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Blatter fait sa rentrée

Le président de la Fifa, Joseph Blatter, s'est confié dans un entretien exclusif à l'AFP. Il aborde son mandat, l'arbitrage, les affaires, le Mondial 2014 au Brésil et l'avenir du football.
Article rédigé par Xavier Richard
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6 min
 

Ne tirez plus sur le Brésil

Le Brésil c'est maintenant ! Non, ce n'est pas un slogan pour le retour de Lula à la présidence brésilienne mais le message en substance de Sepp Blatter sur la Coupe du monde brésilienne de 2014. Selon le président de la Fifa, les feux ne sont plus rouges mais jaunes et verts. "Ça marche, j'ai vu le rapport technique: il n'y a plus rien dans le rouge, il y a très peu de jaune, beaucoup de vert, ils ont compris qu'ils devaient y aller, a-t-il indiqué. Mais ils auront des problèmes internes: des gens travaillent beaucoup, ça va coûter plus cher que prévu, mais ce sera terminé. Vous imaginez ça, la Coupe du monde de foot au Brésil !" Dès lors, plus question d'exercer la moindre pression sur le comité d'organisation. Pas besoin de créer des tensions où il n'y en a pas. "Les Brésiliens, on ne les rappelle plus à l'ordre, non ça marche. Ce qui a fondamentalement changé, c'est l'introduction d'un membre du gouvernement dans le comité local. On ne peut pas faire une organisation comme la Coupe du monde sans représentant du gouvernement, pour la sécurité, la télécommunication, les satellites, les infrastructures, les routes, trains, avions. Or le comité d'organisation avait dit non jusque là", a-t-il détaillé.

Coupe du Monde-JO, rien ne change

Vitrine du football, la Coupe du monde a trouvé la bonne formule selon le président Blatter. Et le bon nombre en passant à 32 équipes. Un maximum même. "C'est le maximum, 32, c'est une formule mathématique parfaite, explique Blatter. On avait des  formules avec 24 pays, mais il fallait qualifier les 2e de groupes, meilleurs  3e ensuite... non... c'est clair avec 32, pas plus. Ça fait un mois, c'est déjà  beaucoup". Concernant l'organisation, le duo Corée-Japon est encore dans la tête de Jopesh Blatter. Une mauvaise expérience qui ne sera pas reproduite sous sa présidence. "On a vu la difficulté qu'on avait, à organiser le Mondial dans deux pays en 2002, qui n'avaient pas le même système, ni la même langue. L'Euro 2012 était aussi compliqué avec deux pays voisins, mais qui ne sont pas  les mêmes (Ukraine et Pologne), alors aller dans 30 pays, je ne vois pas où est le rationnel là dedans", a lâché Blatter en réponse à l'idée de Platini de faire un Euro dans toutes les capitales européennes. Blatter a ensuite défendu le football aux JO et la domination des nations non-européennes. "Le foot aux jeux Olympiques, c'est important pour les nations  non-européennes. A la Coupe du monde, il y a 13 équipes européennes. C'est la  loi des grands nombres, il est impossible d'éviter des Européens en demi-finale  ou en finale. Par contre là, l'Europe n'a que 4 équipes sur 16 aux JO. Tout à  coup, il n'y a plus de différences de qualité", a-t-il insisté, précisant que les Européens comme l'Espagne s'étaient pourtant préparés pour gagner une médaille.

Video et triple peine

Sujet extrêmement sensible, l'arbitrage demeure une des priorités de la Fifa. Sur la vidéo, la mise en place d'un système sur la ligne de but se poursuit et sera effectif dès cet hiver à la Coupe du  monde des clubs avant une extension à la Coupe des Confédérations (été prochain), puis  à la Coupe du monde en 2014. "Je ne pense pas que c'est une révolution. C'est une aide à l'arbitre", a souligné le dirigeant suisse. En revanche, Blatter plaide pour une professionnalisation des arbitres et une meilleure pédagogie. "Il y a un côté psychologique, si un arbitre est professionnel. Il l'est comme le joueur, l'entraîneur, ce n'est pas +un envoyé du bon dieu+, qui, peut, un jour, ne plus être arbitre". Si la Fifa n'est pas en charge des lois du jeu, elle est favorable à la suppression de la règle dite de la double peine (penalty et carton rouge, ndlr). "Carton rouge, expulsion, penalty et suspension, c'est même la quadruple peine !", dénonce-t-il. C'est au Board, instance garante des lois du jeu, qui a ouvert le dossier, d'en décider ou pas. Les fautes "sont les mêmes sur toute la surface du jeu: s'il y a une faute dans les 16 mètres, si ça vaut jaune, l'arbitre doit donner jaune, pas rouge",  enchaîne-t-il.

Le point sur les affaires

Pendant son passage à la plus haute instance du football mondial, Joseph Blatter n'aura pas été épargné par les affaires et les soupçons de corruption. Il s'en défend avec virulence et avance avoir ouvert tous les dossiers aux différents enquêteurs. "Des journalistes soit-disant d'investigation étaient persuadés que mon nom figurait sur les reçus d'argent (Blatter est suspecté d'avoir couvert des pots de vin, ndlr). Mais là ils pouvaient aller chercher longtemps. Jamais, jamais. J'aurais honte dans un cas comme cela. Il faut arrêter avec cela. Là dessus c'est maintenant l'affaire du juge instructeur (du comité d'éthique de la Fifa, Michael Garcia, ndlr) qui doit voir ce qu'il y a dans ce dossier et de voir ce qui est vrai ou pas vrai". Les attributions des Mondiaux 2006, 2018 et 2022 sont eux aussi sujets à suspicion. Blatter ne se sent pas du tout visé et propose à qui le veut d'ouvrir tous ses dossiers.

Blatter va passer la main

Dans son entretien à l'AFP, Blatter évoque également son mandat et sa probable non représentation. "Cela fera 40 ans (à divers postes) que je suis à la Fifa et après 40 ans je crois quand même qu'on arrivera à trouver quelqu'un qui peut reprendre le flambeau de la Fifa. Mais j'aimerais bien que celui qui reprend continue de penser que le football est pour tous et pas seulement pour les riches, ça c'est important." Son dernier mandat, le Suisse aimerait le terminer sans fracas. "Mais laissez-moi finir mon dernier mandat ! J'aimerais bien finir mon travail à la Fifa, qui n'est pas aussi mauvaise qu'elle n'est présentée dans certains médias et certaines régions du monde. Si vous regardez la carte géographique, l'Europe n'est pas très grande. Et puis il ne faut pas oublier que les deux-tiers de la population mondiale vit en Asie". Sur la transparence, l'ouverture et la modernisation du football, Blatter reste confiant avant de passer la main. "Si je ne remets pas la Fifa sur les bons rails, alors j'aurais failli. Mais je suis certain que j'y arriverai" Quant à sa succession, il voit en Michel Platini un candidat crédible. "C'était mon disciple. Je pense que quand il fera le saut de la confédération (UEFA) à la présidence (Fifa), il faudra voir le football dans une autre dimension. C'est beaucoup plus facile de diriger l'UEFA qui est riche, qui a tout, c'est dans un fauteuil. Bien sûr c'est un bon successeur possible".

Les propos ont été recueillis par Philippe GRÉLARD et Yacine LEFORESTIER de l'AFP

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