Hervé Poncharal : "On fait tous la danse du soleil"
Q : Dovizioso 3e et Crutchlow 5e, une belle séance pour Monster Yamaha Tech 3
R : « Ça a été une séance très difficile car on a eu les trois premières séances sèches où on a fait un super boulot (2e et 3e à lissue du libre 3). Quand on a vu laverse une petite heure avant la qualif, on sest dit que ça allait être compliqué. On est parti en début de séance avec des pneus mouillés qui se sont détruits rapidement. La piste a bien séché et heureusement pour le show, on a fini le dernier quart dheure en slicks. Nos deux pilotes se sont tout de suite sentis à laide. Andrea (Dovizioso) sest hissé en haut du classement à dix minutes de la fin. Il a eu un petit doute sur la moto à deux tours de la fin et est rentré au box pour vérifier. Tout allait bien mais il a un peu de regret car il pense quil pouvait mieux que son 3e temps. Cal (Crutchlow) est tout près derrière, à quelques millièmes. On est très heureux de se retrouver en première les Monster Yamaha au GP Monster et de montrer quon est plus que dans le coup. Après, on se gratte tous un peu la tête, on fait tous la danse du soleil pour demain car les conditions sont incertaines. »
Q : Vos deux motos encadrent même Jorge Lorenzo sur une Yamaha officielle
R : « Cest vrai mais de toute façon on fait partie de la grande famille Yamaha donc ce nest pas un souci. Depuis le début de la saison, on est fier de pouvoir se battre avec eux et parfois les dépasser. Cétait déjà le cas à Estoril et cest bon pour le moral de léquipe. Ça prouve à Yamaha quils ont raison de nous donner du bon matériel. Je crois quon lutilise correctement et quon porte haut leurs couleurs. »
Q : Cest dailleurs votre plus beau début de saison dans la catégorie reine
R : « Sans équivoque. Par rapport à la performance des meilleurs pilotes et par rapport à lhomogénéité de léquipe. Nos deux pilotes ne se lâchent pas dune semelle. Ce nest pas très bon pour mon cur de les voir si près lun de lautre car on a toujours tendance à penser quil y a en un qui ira trop loin. On nest quà la veille de la quatrième épreuve mais on est confiant de continuer comme ça par la suite. »
Q : Cest une vraie chance de disposer dune équipe homogène, à la différence de lan dernier avec un Colin Edwards moins performant
R : « On a eu avec Colin une aventure de quatre ans qui a été super. On a fait des premières lignes, des poles positions, des podiums donc je ne vais pas dénigrer mon ancien pilote. Lan dernier, il avait trente-huit ans et il était sur une phase qui commençait à être descendante. On la remplacé par Andrea Dovizioso qui est troisième mondial dans la hiérarchie 2011. Il a 26 ans. Cest évident quon a gagné au change. En plus il se sent très très à laise dans lécurie Monster Tech 3 et sur la Yamaha. Après une année dapprentissage (le motoGP, certains circuits, pneus Bridgestone, freins carbone), Cal Crutchlow a très bien digéré ça pendant lhiver. Cette année on se retrouve avec un pilote qui a le même nom mais qui a une personnalité complètement différente. »
Q : Ce nest pas un peu frustrant de former dexcellentes pilotes et de les voir partir régulièrement ?
R : « On connaît la règle du jeu. Cest un peu notre mission avec Yamaha. Nous sommes une sorte de team junior. On teste les jeunes pilotes qui arrivent dautres disciplines ou dautres classes et sil ça se passe bien comme avec Ben Spies, ils peuvent être transférés dans le team officiel. Quand on a des bons pilotes avec un gros potentiel, on a envie quils progressent. Et sils peuvent progresser plus dans une structure officielle qui a plus de moyens que nous, on ne peut quêtre content pour eux. Ça fait partie du jeu et je ne suis pas du tout amer. Le départ de Casey Stoner va redistribuer toutes les cartes. Nos pilotes qui étaient donnés « restant » chez Tech 3 vont être sollicités par dautres écuries. On entend déjà parler de Dovi dans le team officiel Yamaha ou Crutchlow chez Ducati
On verra bien. Pour linstant, on profite de linstant présent et on croque dans la pomme. »
Q : Votre travail comme équipe satellite dun constructeur est un exemple à suivre pour léconomie du MotoGP
R : « Un jour le big boss de Yamaha, Masao Furusawa, celui qui a permis cette formidable aventure avec Valentino Rossi, disait toujours quil ny avait pas deux officielles et deux satellites mais quatre Yamaha. Ça faisait du bien à entendre et il le prouve en nous équipant comme il le fait. Cette année, on est léquipe privée la plus performante et on espère que ça va durer. »
Q : Ces beaux résultats, cest un nouveau coup boost après tant dannées en MotoGP ?
R : « On est la plus vieille équipe du plateau des MotoGP. 23 ans. On a su se faufiler entre les gouttes et les chicanes de la vie pour continuer à exister. Mais la passion nest jamais partie et moi je vibre toujours autant. Tout à lheure quand jai vu mes pilotes premier et deuxième au milieu de la séance, javais les poils qui se dressaient sur les bras. Ce nest pas un métier quon peut faire comme un métier normal. Il faut avoir la passion car il y a beaucoup de choses à gérer. On doit prendre des risques. Les pilotes le font sur la piste et nous au niveau du business. Ça devient de plus en plus compliqué dans un contexte économique difficile. »
Q : Lannonce du départ de Casey Stoner en fin de saison est-elle une bonne ou une mauvaise nouvelle pour la moto ?
R : « Casey Stoner, cest le patron du championnat ! Il est le plus doué de la génération actuelle. Pour moi, cest très -couillu- de prendre la décision darrêter au sommet alors quon peut y rester encore plusieurs saisons. Aujourdhui, lactualité est grise. Cest la crise, le chômage. Tout le monde est calculateur, sur la réserve. Tout le monde la joue petit bras. Et voir quelquun qui a les tripes de dire -jai un contrat de plusieurs millions deuros qui mattend avec beaucoup de victoires voire de titres à la clé à 26 ans mais jai envie dune vie différente- cest beau. Quelque part, cest romantique. Ca apporte un peu de fraîcheur dans un monde triste. Dun autre côté, comme le chat ne sera plus là, les autres souris vont se mettre à danser. Ce départ ouvre toutes les opportunités possibles, y compris celle de voir nos pilotes approchés par dautres teams. Mais cest la vie et je veux que le MotoGP soit un truc marrant. Quil se passe des choses. Les transferts intéressent toujours les médias et les fans donc on ne va pas se plaindre quil se passe des choses en MotoGP. »
Q : Un podium demain serait le bienvenu ?
R : « Ce nest pas une obsession. On en a déjà fait. Cest sur que ce serait un rêve den faire un demain. Si on a une piste sèche, on a une chance. Sur du mouillé aussi mais cest tellement la loterie. En tout cas, on serait déçu de ne pas se battre dans le top 5. »
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