De Téhéran à Royan, la boxeuse Sadaf Khadem combat pour la première fois sur un ring
Sadaf Khadem n'en revient pas. La jeune Iranienne découvre, gants de boxe bleus à peine enlevés, sa licence sportive: "ça y est, je suis une boxeuse amateure!". Elle va pouvoir enfin livrer samedi son premier combat officiel, lors d'un court séjour en France.
"C'est historique! C'est le premier combat d'une Iranienne qui est validé, enregistré avec des vrais arbitres par une fédération nationale. C'est le premier combat officiel d'une Iranienne" en boxe anglaise, assure Mahyar Monshipour, en charge de l'organisation.
Sous la pression du CIO
Dans un gymnase de Royan (Charente-Maritime) où aura lieu la rencontre samedi, l'ancien champion du monde de boxe coache sa protégée, rencontrée en 2017 en Iran lors d'un entraînement. La jeune femme de 24 ans le recontacte il y a quelques mois, elle en a assez de s'entraîner et veut boxer. "L'idée est venue quand le CIO (Comité international olympique), a sommé les pays, qui ne rendaient pas tous les sports mixtes, à les rendre mixtes dans leur pays sous peine d'exclusion des équipes masculines des Jeux olympiques", explique Monshipour.
La Fédération française de boxe et le ministère des Sports ont alors joué le jeu en donnant les autorisations nécessaires "car elle n'est pas résidente en France et elle n'est pas française", précise ce conseiller technique au ministère des Sports, impressionné par le mental de la jeune femme.
La réalisation d'un rêve
Samedi, Sadaf va réaliser son rêve: boxer devant un public. Trois reprises pour tenter de battre la Française Anne Chauvin. Trois ans qu'elle attendait ce moment. Cette débutante dit l'appréhender sans peur, même si son adversaire est plus expérimentée avec quatre combats à son actif. "Je veux me produire le mieux possible, montrer les coups et enchaînements que j'ai appris", assure la boxeuse, dont le farsi est traduit par son coach. "C'est une guerrière. Elle a progressé techniquement depuis qu'elle est arrivée" le 6 avril, observe l'ancien champion franco-iranien.
En France, elle découvre "des gens très chaleureux". "Je ne m'attendais vraiment pas à ça, je suis agréablement surprise", remarque la jeune femme qui enchaîne entraînements et interviews, un emballement médiatique dont elle est la première surprise. Elle rencontre avec émotion des athlètes de haut niveau comme le vice-champion olympique Sofiane Oumiha.
Une entrée dans le monde des grands dont cette prof de fitness à Téhéran est peu habituée. Il y a trois ans, elle se met à la boxe après avoir vécu "un moment difficile", dans un pays où il est interdit de s'entraîner avec des hommes et de participer à des compétitions de boxe.
"Je donne des cours en journée et pendant mes moments de libre, je m'entraîne cinq à six fois par semaine, soit de la course à pied, soit des entraînements de boxe", explique-t-elle.
"Aller le plus loin possible"
Le manque de femmes qualifiées pour entraîner les boxeuses n'est pas sans rappeler la situation vécue dans de nombreux pays au début des années 1990 quand les premiers combats de boxe professionnels pour femmes ont été organisés.
Cheveux relevés avec des mèches un peu rouges, le regard concentré, la nouvelle licenciée du club de Royan tape des poings, en short et débardeur, bien décidée à gagner.
"Je veux m'améliorer le plus possible, aller le plus loin possible et montrer la voie aux autres Iraniennes pour qu'elles puissent goûter à ce sport", dans un pays où il y a "un énorme engouement pour les sports de combat", souligne la jeune débutante. A tel point qu'Iran International TV va retransmettre ce match en direct.
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