pu permettre de limiter les risques ? "La moindre demi journée de compétition, c'est 1000 personnes dans le stade. Ce n'est pas possible de respecter les gestes barrières, à moins d'un surcoût qu'on ne pouvait pas assumer." Ce surcoût a été chiffré par les organisateurs : "3 millions d'euros sur un budget de 18 millions d'euros", estime Jean Gracia. Dans le détail, ils ont cherché toutes sortes de solutions. Au lieu de recevoir les délégations à la cité universitaire, avec un accès à la cantine pour 2000 personnes, ils ont imaginé des hôtels, au nombre de 7, pour répartir les délégations. Un budget plus onéreux, surtout que ce déplacement contraignait alors les organisateurs à mettre sur pied des navettes de bus, alors que la cité universitaire permettait aux participants de venir au stade à pied. Encore des sous en plus. Plus les masques, les mesures de quarantaine prises en cas de cas positif dans une équipe... "La moitié des places du samedi et du dimanche avaient déjà été vendues. Pour appliquer les mesures barrières, il aurait fallu arrêter la vente à ce stade", affirmait Jean Gracia.
En stoppant la machine, les organisateurs assurent qu'il n'y aura pas de déficit, qui aurait alors été légué par le Comité d'organisation à la FFA. "Les trois budgets sur lesquels on travaillait ces dernières semaines, en fonction des différents scénarios, sont tous à l'équilibre", affirme André Giraud, le président de la Fédération. "Comme toutes les manifestations en France, l'Etat a assuré que les lignes budgétaires votées seraient maintenues." Et après, malgré l'annulation, le "manque à gagner pour certains partenaires qui vont nous pénaliser", la balance s'équilibre puisque, dans le malheur des annulations multiples, les stages et autres championnats sont tous annulés. Soit autant d'argent à ne pas sortir finalement de sa poche.
Pourquoi l'annoncer maintenant ?
"On ne pouvait plus attendre, par respect pour les athlètes". La phrase d'André Giraud est claire. "Les experts disent que pour sortir de cette phase, il faut 12 semaines de ré-athlétisation pour revenir au niveau pour les sportifs. On était à la limite." Et puis, il y a aussi tous les volontaires (1400 au total dont 190 membres du jury), dont la sélection venait de s'achever et qui auraient dû se retrouver au lendemain du meeting de Paris-Saint-Denis, le 14 juin, pour la première session de formation. Pas de meeting, pas de rassemblement, rien.
Alors que les athlètes désiraient ardemment participer à cette compétition, qui aurait été le signe de la fin de la pandémie du Covid-19, le spectre de la saison blanche se rapproche. André Giraud l'assure pourtant : "On travaille sur plusieurs scénarios pour organiser les championnats de France, dans toutes les catégories, avec différentes dates possibles." Avec également l'espoir d'accueillir en France, une autre compétition européenne d'athlétisme avant Paris 2024.
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