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Dieudonné va-t-il perdre la Main d'Or, son théâtre depuis 15 ans ?

C'est le nerf de la guerre du "système Dieudonné", là où il se produit depuis presque 15 ans : le théâtre de la Main d'Or est au coeur d'une bataille juridique entre le polémiste et ses propriétaires, qui veulent l'en expulser. Une audience est prévue mardi.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Le théâtre de la Main d'Or à Paris
 (Christophe Ena/AP/SIPA)

En janvier, quand le ministre de l'Intérieur Manuel Valls tentait d'interdire le spectacle de l'humoriste controversé, les quatre propriétaires du théâtre parisien --réunis dans une SCI-- avaient fait savoir qu'ils entendaient faire partir l'ancien acolyte d'Elie Semoun "de manière légale". "On ne partage pas les convictions qui sont les siennes", avait alors expliqué l'un d'eux à l'AFP. Quelques semaines plus tard, leur plainte était déposée au tribunal de grande instance de Paris.

Selon l'assignation, la société Bonnie Productions, qui produisait les spectacles de Dieudonné, a signé en 2010 un bail de neuf ans l'autorisant à exploiter le théâtre, bail que les propriétaires ont repris à leur compte quand ils ont acquis les lieux un an plus tard. Mais ils estiment que ce contrat n'est plus valable aujourd'hui, car Bonnie Productions a été radiée du registre du commerce et des sociétés "pour cessation d'activité le 19 septembre 2013". "Elle n'exploite plus les lieux personnellement (...) ce qui constitue une infraction aux stipulations contractuelles", selon l'assignation.

Les propriétaires disent ignorer "qui exploite le théâtre, mais il semblerait bien que ce soit la société Les Productions de la plume", possédée à parts égales par la mère et la compagne de Dieudonné et qui fait actuellement l'objet d'un contrôle fiscal. Ils considèrent cette société comme "un occupant sans droit ni titre" et demandent son expulsion. Ils réclament parallèlement la résiliation du bail passé avec Bonnie Productions. Les propriétaires considèrent en outre que le théâtre n'est pas assuré, "une situation particulièrement inquiétante au regard d'un établissement recevant du public". Selon eux, le contrat d'assurance souscrit par Les Productions de la plume n'est pas valable car cette société n'a, là encore, "aucun titre" pour le faire. -

57 000 euros par semaine 

L'avocat de Dieudonné, François Dangléhant, a expliqué qu'il demanderait le renvoi de l'affaire. Bonnie Productions "a été radiée dans des conditions inédites, extravagantes, on pourrait même dire +baroques+", assure-t-il, sans donner plus de précisions. Comme la société "n'a plus d'existence légale", elle ne peut pas être attaquée en justice et l'assignation est "entachée par une nullité". Il précise en revanche que "la société Les Productions de la plume s'estime titulaire du bail". Elle a "au vu et au su" des propriétaires "exploité les lieux et réglé le loyer pendant plus de deux années, sans engagement d'une procédure d'expulsion".

Citant le code du commerce, il estime que dans ce cas, un nouveau bail s'opère automatiquement. Me Dangléhant considère qu'il "n'y a pas eu à proprement parler de modification de la personnalité du locataire", car "Bonnie Productions et Les Productions de le plume sont deux entités juridiques totalement liées autour de la personnalité de celui qui fait la clientèle du fonds théâtral, à savoir l'artiste Dieudonné". Dans ces conditions, la police d'assurance des Productions de la plume est selon lui "toujours en vigueur".

Avec habituellement six représentations par semaine, devant plus de 250 personnes, et un ticket au prix moyen de 38 euros, le théâtre rapporte chaque semaine 57.000 euros à la société de production de Dieudonné. L'espace comporte aussi un débit de boisson les soirs de représentation et une boutique où les fans peuvent acheter les produits dérivés du polémiste, condamné à de multiples reprises pour antisémitisme. Selon son avocat, les loyers du théâtre depuis 2001 s'élèvent à plus de 2 millions d'euros. L'avocate des propriétaires, Dominique Cohen-Trumer, a refusé de s'exprimer sur l'affaire.

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