Les New York Knicks, les sous-doués de la NBA
C'est l'histoire d'une équipe en crise depuis quinze ans, avec un président parano, des joueurs surpayés, des VIP maltraités et une mairie hostile.
Woody Allen ne s'assiéra plus dans le carré VIP du Madison Square Garden pour soutenir les New York Knicks. Dimanche 25 novembre, il s'en est fait refouler. Décision du patron de l'équipe, James Dolan, un patron de chaînes câblées milliardaire. Le tort du réalisateur de Manhattan ? Avoir refusé de faire la promotion d'une des chaînes de Dolan. Cet impair renforce la réputation de club ingérable de la franchise new-yorkaise de la NBA. Et le dossier est lourd, très lourd.
C'est la faute du patron excentrique et parano
James Dolan, qui a hérité du groupe audiovisuel de son père, a pris en main le club en 1999. A l'époque, les Knicks sont l'une des équipes les plus prometteuses de la NBA, et viennent d'être battus en finale par les San Antonio Spurs. Depuis, en quatorze ans de règne, les Knicks n'ont jamais fait mieux que le premier tour des play-off, tout en maintenant une masse salariale énorme. Cherchez l'erreur…
Quand le New York Post (en anglais) lui demande, début novembre, pour sa première interview depuis sept ans, s'il se considère comme un bon patron, Dolan répond : "Oui, bien sûr." Pourtant, des doutes subsistent. Un ancien salarié parle, dans Sports Illustrated (en anglais), du "règne de la peur" au Madison Square Garden, avec des salariés qui cherchent à plaire au patron plutôt qu'à faire leur travail. Le vice-président de la sécurité du stade, viré après que Dolan eut découvert une valise abandonnée près de son siège, en 2004, résume : "Soit on lui obéit sans discuter, soit c'est la porte." Colérique, le patron ? "J'ai arrêté de fumer, je crois que ça a empiré les choses", se justifie-t-il, dans Sports Illustrated. C'était en 2007. WoodyAllen est bien placé pour savoir que ça n'a pas changé.
Finalement, ce que James Dolan fait le mieux, c'est du folk-rock. Son groupe JD & the Straight Shot produit des chansons tout à fait correctes. Il se murmure que, du côté des supporters des Knicks, on espère que les ventes d'albums décollent, histoire que Dolan arrête de s'intéresser au basket. Une pétition a même été lancée, mercredi 27 novembre, sur le site de la Maison Blanche, pour le mettre à la porte.
C'est la faute de l'ex-entraîneur, l'homme le plus haï de New York
Isiah Thomas a été un grand joueur de l'histoire de la NBA, mais comme entraîneur, son nom restera associé aux plus mauvais transferts des New York Knicks. Un exemple : c'est lui qui a fait signer en 2005 Eddy Curry, joueur dont les problèmes cardiaques étaient connus. Résultat : entre 2008 et 2010, il joue dix matchs (sur 160 possibles), se fait soigner le reste du temps, et empoche un chèque de 19 millions de dollars. Dans une interview donnée après son départ, Thomas a avoué sur ESPN que Curry avait été engagé car il était proche de la superstar LeBron James, et que sa présence pouvait pousser "LBJ" à s'engager avec New York. Raté : LeBron James choisit à l'époque de rester à Cleveland.
Pour ne rien arranger, Isiah Thomas a été condamné pour harcèlement sexuel… sur la vice-présidente du club, en 2007. "C'est infondé", s'est-il défendu. "C'est infondé", l'a soutenu son président, qui a remercié la salariée. Devant la justice, Thomas a été reconnu coupable, mais ce sont les Knicks qui ont dû payer 10 millions d'euros d'indemnités à la jeune femme.
La fin de son règne aux New York Knicks est particulièrement pénible : "Peu importe la salle où on jouait, les gens le sifflaient, se souvient un de ses joueurs, Malik Rose, dans Sports Illustrated. Mais qu'est-ce qu'il a fait ? Il a tué le pape ou quoi ?" La détestation est telle que les supporters des Knicks scandent tous les soirs sous ses fenêtres : "Thomas démission !" Ce qui finit par arriver, en 2008.
C'est la faute des joueurs, qui se battent contre des extincteurs
Les choses n'ont pas tellement changé depuis l'époque d'Isiah Thomas. L'actuel entraîneur, Mike Woodson, est sur un siège éjectable. Il est de notoriété publique que le club courtise son remplaçant. Pendant ce temps, le club paie deux joueurs à ne pas jouer, et un autre, Chris Smith, uniquement parce qu'il est le frère d'un titulaire, remarque Sports Illustrated. Ils sont certes de la même famille, mais ne partagent pas le même talent. Malheureusement, même le frère titulaire a le moral dans les chaussettes : "Vous dites que c’est trop tôt pour paniquer mais moi, personnellement, je panique", a déclaré JR Smith après le départ calamiteux des Knicks, qui visaient le titre. Une ambition à conjuguer au passé.
Il faut dire que les quelques stars de l'équipe ne sont pas à la hauteur. Notamment Amar'e Stoudemire, dont les statistiques déclinent avec les années. Son principal fait d'armes l'année dernière : s'être fracturé la main en tapant sur un extincteur, dans les vestiaires.
C'est bientôt la faute des pom-pom girls
James Dolan a trouvé un nouveau bouc-émissaire. Le président du club pense que les pom-pom girls qui dansent lors des temps morts empêchent les joueurs de se concentrer, affirme le New York Daily News (en anglais). D'après lui, elles sont aussi un rien ringardes avec leurs chorés vues et revues. "Elles dansent et ne récoltent aucun applaudissement, remarque Dolan dans son interview au New York Post. Il va falloir revoir tout ça, pourquoi pas imaginer des choses proches de ce qui se fait à Broadway. En tout cas, ce ne sera plus des cheerleaders classiques."
C'est peut-être la salle qui est maudite, en fait ?
Les New York Knicks sont au moins premiers dans un domaine en NBA : le prix des places, 91 euros en moyenne, note le blog Off the dribble (en anglais). Soit deux fois la moyenne du championnat. Justification : le Madison Square Garden flambant neuf payé par James Dolan près d'un milliard de dollars. L'argent est passé, entre autres, dans une liste impressionnante de restaurants et dans des sièges accrochés au plafond de la salle pour surplomber le terrain. Les Knicks n'en profiteront peut-être pas longtemps : la mairie de New York lorgne la salle, pour rénover la station de métro située juste en-dessous. Et la nouvelle équipe municipale peut leur demander de vider les lieux dans dix ans, note le New York Times.
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