Dieudonné reste interdit à Nantes : le Conseil d'Etat a suivi Manuel Valls
"La République a gagné", s'est félicité de son côté Manuel Valls. Jean-Marc Ayrault a, lui, considéré que la décision du Conseil d'Etat "conforte la position du gouvernement".
Sur place, devant le Zenith de Nantes, la nouvelle a été accueillie par des cris et des sifflets. Les fans déçus rassemblés devant la salle nantaise ont scandé "liberté d'expression" après que le Directeur départemental de la sécurité publique(DDSP) Jean-Christophe Bernard, eut annoncé l'interdiction du spectacle. Les fans ont aussi chanté la Marseillaise. Certains de ces fans ont fait des doigts d'honneur devant les caméras, un autre a fait une "quenelle", tandis que d'autres scandaient "la quenelle" ou "Dieudonné". Je ne suis pas un facho parce que je viens voir Dieudonné", a affirmé à l'AFP un de ces spectateurs déçus.
"Ils cherchent l'affrontement physique"
Dieudonné avait appelé ses fans à rentrer chez eux, sur sa page Facebook. "Ils cherchent l'affrontement physique donc rentrez chez vous en chantant la Marseillaise ! Dieudonné fera une vidéo demain (10 janvier) sur la chaîne Youtube", écrit-il sur sa page Facebook où il possède 513.571 "amis".
Dans un autre message posté un peu plus tôt sur la même page, Dieudonné affirmait : "Nous avons demandé l'autorisation pour que Dieudonné sorte parler aux spectateurs ! Mais les autorités ont refusé... Nous cherchons un terrain d'entente !! Chantez la Marseillaise."
Le tribunal administratif avait d'abord autorisé la tenue du spectacle
En début d'après-midi jeudi, le tribunal administratif de Nantes avait suspendu l'arrêté préfectoral interdisant la représentation du spectacle "Le Mur" de Dieudonné M'bala M'bala le 9 janvier 2014 au Zénith de Saint-Herblain (banlieue de Nantes). Le tribunal avait argué que le spectacle "ne peut être regardé comme ayant pour objet essentiel de porter atteinte à la dignité humaine". Il ajoutait que "le risque de troubles publics causés par cette manifestation pour lesquels il n'est pas établi que le préfet ne disposait pas des moyens nécessaires au maintien de l'ordre public ne pouvait fonder une mesure aussi radicale que l'interdiction de ce spectacle".
Le tribunal indiquait aussi qu'il n'est "pas établi", au vu des pièces du dossier, que le spectacle ait été construit autour de la thématique des "propos provocants et choquants" à l'égard de "faits historiques comme à l'encontre de personnes de la communauté juive".
Mais Manuel Valls a saisi le Conseil d'Etat, qui lui a donné raison
Après cette décision qui ouvrait la voie à la tenue du spectacle le soir-même, le ministre de l'Intérieur Manuel Valls avait annoncé qu'il saisissait "immédiatement" en appel le Conseil d'Etat pour contester la décision du tribunal administratif de Nantes.
La décision de Nantes "n'éteint pas les voies de droit" car le tribunal administratif "a confirmé la thèse qui fait du respect de la dignité de la personne humaine une composante fondamentale de l'ordre public", avait déclaré Manuel Valls. Le Conseil d'Etat, qui a tenu une audience en urgence dès 17h, a finalement donné raison au ministre en interdisant la tenue du spectacle vers 18h30, soit deux heures avant le début de la représentation.
Cette décision est un retournement de jurisprudence, les tribunaux administratifs ayant, à une quinzaine de reprises ces dernières années, invalidé des arrêtés d'interdiction de spectacles de Dieudonné, condamné à de multiples reprises pour antisémitisme.
Valls, Ayrault et Filippetti se réjouissent
"La République a gagné", s'est félicité le ministre de l'Intérieur Manuel Valls, à l'origine lundi d'une circulaire préconisant l'interdiction au cas par cas du spectacle "Le Mur", pour troubles à l'ordre public. "On ne peut pas tolérer la haine de l'autre, le racisme, l'antisémitisme, le négationnisme, ce n'est pas possible, ce n'est pas ça la France", a dit le ministre depuis la mairie de Brest. "Mon combat se poursuit", a également dit Manuel Valls devant la presse. "Le combat contre ce personnage nauséabond se poursuit", a dit le ministre, qui a appelé les fans de Dieudonné qui voulaient aller voir le spectacle nantais à rentrer chez eux.
Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a estimé pour sa part que la décision du Conseil d'Etat "confortait la position du gouvernement" prise pour enrayer la "dérive antisémite" dans laquelle s'est, selon lui, engagé l'humoriste controversé.
Pour sa part, la ministre de la Culture Aurélie Filippetti a qualifié jeudi d'"historique" et "remarquable" la décision du Conseil d'Etat d'interdire le spectacle de Dieudonné. "Je me félicite de cette décision historique et remarquable pour moi."
Besancenot condamne l'interdiction
Olivier Besancenot (Nouveau Parti Anticapitaliste) a jugé vendredi "lamentable" l'interdiction du spectacle de Dieudonné, estimant que le gouvernement ferait mieux de s'en prendre aux licenciements. Sur France 2, celui qui fut deux fois candidat à l'Elysée a assuré que la décision du Conseil d'Etat était "lamentable" d'abord parce qu'elle est "fausse sur le fond. Visiblement, il y a des problèmes de droit". Ensuite, cette interdiction est "lourde de conséquences pour la liberté d'expression", et "inefficace" car "consciemment ou inconsciemment, Valls est devenu le plus grand publicitaire" du comédien et polémiste accusé d'antisémitisme.
Près de 90% des billets étaient vendus à Nantes
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