Usain Bolt, le saut dans l’inconnu ?
Douze courses en 2008, année de son triplé olympique à Pékin. Dix en 2009, année de son triplé mondial à Berlin. Sept en 2012, année de son deuxième triplé olympique à Londres. Six en 2013, année de son deuxième triplé mondial à Moscou. Les statistiques d’Usain Bolt montrent clairement qu’il court moins que dans sa jeunesse. Mais ses sacres aux grands championnats ont toujours été précédés de nombreuses courses. Or, cette année, il n’a participé qu’à deux 100m : à Rio de Janeiro, en avril sur une piste trempée (10"12), et à Londres, en juillet dans la fraîcheur (9"87). Les conditions étaient loin d’être idéales. Mais les temps sont loin de son record du monde à 9"58 (établi lors des Mondiaux de Berlin).
Après cette course, le Jamaïquain affichait sa confiance : "Je sais où j'en suis et j'aurai deux tours à Pékin avant la finale pour me régler", assurait "La Foudre" dans un entretien à L’Equipe. "Aux Mondiaux, je ne m'inquiète pas. Je sais que je suis toujours à mon meilleur en championnat." A deux jours de son entrée en lice, il disait en conférence de presse: "Je me suis entraîné dur ces dernières semaines pour être au mieux de ma forme pour la défense des titres. Mon coach (Glen Mills) est content et c'est important, parce que quand il est content cela signifie que je suis dans une bonne condition". Le problème, c’est qu’il sort de deux années marquées par les blessures et par des sorties en compétition au compte-gouttes. S’il n’a jamais aussi peu couru avant un grand championnat, en 2011, il n’avait couru que quatre fois avant les Mondiaux à Daegu. Et en Corée, il avait connu son seul échec, retentissant, en étant disqualifié en finale pour un faux départ.
Gatlin, son plus grand danger
Ce rappel devrait suffire au Jamaïquain pour éviter pareille mésaventure à Pékin, d’autant que les règles du faux-départ ont évolué depuis 2011. Mais le plus grand danger réside peut-être ailleurs. Justin Gatlin a accumulé les bons temps et les bonnes performances cette année. A 33 ans, après deux suspensions pour dopage (dont entre 2006 et 2010), il n’a jamais couru aussi vite (9"74). Et surtout, il n’a jamais été aussi constant : quatre courses en 9"7. C’est de lui que vient le danger. Contrôlé par l’Agence américaine antidopage (USADA) à 59 reprises depuis son retour à la compétition en 2011 (dont 14 fois en 2014 et 9 fois en 2015), le champion du monde 2005 du 100 et du 200m semble en situation de troubler la référence planétaire.
Au point de faire balbutier Bolt ? "C'est un compétiteur. C'est le genre d'athlète qui élève son niveau en fonction de ses adversaires et de la compétition", balaye Teddy Tamgho, champion du monde du triple saut en 2013 et consultant France Télévisions pour ces Mondiaux. "A Londres, en 2012, il y avait une énorme concurrence, probablement la plus grosse de l'histoire avec Blake, Gay, Gatlin. Mais il n'y a pas eu de bagarre. Il a gagné son titre et il est rentré. Même si Gatlin est menaçant, même s'il vient avec un maximum de confiance, je pense que ce sera trop juste pour battre Usain Bolt. Mais il y aura une belle bagarre."
Pour les Chinois, la question ne se pose pas. Le Jamaïquain est une véritable star dans ce pays, où il était devenu triple champion olympique en 2008. Il bénéficiera donc d'un énorme soutien dans le Nid d'oiseau. Preuve de son statut: la station de métro desservant le stade a été mise aux couleurs de Bolt, par son équipementier. "Pékin, c'était là où tout a commencé pour moi. J'ai un grand souvenir du stade et de la ville", a-t-il dit en retour. Aujourd'hui, lors de séries, le maître du 100m aura un message à envoyer à la planète entière.
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