JO de Paris 2024 : "On a besoin de rêver, on ne meurt jamais d'une overdose de rêve", s'émerveille le réalisateur Claude Lelouch
"On a besoin de rêver. On ne meurt jamais d'une overdose de rêve", s'émerveille le réalisateur Claude Lelouch, à la veille de la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques de Paris 2024, prévue vendredi 26 juillet. Le cinéaste, qui a coréalisé avec François Reichenbach Treize Jours en France sur les JO d’hiver de Grenoble en 1968, avait souhaité filmer "un moment de joie formidable". Vendredi, lors de la cérémonie d'ouverture, il s'attend à voir les spectateurs avec "des yeux incroyables" et les appelle à "profiter du présent". "Les Jeux, c'est une déclaration d'amour à la terre entière", s'enthousiasme Claude Lelouch.
Franceinfo : Comment avez-vous vécu l'expérience unique de filmer des Jeux olympiques en France ?
Claude Lelouch : Les Jeux, c'est une déclaration d'amour à la terre entière. Les hommes et les femmes viennent d'un peu partout. Et puis, pendant treize jours à l'époque à Grenoble, on a fait du sport, la fête, l'amour et de la musique. Tout se mélange. Il y a ce qui se passe le jour sur le terrain. Et puis il y a ce qui se passe la nuit. Il y a les fêtes, il y a toutes les stars qui défilent. C'est une sorte de grand carnaval, merveilleux, extraordinaire, que j'ai eu la chance de filmer avec Treize jours en France, dont les vedettes étaient entre autres Jean-Claude Killy, Marielle Goitschel, mais surtout le général de Gaulle. J'ai eu la chance de pouvoir vivre ça. J'ai filmé aussi les Jeux de Munich, des moments plus difficiles. Le sport fait partie de ma vie. Je pense que la vie est un sport. Il faut arriver premier dans le cœur de certaines personnes. Même l'amour est un sport, puisqu'il faut arriver numéro un. Et en amour, quand on est deuxième, on est cocu, alors qu'en sport, on a quand même droit à une médaille d'argent.
Avec "Treize Jours en France", vous avez filmé le sport autrement et êtes aussi allé chercher ce qu'il y avait autour des Jeux.
J'avais envie de filmer cette France de 1968 qui, quelques mois plus tard, allait aussi aller sur les barricades et changer beaucoup de choses. On se souvient très vite de ses souvenirs personnels. Les médailles des uns et des autres, les gens ont tendance à les oublier. C'est comme pour les Oscars, les César, on ne se souvient plus qui a eu quoi, mais on se souvient de la joie et de la fête. Je pense que ce qui va se passer en France avec ces Jeux, c'est la fête. Évidemment, il va y avoir les médailles, il va y avoir la compétition. Mais je pense que ces millions de gens, qui vont se retrouver en France, vont faire la fête avant toute chose. Dans les matchs de football, les supporters, regardez la fête qu'ils font avant et après le match. C'est cette fête qui m'intéressait. Je savais qu'il fallait filmer plus la société de l'époque que les compétitions, puisque les compétitions, elles avaient déjà été filmées en direct par la télé. C'est un moment de joie formidable. Et c'est ce que j'aime le plus dans le sport en général, c'est qu'il réunit. Le Tour de France, il y a la France entière qui est sur les routes, qui fait la fête, qui boit, qui mange, qui chante. Et on a tellement besoin de penser à autre chose, on a besoin de rêver. On ne meure jamais d'une overdose de rêve.
Est-ce que tout l'environnement du sport et des sportifs est cinématographique ?
Bien évidemment, puisque la vie est un suspense. Une course, c'est un suspense parfait qui dure dix secondes ou qui dure 50 minutes. Ce sont des micro-vies. Ce sont des raccourcis absolument incroyables des plaisirs que nous donne la vie mais qu'on n'apprécie pas au quotidien. Et là, d'un seul coup, on est à 300 à l'heure. Demain, il va y avoir une cérémonie. Je pense que les gens vont avoir des yeux incroyables, ils vont voir plus que d'habitude. A partir du moment où on réveille nos sens, on apprécie mieux le présent. La seule chose qui nous appartienne, c'est le présent. Et toutes ces grandes occasions nous permettent d'apprécier le présent. C'est la seule chose qui nous appartienne et qui n'a pas le temps de vieillir. Donc il faut en profiter. J'ai la plupart de mes amis qui ont quitté Paris. Moi, je ne veux pas rater ça. Ça n'arrive qu'une fois tous les cent ans. Je ne vais pas aller bêtement sur une plage idiote où je peux aller quand je veux. Je n'ai pas envie de rater Paris demain. J'ai envie, pour ma mémoire personnelle, pour mes enfants, mes petits-enfants, de filmer tout ça dans ma tête et peut-être même avec mon portable.
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