Annulation du tournage de "Koh-Lanta" : "TF1 n'a pas reculé devant la perte financière" et a pris "une décision extrêmement difficile et forte"
"C'est l'un des programmes qui marchent le mieux depuis 18 ans et qui rapportent énormément d'argent en publicité chaque semaine", indique vendredi sur franceinfo François Jost, professeur en sciences de l'information.
"Ce qui est intéressant et important, c'est de voir que TF1 n'a pas reculé devant la perte financière pour des raisons d'images", explique vendredi 11 mai sur franceinfo, François Jost, sémiologue et professeur en sciences de l'information et de la communication à la Sorbonne nouvelle - Paris-III. Le tournage de la nouvelle saison de "Koh-Lanta", émission de téléréalité diffusée sur TF1, a été annulé. Une participante accuse un autre candidat de l'avoir agressée sexuellement, a indiqué vendredi Adventure Line Productions, la société de production du jeu, dans un communiqué. Le mis en cause dément, selon ce communiqué.
franceinfo : Arrêter un tournage, c'est un enjeu économique important pour la chaîne ?
François Jost : Arrêter la production de cette émission, c'est une décision extrêmement difficile et forte. Ce soupçon d'agression sexuelle, c'est quelque chose qui pèse sur cette téléréalité, qui ne convient plus du tout dans notre époque et surtout pour un public familial. La téléréalité qui existe sur des chaînes beaucoup moins connues comme NRJ 12 ou d'autres repose sur des histoires de couple, de la drague et des rapports difficiles entre les garçons et les filles. C'est pour un public beaucoup plus jeune. Ce serait possible de continuer sur ce genre de chaîne [malgré ce soupçon d'agression sexuelle] mais pas sur TF1 qui a un public familial.
Dans cette décision de TF1, y-a-t-il une influence du phénomène #Metoo ou #BalanceTonPorc ?
Il y a une quinzaine d'années, quand l'émission "Koh-Lanta" a commencé, il y a eu un candidat qui s'appelait Moundir et qui était vraiment macho, d'une grande vulgarité, d'une grande brutalité avec les femmes et presque agressif. Aujourd'hui ça n'est plus possible d'autant moins sur une chaîne qui se veut fédératrice comme TF1.
Une émission comme "Koh-Lanta" vise absolument à être familiale. C'est une question d'image
François Jostfranceinfo
Ce qui est intéressant et important, c'est de voir que TF1 n'a pas reculé devant la perte financière pour des raisons d'images. C'est une stratégie qui est assez intéressante car elle fait passer l'économie derrière le sens.
Le monde de la téléréalité a beaucoup évolué, avec une professionnalisation. Comment l'analysez-vous ?
Aujourd'hui, les candidats de la téléréalité ont déjà participé à d'autres émissions du même genre. Il n'y a plus cette promesse qu'il y avait au début de mettre en avant des anonymes. Il y a des gens qui ne font plus que ça. Il y a des spécialistes des confidences de la téléréalité. Il y a des spectateurs qui prennent plaisir à regarder à la télé des embrouilles, des disputes, la violence. Pour ce qui est des candidats, tout d'un coup, ils ont l'impression d'exister. Tous les jours, ils subissent leur vie et là, à travers ce regard qui se tourne vers eux, il y a cette sensation d'exister. Ils subissent une forte dépression quand c'est fini, cette sensation disparaît. Ce qui pousse certains candidats à de la violence ou au suicide.
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