Ça s'est passé un 31 mai 2014 : Jonny Wilkinson faisait ses adieux au rugby sur un titre de champion de France
Sa couronne européenne conservée, c’est le plein de confiance que le RCT, emmené par Jonny Wilkinson, avance vers un doublé historique. Pour la dernière fois, le capitaine des champions d’Europe va chausser les crampons avec un seul et unique objectif : s’offrir le dernier titre manquant au palmarès de son immense carrière. Dans un Stade de France majoritairement acquis à la cause du muguet, les Rouge et Noir vont écrire l’une des plus belles pages de l’histoire de leur club en décrochant au terme d’une finale âprement disputée, le premier Bouclier de Brennus du RCT depuis 22 ans.
L’expérience des années précédentes
À la 10e minutes, alors que le RCT semble dominer ce début de rencontre, les supporters tentent d’entamer un God Save the Queen en hommage au héros du soir. Pourtant l’impensable se produit ! Sur l’une de ses premières incursions dans le camp des hommes de Bernard Laporte, le CO inscrit un essai par l’intermédiaire de Max Evans, après une remontée de près de 80 mètres. À cet instant, tout le peuple varois craint de revivre le même scénario que celui de l’an passé (ndlr : à la sirène, Rory Kockott, le demi de mêlée castrais, surgissait et s’en allait inscrire, juste avant la mi-temps, l’essai qui crucifia les Toulonnais).
Cette fois, l’histoire sera différente. Pour son dernier combat, Wilkinson se payera le luxe d’inscrire la quasi-totalité des points (15) de son équipe. Toulon maîtrisera la rencontre et s’imposera 18-10 sur une ultime pénalité de 50 mètres de Delon Armitage. Comme un symbole, Jonny le gaucher inscrira pour la 3e fois en trois matches, un drop du pied droit, à l’image de celui qui offrit le titre mondial à l’Angleterre en 2003.
Jonny Roi de France
Toulon est donc sacré champion de France 2014 et à peine le coup de sifflet final donné, c’est vers Jonny Wilkinson que tout le squad toulonnais se rue. Mathieu Bastareaud, l’ancien numéro 13 du RCT, se remémore cette finale avec une certaine émotion : "C’est comme si c’était écrit... On avait remporté la Coupe d’Europe la semaine d’avant et ça faisait 2 ans qu’on perdait en finale (ndlr : contre Toulouse en 2012 et contre Castres en 2013) donc on avait ce sentiment qu’il fallait lui donner un super happy end et ça a été la finale."
Comme trop peu souvent, le numéro 10 exulte et laisse éclater sa joie. Les bras levés, le métronome anglais peut savourer, enlacé par Bastareaud et consort, cette consécration ultime. Pour Bernard Laporte, l’issue de la rencontre ne pouvait être différente : "C’était une victoire indispensable, il ne lui manquait que le Bouclier et il fallait qu’il parte en ayant tout gagné ! Ça a été mon levier de motivation toute la semaine." avant que Bastareaud ne poursuive : "Il voulait gagner le championnat pour nous, pour le club, la ville de Toulon et les supporters. Il savait qu’il avait laissé une trace indélébile, mais le Bouclier n’était pas revenu sur la rade depuis 22 ans. Pour lui c’était comme un cadeau d’adieu."
Que ça soit dans les bras de son épouse, avec ses coéquipiers ou ses adversaires du soir, Sir Jonny semble avoir du mal à réaliser (ndlr : seul Toulouse avait réalisé pareil doublé, en 1996, remportant une coupe d’Europe disputée sans les clubs anglais). "La légende veut que les Anglo-saxons soient moins sentimentaux que les latins mais ce n’est pas vrai. Ce sont des hommes avant tout et chez l’homme, il y a de l’émotion. Je crois que les émotions de Jonny sont sorties car il avait à cœur de gagner ce championnat." ajoute Laporte. Sous les étoiles de Saint Denis, l’Anglais est couronné roi de France. Accompagné par Matt Giteau et Drew Mitchell, Jonny Wilkinson soulève le 4e Brennus de l’histoire du Rugby Club Toulonnais et s’en va en héros.
Toulon, un pari réussi
Alors qu’on le disait perdu pour le rugby, Wilkinson avait tenté le pari de se relancer dans le sud de la France. À l’intersaison 2009, il pose ses valises en Provence et ne la quittera qu’à la fin de sa carrière. En l’espace de 5 saisons, l’ouvreur à plus de mille points avec le maillot du XV de la Rose redevient celui qu’il était. En 141 matchs, il inscrira la bagatelle de 1881 points et garnira son armoire à trophées de trois nouveaux titres : 2 H-Cup et 1 Brennus. À cela, il faut ajouter 4 autres finales disputées et quelques coups d’éclats comme le quart de finale et la demi finale de coupe d’Europe en 2013 où Wilko inscrit tous les points de son équipe.
Celui qui a tenté ce pari fou, Mourad Boudjellal, n’a pourtant jamais douté des capacités de son joueur. "Wilkinson ça voulait dire quelque chose, c’est quasiment mythique. Quand je l’avais rencontré, il m’a donné l’impression de tout sauf d’un joueur fini. Je n’ai pas vu un mec qui doutait donc je me suis dit qu’il fallait tenter le coup… S’il revenait à son niveau, ça allait être monstrueux !" Un coup de poker qui s’avère donc payant dès les premières foulées du phénomène sur la pelouse de Mayol. "Quand il s’est entrainé pour la première fois, j’ai été voir le préparateur physique qui m’a dit qu’il avait des stats au dessus de tout le monde ! C’était Jonny et les autres… Il a apporté la notion de la gagne, du travail et du professionnalisme. Quand vous signez avec lui, il ne vous donne pas uniquement ses horaires de boulot, mais toute sa vie !" ajoute l'ancien président du RCT.
Le bouclier levé, Jonny Wilkinson déclarera avec son humilité légendaire : "Ce n’est pas souvent que j’ai l’occasion de soulever de grands trophées mais cette saison, j’ai été très privilégié d’être avec cette équipe. Lever le bouclier c’est vraiment un grand plaisir et le faire avec cette équipe est un souvenir que je vais garder toute ma vie." Si Jonny Wilkinson s’en va au sommet de son art, il laissera derrière lui, une trace indélébile dans le cœur de tous les supporters qui peuvent entonner, sans entrave, l’hymne national anglais. "C’était un truc de malade ! Personne ne l’avait fait avant et je pense que personne ne le refera. Ça montre le joueur et l’homme qu’il était et à quel point il a marqué les esprits", conclut Bastareaud.
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