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Rio 216 - Lutte: Zelimkhan Khadjiev, itinéraire d’un joyau en quête d’or

Champion du monde juniors en 2014 et 5e des championnats du monde seniors en 2015, Zelimkhan Khadjiev a tout juste 22 ans, et déjà une sacrée réputation dans la catégorie des -74kg. D’origine Tchétchéne, arrivé en France à 10 ans, ce Niçois d’adoption est l’un des deux représentants français en lutte à Rio. Il aspire à l'or aujourd'hui.
Article rédigé par Thierry Tazé-Bernard
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 4 min
Le Français Zelimkhan Khadjiev lors des Mondiaux 2015 de lutte (PAUL BUCK / EPA)

« La pression, c’est moi qui me la mets. » Zelimkhan Khadjiev a le sourire facile, mais la motivation et la détermination à fleur de peau. « Si d’autres personnes veulent que je gagne, moi je veux encore beaucoup plus qu’eux ». A 22 ans, ses premiers Jeux Olympiques, à Rio, ne l’effraient pas. « Tous les matins, quand je me réveille, avant d’aller faire mon footing, je me regarde et je me dis : Zelim, tu vas aller aux Jeux. J’y pense souvent. Mais je n’aurai pas de pression en plus. » « Même si c’est la plus grande compétition du monde, il est vraiment déterminé à aller chercher la médaille, et pourquoi pas le titre », reconnaît son entraîneur Didier Païs.

Lorsqu’il parle de son élève, le technicien place la détermination au premier rang de ses qualités. « C’est quelqu’un qui est très demandeur, et très à l’écoute. Il est très facile à entraîner », complète-t-il, tout en lui reconnaissant une « irritabilité en état de fatigue. Il a son petit caractère. Parfois, la fin des séances d’entraînement est un peu compliquée à gérer. » Mais il conclut : « Il a vraiment envie d’être champion, de monter sur les podiums. »

De la Tchétchénie à la Baie des Anges

Son parcours personnel explique en partie cette volonté assumée, revendiquée. Né dans un pays en guerre, il a fui avec ses parents le deuxième conflit tchétchéne, pour atterrir à Nice. Avec un bagage particulier : « Je suis né dans la lutte, il n’y avait que ça en Tchétchénie », explique « Zelim ». « Mon entraîneur, là-bas, m’apprenait à être agressif, déterminé. Quand je suis arrivé en France, je ne savais faire que ça. »
La lutte a continué à être son quotidien, même si ses parents ont toujours placé les études avant : « Avant que je sois champion du monde juniors, mes parents voulaient surtout que je fasse de bonnes études, que j’ai de bons diplômes. Car on a quitté la Tchétchénie pour avoir une bonne éducation, un bel avenir », explique-t-il dans un sourire. « Quand je suis devenu champion du monde, ça a changé. » L’obtention du bac professionnel scientifique, électronique et numérique avec mention a également contribué à rendre fière sa famille.

En gagnant son ticket pour Rio lors du championnat du Monde à Las Vegas en 2015, Zelimkhan Khadjiev a fait coup double : réaliser un rêve d’enfant, et se donner du temps. « Chez nous, en Tchétchénie, quand j’étais petit, il y a le lutteur tchétchéne Buvaysar Satiev (triple champion olympique en 1996, 2004 et 2008, sextuple champion du monde entre 1995 et 2005, Ndlr) qui venait de gagner les JO. Tout le monde faisait la fête. J’ai toujours voulu avoir cette médaille », se souvient-il. Avec une 5e place aux championnats du monde en septembre 2015, il s’est offert le luxe d’une année de travail, sans l’épée de Damoclès de la qualification olympique. « C’est un gros avantage de se qualifier un an avant », avoue son entraîneur Didier Païs. « Sa qualification a permis sur des compétitions de chercher des choses, de tester, alors que les adversaires devaient performer ». Un avis partagé par le lutteur : « Je suis jeune. J’ai donc bénéficié de plus de temps pour apprendre, améliorer ma lutte, travailler plus sereinement. Beaucoup ont terminé les tournois de qualification olympique juste deux mois avant, alors que moi j’ai eu la chance de me qualifier directement. » De la chance ou du talent ? « Du travail », répond-il dans un éclat de rire, ajoutant pour qualifier son sport : « C’est la galère. Ca demande beaucoup, beaucoup de travail. »

Un adversaire épié

Zelimkhan Khadjiev a dû en livrer encore plus. Jeune, il est encore perfectible. En plus, il est champion du monde juniors. « Ca marque les esprits, surtout quand il est Français et que c’était la première fois que cela arrivait », reconnaît Didier Païs. « Avec sa qualification lors des Mondiaux, alors qu’il n’avait que 20 ans, c’est encore plus marquant d’autant plus qu’il devait finir sur le podium. Les gens se méfient de lui. Tout le monde est au courant de son niveau, de ce qu’il fait. Dans les sports de combat, les athlètes ont souvent une ou deux prises fortes, mais il faut travailler comment les placer pour que ce soit le moins prévisible possible. » Le Niçois a également constaté un changement sur le tapis : « Depuis mon titre en juniors, mes adversaires ne sont plus pareils. Ils se sont montrés plus agressifs contre moi. Ils sont à bloc lorsqu’ils m’affrontent. Je fais beaucoup plus attention depuis. »

Dans cet océan de compliments, Didier Païs pointe néanmoins un défaut : « Le coca. C’est un gros consommateur, et il est très gourmand. Cela ne pose pas de problème pour son poids, mais sur le plan énergétique, ce n’est pas idéal d’ingurgiter du mauvais sucre. » Zelim en est conscient : « C’est vrai, je mange beaucoup. J’arrive à perdre, mais il faut que je fasse des efforts sur mon alimentation. » Perfectible, Zelimkhan Khadjiev l’est encore. Il est néanmoins à Rio pour l’or : « Je vise l’or car on ne se rappelle que du champion. On ne se souvient jamais du vice-champion olympique ou du troisième. Je rêve de l’or, mais je serai content avec les autres métaux. »

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