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Avignon : "Standing in time", neuf femmes maories dans une cérémonie mystique, belle et mystérieuse

Au festival d’Avignon, la pièce "Standing in time" du Néo-Zélandais d’origine samoane Lemi Ponifasio s’éloigne de toute histoire racontée. L’artiste veut parler au temps présent en présentant neuf femmes dans une cérémonie mystérieuse mais envoûtante. C’est mystique mais aussi politique : son travail auprès des communautés maories vise à redonner un pouvoir aux femmes.
Article rédigé par franceinfo - Christian Tortel
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Standing in time  à Avignon
 (France Ô / Culturebox)

"Nous faisons de l’art, pas de la culture", nous affirme frontalement l’artiste du Pacifique. Sa pièce ne donne pas de clés pour comprendre. Lui-même répond à toute question qu’il "n’est pas étudiant", qu’il "ne recherche pas une compréhension culturelle". Ou encore : "Je n’ai pas à vous donner ce que vous voulez nécessairement".

Propos politique

Ce démarquage a une visée politique. Il travaille avec les communautés maories et singulièrement les femmes dont il se demande "pourquoi elles ont disparu du paysage social". Son travail est profondément ancré dans la culture du Pacifique où le rituel et le quotidien sont étroitement entremêlés. Qu’on pense à la culture de l’igname en Nouvelle-Calédonie.

Un représentant du Centre culturel Tjibaou, de Nouméa, Guillaume Soulard, nous dit combien son processus de création, que le Centre suit depuis le festival des arts du Pacifique en 2000 veut intégrer quotidien et spiritualité. Pour Lemi Ponifasio "le théâtre, c‘est rendre nos vies humaines présentes dans une perspective cosmologique."

Pas d’explications, pas de sur-titres, pas de narration

Le début de "Standing in time" est fascinant. Le spectateur est déstabilisé par un plateau dépouillé, mais utilisé dans toute sa largeur. Côté cour, un chœur de femmes vêtues de noir entonne un chant maori. Côté jardin, une seule femme lui répond, elle aussi vêtue de noir, plus âgée et plus petite de taille. C’est une langue différente qu’aucune indication ne précise. Elle chante en mapuche, les Mapuche étant des Amérindiens du Chili et d’Argentine.

Si vous connaissez ce détail, vous imaginez le plateau représentant l’océan Pacifique tout entier, au-delà duquel dialoguent des femmes. Le dispositif est d’une très grande force. Mais si vous ignorez que les deux langues sont différentes et sans point commun, vous imaginez autre chose. Quoi ? Lemi Ponifasio renvoie le spectateur à son propre rôle : "Je ne suis pas un raconteur d’histoires, chacun se raconte l’histoire qu’il veut".

Reportage : Christian Tortel, Albane Lussien, Philippe Champenois. Montage : Gilles Dagneau. Mixage : Bruno Haetjens.
Très applaudi, ce spectacle laisse perplexe une partie du public en raison même de ses choix radicaux : pas d’explications, de sur-titres, de textes, pas de narration sinon une cérémonie au cours de laquelle une femme nue s’expose dans son mutisme alors que continuent les chœurs sur un fond sonore qui peut être le milieu d’un ventre ou le fond du cosmos. La puissance de la performance est à ce prix : se rendre disponible au mystère.

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