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Report des Jeux et aménagement du temps scolaire, le casse-tête des jeunes athlètes

Le report des Jeux de Tokyo 2020 a eu pour conséquence d'étendre la préparation physique des athlètes jusqu'à l'été 2021. Si l'enjeu est déjà primordial pour ceux qui vivent de leur sport, la situation est bien plus complexe pour les jeunes engagés dans un cursus universitaire. Ceux-ci sont dépendants de la capacité d’aménagement des formations et ils doivent constamment quantifier les sacrifices scolaires demandés. Nous vous proposons les témoignages de trois nageurs handisport préparant les Jeux paralympiques de 2021 : ceux d'Anaëlle Roulet, Ugo Didier et Alex Portal.
Article rédigé par Andréa La Perna
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 7min
  (JOS? M?NDEZ / EFE)

Les athlètes sont unanimes : le report des Jeux est décevant mais il était nécessaire. Pour la plupart des sportifs, dont le sport est une composante quasi-essentielle du quotidien, ajouter un nouveau cycle conséquent de préparation ne bouleversera pas l'équilibre de leur univers. C'est une toute autre question pour les jeunes athlètes encore engagés dans un cursus universitaire. Le poids d'une année olympique ou paralympique conduit automatiquement à consentir à des sacrifices sur le temps scolaire.

L'émergence de disparités

"Le report des Jeux risque de pousser certaines personnes à faire deux années consécutives coupées du cursus scolaire", note Sami El Gueddari, directeur sportif de la natation paralympique. D'après l'ex-nageur, des disparités vont émerger très rapidement. "Il est clair que la situation est beaucoup plus facile à gérer quand on étudie au sein d'une grande structure capable d'accueillir un grand nombre de sportifs de haut niveau", explique-t-il.

L'instant est crucial pour les plus jeunes sportifs qu'ils soient valides ou en situation de handicap. Certains n'en sont encore qu'à la douloureuse découverte de Parcoursup, mais la question de la reconversion se pose très tôt pour tous les nageurs. Le décalage du calendrier peut "interrompre l'avancement de son projet de reconversion et on sait qu'un sportif a besoin d'être serein face à son projet de vie", ajoute Sami El Gueddari. Pour mieux comprendre la complexité des situations, focus sur la situation respective de trois nageurs français handisport.

Anaëlle Roulet (24 ans), deuxième année en ergothérapie

► Une deuxième année de cursus sacrifiée ?

J’avais décidé de faire une année de césure pour préparer les Jeux de Tokyo cette année. Comme je dédouble toutes mes années, je devais débuter ma deuxième 2e année à la reprise, en septembre, après les Paralympiques. Le report de l'événement pose problème parce que je me pose des questions pour savoir ce que je fais l’année prochaine. Normalement, mon école n’accepte pas deux années de césure consécutives. J’espère qu’ils feront une exception pour cas exceptionnel. Dans tous les cas, je vais faire la demande parce que c’est l’idéal pour être dans la meilleure forme possible pour les Jeux paralympiques, même si j’aurais perdu deux années d’études. 

Si je reprends les études en septembre, j’aurais beaucoup moins de temps pour m’entraîner. Quand j’ai dû composer avec les deux, je n’étais pas à 100%, que ce soit dans mes études ou dans ma préparation sportive. Normalement, il me reste trois années d’études. C’est vrai que ça me fera finir assez tard (27 ans, ndlr). En même temps, je me dis que je suis assez jeune, mais ça m’embête de perdre encore une année. Et c'est aussi une année de précarité en plus parce que je n'ai pas de sponsors pour 2021..

Alex Portal (18 ans), baccalauréat scientifique

► Un mal pour un bien ?

C’est la période des choix pour l’année prochaine sur Parcoursup. Ils étaient d’ailleurs déjà clôturés avant l’annonce du report des Jeux. Mon premier choix se porte sur une licence en physique-chimie à l’université de Cergy. J’avais eu l’occasion de rencontrer des personnes sur place. On m’avait expliqué qu’il était possible d’aménager mon emploi du temps pour que je puisse concilier la natation et les études, ce qui me permettrait de préparer tranquillement Paris 2024 sur les 2 ou 3 années de licence, tout en continuant à nager à Saint-Germain-en-Laye. A l’université, ils ne sont pas trop relou sur les absences. Si j’ai une compétition d’une semaine, que ce soit les championnats de France ou une World Series à l’étranger, je peux le faire sans souci tant que je rattrape.

Mais pour ça, il faut que je sois pris (sans oublier la validation du bac, ndlr). Comme tout est anonymisé sur Parcoursup, l’université ne peut pas me garantir que mon voeu sera exaucé. J’ai d’autres options, même si je n’ai pas pu discuter des aménagements possibles dans les autres voies. Dans le pire des cas, je ferai une année sabbatique. Le report des Jeux a forcément été une déception parce que j’étais qualifié et je m’étais fait à l’idée d’être prêt cet été. Mais sportivement, ça me laisse un an de plus pour me préparer et, quand on est jeune, c’est énorme pour améliorer ses temps."

Ugo Didier (19 ans), 2e année d’études d’ingénieur

► La chance d’être dans une filière spécialisée

Mon école, l’INSA, me propose un cursus aménagé pour les sportifs de haut niveau. Le report va certainement changer certaines choses parce qu’on avait tout planifié sur le plan scolaire et sur le plan sportif. J’avais aménagé mon emploi du temps pour qu’il soit un peu plus léger qu’à la normale cette année. Je suis à cheval entre la 1re et la 2e année, c’est-à-dire que je suis à la fois des enseignements de 1re année et de 2e année. Il va falloir voir en fonction des possibilités qui me sont proposées. Je devrai regarder la date d’examen de certaines matières avant de les choisir, pour éviter d’être absent pour cause de compétition de natation.

Une année de préparation pour les JO laisse moins d’espace aux études. D’un point de vue scolaire, ça demande plus de sacrifices. Déjà cette année, cinq mois avant les Jeux, j’ai senti que c’était une année plus pesante. Heureusement qu’ils se dérouleront à la même période de l’année. Il n’y aura pas de changement de planification scolaire et sportive énorme. Mais il est clair que l’année des Jeux veut dire plus de stages avec l’équipe de France. L’année dernière on a fait un stage d’un mois en Australie. Mais bon, pour l’anecdote, on commence à être habitués aux reports. En 2017, les Mondiaux avaient été reportés après des tremblements de terre à Mexico. Pareil en 2019, avec un report et un changement de lieu à cause de problèmes géopolitiques…

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