« Les Indes », poème fondateur d’Edouard Glissant par Sophie Bourel, une première à la Maison de la poésie à Paris
« La mémoire des esclaves et celle des esclavagistes doivent se rencontrer. Nous avons besoin de nous souvenir ensemble ». C’est ainsi que la comédienne Sophie Bourel présente l’enjeu de ce texte dit en public. Pas seulement lu pour soi mais partagé en public comme elle l’a fait lors d’une tournée dans les Caraïbes en 2009 (Cuba, Haiti, République dominicaine).
Reportage : C. Tortel, M. Bouretima, B. Haetjens, M. Bergeron, P. Evrard.
Pour préparer cette première à Paris, le 29 mai à la Maison de la poésie, elle a appris par cœur ce long poème d’une cinquantaine de pages. Une performance au vu de la langue de Glissant. Les images habituelles de la Découverte des Amériques par Christophe Colomb ne sont pas les seules convoquées.
« Mangrove textuelle »
Ce « poème de l’une à l’autre terre », selon le sous-titre originel, est un chant élégiaque, une « mangrove textuelle », pour reprendre l’expression de l’universitaire tunisienne Samia Kassab-Charfi, qui fait alterner un « lieu convoité », les Indes de Colomb et des conquistadores espagnols, et un « non-lieu », un lieu pensé comme utopie. Glissant a ainsi « décentré le regard élogieux du lecteur occidental », selon les mots de l’universitaire Anaïs Stampfli pour « l’initier à la pensée de la Relation ».Dans « Les Indes », Glissant confronte des mémoires antagonistes pour les faire dialoguer. Il esquisse ainsi des pistes pour le Tout-Monde à venir. Un long compagnonnage avec le poète disparu en 2011 avait permis à Sophie Bourel de travailler le texte au plus près de sa source. Le poème puise dans l’Appel, le Voyage, la Conquête, la Traite [négrière], les Héros [rebelles] et dans la Relation, selon les titres des six chants qui le constituent.
Deux ans après « Les Indes », en 1958, Édouard Glissant est lauréat du prix Renaudot pour son roman « La Lézarde ».
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