Serge Papagalli de Grenoble à Kaamelott
Serge Papagalli, c’est d’abord une gueule. Cheveux blancs et grosse moustache, une carrure de bûcheron et une gouaille dauphinoise dont il est seul à détenir le secret.
L’homme est né il y a 65 ans à Grenoble et le Dauphiné colle à la semelle de ses chaussures. La plus grande partie des spectacles dont il signe depuis plus de trente ans l’écriture, la mise en scène et l’interprétation s’inspire des paysans de sa région.
Surtout connu pour ses pièces où les héros ruraux se nomment Fonfon ou Aimé Maudru, Serge Papagalli ne s’est pourtant pas limité à l’humour régionaliste. Loin de là. Le cinéma, la télévision mais aussi la radio ont su tirer parti de la faconde et du sens de la répartie de l’artiste.
Il a sorti en 2011 son premier film en tant que réalisateur, « Mais y va où le monde », suite de la pièce « Le Dauphinois libéré » et qui précède une autre pièce mettant en scène la même famille Maudru « On va tacher moyen ».
Bande annonce de « mais y va où le monde ? »
De la marionnette au one man show
Débutant en 1971 à la tête d’une compagnie de marionnettes, le théâtre du Beffroi, Serge Papagalli a vite abandonné la manipulation pour se lancer sur la scène en chair et en os, entouré d’une troupe fidèle ou seul face au public.
Du théâtre 145 à Grenoble dont il fut longtemps le directeur, jusqu’à la Comédie du Dauphiné qu’il dirige aujourd’hui il a écrit et créé 58 pièces originales.
Au sein de ses propres compagnies, Serge Papagalli a connu toutes les configurations : il fût ainsi l’un des acteurs dans la troupe qu’il dirige à l’occasion de « Plus la peine de frimer », ou encore d’un « Un palmier dans la tête ». On l’a revu en duo avec notamment l’incomparable Jacques Castaldo ou l’habituel tragédien Gilles Arbona. On l’a enfin redécouvert dans l’exercice périlleux du One man show. Il n’avait alors rien à envier à un Bedos, un Romain Bouteille ou à un François Rollin. Ses pièces s’intitulaient alors « Agaceries » ou « Manger pour ne rien dire ».
De l’humour à l’humour en passant par Shakespeare et Brecht
Mais il n’est pas le seul metteur en scène à avoir fait confiance à Serge Papagalli comédien, et des pointures telles que Daniel Mesguich ou Jean-Vincent Brisa ont su utiliser sa faconde et son incroyable présence dans leurs mises en scènes de Molière, Shakespeare, Topor ou Brecht.
A la télévision, il est aujourd’hui connu et reconnu dans la série humoristique Kaamelott sous le nom de Guethenoc, le chef des paysans, toujours prêt à revendiquer.
Serge Papagalli dans le rôle de Guethenoc dans un épisode de Kaamelott
Des expressions qui resteront
L’humour de Serge Papagalli, s’il touche souvent à l’absurde, ne perd jamais la réalité de vue. Quand il raconte les soucis de la famille Maudru, ces paysans dauphinois à la fois comiques et attachants qui se heurtent à l’évolution des techniques, des lois et des mentalités, il sait que dans les campagnes françaises de 2012 de nombreux agriculteurs se donnent la mort par désespoir. Il ne ridiculise pas les drames, il les illustre avec humour. Il n’oublie surtout pas que ses personnages, qu’ils soient poivrot ou vieux campagnard dauphinois, n’ont jamais abdiqué leur dignité. « Je vomis, chez moi, Monsieur, dans la caisse à mon chat… ».
La langue de Serge Papagalli coule comme l’Isère, riche d’un vocabulaire à la fois régional et universel. Comme la rivière, elle prend sa source en altitude, irrigue les campagnes et vient flirter avec les villes et leurs banlieues. Cette langue il la connaît si bien qu’il a pu, en 2007 proposer un spectacle « Papagalli conte et narre, Les contes populaires du Dauphiné » à partir d’un florilège traditionnel qu’il a fait sien comme on passe un costume.
Extrait de « Négociant en vain »,
Serge Papagalli a su au fil de sa carrière enrichir la tradition de ses propres créations. C’est ainsi qu’une expression comme « On n’est pas des… quand même ! » est devenu à Grenoble et dans ses environs un leitmotiv qui continue toute seule son bonhomme de chemin. Mais quand on la prononce, entre Chartreuse et Belledonne, les yeux s’éclairent et chacun sait à qui on la doit.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.