Gisèle Casadesus, la doyenne des actrices françaises, s'est éteinte
Elle avait croisé beaucoup de vedettes, de Pierre Fresnay à Raimu et Gabin au cinéma, et récemment Gérard Depardieu, dans "La tête en friche" de Jean Becker (2010). "On a envie de le prendre dans les bras, c'est un gros nounours. Il a été tout à fait sympathique et charmant, on s'est très bien entendu", avait-elle dit.
Engagée à la Comédie-Française en 1934
400e sociétaire de Molière, elle avait été engagée à la Comédie-Française à vingt ans, en 1934. Elle y resta jusqu'en 1962 en jouant Rosine du "Barbier de Séville" de Beaumarchais et y passe trente ans, avec un emploi qui évolua de l'ingénue et jeune première du répertoire à la soubrette de Marivaux et à la jeune femme piquante de Feydeau.Le sociétariat lui a été conféré en 1939 après notamment sa participation à la création d'"Asmodée" de Mauriac (rôle d'Emmanuelle) de "Madame Quinze" de Jean Sarment (rôle de Mme de Céran). Après son départ du Français, elle joua sur d'autres scènes Anouilh, Ionesco, Roussin, Beckett, Duras et encore Pirandello lors de la saison 2002-2003, ce qui lui valut un Molière d'honneur.
La doyenne d'une famille d'artistes
Dans la famille Casadesus, on est musicien, comédien, chanteur ou artiste. Ses quatre enfants sont d'ailleurs devenus respectivement chef d'orchestre (Jean-Claude Casadesus), comédienne (Martine Pascal), peintre (Béatrice Casadesus) et compositeur (Dominique Probst). "Chez nous , c'était le conservatoire d'abord", rappelait-elle.Encore au conservatoire, elle partage l'affiche dans une pièce avec Pierre Fresnay. "Un grand trac pour une jeune comédienne de 19 ans!" s'exclamait-elle. "Il y avait une scène d'amour, où Pierre Fresnay me prenait dans ses bras, il me renversait en arrière, il mettait son pouce sur ma bouche et il embrassait son pouce! Ca m'arrangeait très bien, d'autant qu'il y avait (sa compagne) Yvonne Printemps dans la salle !".
Dans son appartement montmartrois - elle vivait depuis toujours dans le même immeuble - Gisèle Casadesus était entourée de bustes de Molière et de photos de la ravissante jeune première des débuts à la Comédie-Française.
Le secret de la longévité
Lorsqu'elle entre au "Français" en 1934, c'est Madeleine Renaud qui joue les "ingénues". "Elle m'a fait don des rôles de jeunes filles aimablement", disait-elle délicatement. "J'avais une telle admiration pour Madeleine Renaud!". La Comédie-Française est un petit monde, où les rivalités ne manquent pas, mais Gisèle Casadesus sait survoler les mesquineries avec élégance: "J'ai eu la chance de passer au travers, de ne pas le voir et de ne pas en souffrir", disait-elle.Est-ce le secret de la longévité? Gisèle Casadesus ne retenait que les bons souvenirs. Comme ce rôle dans la première pièce de François Mauriac, "Asmodée", qui lance sa carrière. Ou les anecdotes sur les souffleuses, "personnages d'une grande autorité". "Quand j'ai débuté au Français, il n'y avait pas vraiment de metteur en scène, c'était une souffleuse qui indiquait où devaient se placer les comédiens", racontait-elle. "Elles vous disaient facilement: Untel faisait comme ceci, et nous on disait et bien moi, je ferai comme cela!"
Elle allait toujours beaucoup au théâtre, était invitée aux premières à la Comédie-Française, sa "maison". "Il y a une très bonne troupe. Ils savent tout faire les jeunes, maintenant!" Gisèle Casadesus ne jouait plus au théâtre depuis quelques années, mais acceptait très volontiers des rôles au cinéma. "Ah oui, je tourne! Ca m'amuse, et puis on s'occupe bien de vous", souriait-elle.
Deux ouvrages de souvenirs avaient été publiés pour son centenaire, "Cent ans, c'est passé si vite" (Le passeur éditeur) et "Gisèle Casadesus, Le jeu de l'amour et du théâtre" (Philippe Rey).
Gisèle Casadesus ou l'élégance de jouer
Gisèle Casadesus incarnait l'élégance et le bonheur de jouer. Son immense talent, son regard, sa voix nous manquent déjà.
— Francoise Nyssen (@FrancoiseNyssen) 25 septembre 2017
Des obsèques à l'île de Ré
"C'est le point de chute (...). Tout le monde s'y retrouve", avait souligné la sociétaire honoraire de la Comédie-Française, évoquant ses souvenirs de l'île de Ré, avec ses quatre enfants, ses petits-enfants, et arrière-petits-enfants.
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