Le Dandin de la farce au théâtre de la Croix-Rousse de Lyon
Dès le levé de rideau, le ton est donné. Ce George Dandin là, s'inscrit dans notre temps. Le décor est épuré et contemporain tout comme le jeu des acteurs. Il faut dire que le texte se prête à cette sobriété. Cette critique des moeurs du XVIIe siècle, a été imaginée jadis par Molière, et elle reste d'actualité.
On se surprend à n'avoir aucune empathie pour le mari trompé. Voire même à comprendre la jeune femme lorsqu'elle justifie sa conduite en déclarant acte II scène 2 : "mon dessein n’est pas de renoncer au monde, et de m’enterrer toute vive dans un mari. Comment, parce qu’un homme s’avise de nous épouser, il faut d’abord que toutes choses soient finies pour nous, et que nous rompions tout commerce avec les vivants ?". Par ces quelques phrases, Angélique résume le combat des féministes de notre siècle, à savoir la liberté des femmes à disposer de leur vie. Pour seule réponse son mari regrette de ne pouvoir la battre.
Derrière le rire de la farce, Jacques Osinski s'attache à révéler la noirceur de la pièce. Finalement, ces personnages sont tous pathétiques : les bourgeois qui acceptent de vendre leur fille pour ne pas perdre leur statut, le paysan qui donne sa fortune pour s'élever socialement. Seul personnage à déclencher une petite sympathie chez le spectateur : Lubin, brillament interprété par Grégoire Tchanakian. Sa naïveté fait du bien dans cet univers de coups tordus et de personnages calculateurs et égoïstes. Il est le seul à voir du beau, là où tout n'est que duperie. Lubin est d'ailleurs, sans le vouloir, à l'origine de la divulgation du secret.
"George Dandin" n'est pas l'une des pièces les plus célèbres de Molière, en tout cas pas celle qui vient spontanément à l'esprit. Il faut dire que plus qu'une autre, elle est une comédie cruelle. Comme Jacques Osinski, bien des metteurs en scène ont souligné le tragique de cette farce. Tous les ingrédients sont réunis dans le texte pour captiver le spectateur : l'argent, l'amour impossible, la lutte des classes, le mari cocu. Si assurément, on passe un bon moment, il manque un petit quelque chose pour faire de ce spectacle un divertissement inoubliable. Il faut dire que de toutes les adaptations de "George Dandin" au théâtre, une seule est restée dans les annales. C'était en 1958, toujours dans l'agglomération lyonnaise, un "George Dandin" mis en scène par Roger Planchon au Théâtre de la Cité de Villeurbanne.
"George Dandin" de Molière par Jacques Osinski au théâtre de la Croix-Rousse Place Joannès Ambre 69004 Lyon
Jusqu'au 17 novembre 2012 à 20h - Places de 5 à 26 euros
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